L'influence du "gaming" à la littérature

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23/08/2015

Robin Hobb, Les pillards, Les cités des anciens, tome 6

Il y a longtemps que le Mataf est reparti se réapprovisionner et avec lui, son capitaine, dont Alise se languit de plus en plus. Mais la vie à Kelsingra doit continuer coûte que coûte. Les dragons grandissent peu à peu et commencent à prendre forme. Mais trop lentement au goût de certains, comme la dragonne Sintara qui, à force d’essayer, finit par réussir à voler à son tour.

La cité elle-même commence à révéler les trésors qu’elle renferme. Alors que tous la pensait en ruine, des découvertes fortuites de Kanaï et de Thymara vont montrer qu’elle est bien vivante. Et oui, le merveilleux sous la plume de Robin Hobb ne prend pas seulement la forme de ces magnifiques créatures ailées, elle réside également dans cette cité des Anciens miraculeusement conservée. Et c’est Sintara qui va réveiller la magie enfouie en ses murs. Tout comme ses personnages, on est fasciné par cette prodigieuse cité, on meurt d’envie de parcourir les rues, de pousser les portes pour voir quel mystère se cache derrière. A l’image des dragons qui savent se montrer hypnotiques, Kelsingra est toute aussi envoûtante. Il est donc primordial que les dragons passent de l’autre côté du fleuve afin qu’ensemble, gardiens en phase de devenir Anciens et dragons s’allient pour que la cité retrouve sa splendeur d’antan.


Du côté de Cassaric, le capitaine Leftrin vient d’accoster et le moment est venu pour lui d’ouvrir les négociations avec les marchands. Il doit récupérer la paie de chacun des gardiens, des membres de l'équipage ainsi que la sienne puisque le contrat a été honoré. Seulement, les roublards de marchands veulent des preuves, ils souhaitent que tout leur soit révélé avant de verser le moindre centime. Les choses se corsent de ce côté-là, sans parler de l’arrivée inopinée de Malta et Reyn Khuprus qui va précipiter et changer la donne.


Un tome 6 qui relance l’action et noue de nouvelles intrigues apportant ainsi un nouveau souffle à cette aventure. Des éléments sont mis en place et aiguillonnent le lecteur sur ce qui va suivre. Les pillards apparaissent comme un amuse-bouche annonçant un final, qui à mon sens sera impétueux avec cette menace chalcédienne de plus en plus prégnante.


Fantasy à la carte

16/08/2015

James Tollum, Les tribulations d'un Nâga

Pour rappel, James Tollum a inséré son histoire fantasy dans un univers imaginaire de son cru se divisant en deux espaces distincts avec d’un côté les terres d’Antyras et de l’autre, les terres d’Avalyn. C’est justement au sein des terres d’Avalyn que se déroule l’intrigue de cette courte nouvelle des Tribulations d’un Nâga. Ce territoire, on le sait, est peuplé de créatures fantasmagoriques tirées pour la plupart du bestiaire merveilleux. Et parmi elle, figure en bonne place dans l’histoire, le Nâga. Cet être mythique de l’hindouisme est souvent décrit comme étant un serpent à tête d’homme. Dans la croyance hindoue, il est un gardien et un protecteur, un médiateur entre ciel et terre, autrement dit entre le monde des vivants et celui des morts. On le surnomme le gardien des trésors de la terre. Or, justement dans cette courte histoire, James Tollum s’inspire de ces caractéristiques. Déjà son héros Lashmar a pour habitude de récolter et collectionner tous les objets qui lui passent entre les mains. Ce sont ses trésors qu’il garde jalousement. Jusqu’au jour où il convoite le bien d’un autre au point d’user de violence pour l’obtenir. Ce terrible forfait lui vaudra le bannissement de son clan pendant un an.

Ne pouvant supporter la proximité des siens sans avoir le droit de les approcher et en étudiant un vieux parchemin qui traînait parmi ses trésors, Lashmar est pris d’une folle idée. Celle de se rendre dans les Sables de feu afin de trouver dans le temple lunaire une statue à l’effigie d’Elanörin dont le front est ceint d’une pierre magique qui aurait le pouvoir d’invisibilité. Or, c’est cette pierre que vise le Nâga. Elle sera son prochain trésor à ajouter à sa collection. Et quelle puissance, elle lui apporterait.

Le voici donc parti ce jeune Nâga insouciant, croyant à sa bonne fortune s’il la trouvait. Chemin faisant, il fera d’étonnantes rencontres qui l’amèneront à destination sans trop d’encombres. Seulement, les choix qu’il fait aujourd’hui pourraient avoir des répercussions sur tout son peuple. Si seulement, on savait ce que l’avenir nous réserve…

James Tollum nous propose ici, une nouvelle bien à-propos pour comprendre comment tout un peuple a pu se retrouver maudit par une déesse. Avec Les tribulations d’un Nâga, l’auteur lève le voile sur la prophétie qui est à l’origine de la destinée du jeune Ethan, héros du cycle La prophétie des éléments. Un texte qui apparaît comme un préquel d'un cycle de fantasy française extraordinaire.
Fantasy à la carte

09/08/2015

Robin Hobb, La Fille de l'Assassin, Le Fou et l'Assassin, tome 2

Surmonter un immense chagrin, survivre à la perte d'un être cher, continuer à vivre malgré l'absence, voilà les affres du désespoir dans lesquelles le premier tome du cycle du Fou et de l'Assassin avait plongé Fitz.  

Ce second volet se concentre sur la vie de Fitz et de sa fille. Molly disparue, il leur faut apprendre à vivre ensemble, à mieux se connaître maintenant qu'ils ne sont plus que tous les deux. Pas facile pour notre ex-assassin d'assumer son rôle de père avec tout ce que cela implique. D'autant qu'Abeille est une enfant particulière et qu'ils vont devoir vivre sous le regard scrutateur de leurs proches et de leur domesticité. Même Ortie, la fille aînée de Fitz est très septique quant aux capacités de son père pour se charger d'une petite fille. Mais pour ce dernier, il est hors de question de se séparer de son enfant. Tous deux vont donc s'engager sur le long chemin de la compréhension mutuelle et de l'acceptation de l'autre. Quant à Abeille, c'est en lisant les notes de son père qu'elle découvre qui il est en réalité? Et ce qu'il a été par le passé? Tom Blaireau n'est autre que FitzChevalerie Loinvoyant déclaré mort depuis des lustres. Incroyable, son père est de sang royal et un assassin à la retraite de surcroît. 

Un tome étonnant qui casse avec le schéma d'écriture habituel de l'autrice. Ici, elle alterne les points de vue de Fitz et d'Abeille d'un chapitre à l'autre. Cela marque un tournant dans les aventures de notre fameux catalyseur. En effet, en donnant la parole à la jeune Abeille, cela augure d'ores et déjà le rôle clé qu'elle va occuper dans la suite de l'intrigue. 

En suivant Fitz et sa fille, Robin Hobb nous lance dans un nouveau jeu de pistes initié par le Fou lui-même. Un autre cycle d'heroic fantasy débordant de mystères et de rebondissements qui nous captive du début à la fin. Encore du grand Robin Hobb! 


Fantasy à la carte

02/08/2015

Robin Hobb, Le Fou et l’Assassin, Le Fou et l’Assassin, tome 1

Quelle immense surprise de découvrir que Robin Hobb a décidé de faire reprendre du service à son célèbre assassin FitzChevalerie. 

Dix ans se sont écoulés depuis que Fitz a sorti le Fou des cachots de la femme pâle. Dix belles années pour notre héros qui a pris sa retraite en compagnie de son seul et unique amour, Molly. Malgré les années, les drames et l’éloignement, Fitz et Molly ont pu renouer et ranimer leur amour comme au premier jour. Retiré dans la demeure de son père à Flétribois, sa vie s’écoule paisiblement entouré de sa femme et de sa belle-mère, Patience. Sa fille Ortie a bien grandi et est devenue maîtresse d’Art à Castelcerf, près du roi Devoir. Quant aux enfants que Molly a eus avec Burrich, ils ont tous quitté la maison pour vivre leur propre vie. En somme, une vie bien rangée pour notre redoutable assassin. Enfin jusqu’au soir de la Fête de l’Hiver que les époux ont donné au domaine. Alors que Molly est incommodée par un malaise passager l’obligeant à se retirer tôt dans ses appartements, trois étrangers à l’allure louche se sont mêlés aux convives en se faisant passer pour des ménestrels. Malgré les tentatives de Fitz de les approcher afin d’en apprendre plus sur la raison de leur présence, il échoue. Et lorsqu’il se rend dans son bureau personnel, il découvre le sol taché de sang, sans parler des traces de lutte dans la pièce. Or, justement plus tôt dans la soirée, il avait été informé par l’un de ses serviteurs de l’arrivée d’une messagère qui patientait dans son bureau. Et voici, qu’il découvre son bureau sens dessus-dessous et nulle trace de la messagère et des faux-ménestrels. Qui sont-ils ? Que voulait-il ? Et de la part de qui venait cette messagère ? De quel message était-elle porteuse ? Tout cela risque de rester sans réponses pour Fitz d’autant qu’il est inquiet pour sa femme. Celle-ci n’est pas épargnée par les années et il la sent de plus en plus fragile après cette étrange soirée. La voici qui s’est mise en tête qu’elle est enceinte. Fitz demeure septique, d’autant que les mois passants, aucun bébé ne fait son apparition. Et pourtant deux années après cette étrange annonce, Molly accouche d’une toute petite fille, qu’elle prénomme Abeille. Fitz est autant émerveillé qu’effaré devant cette étonnante naissante. Père, il est à nouveau père, c’est à peine croyable. Tout à son bonheur, il n’en oublie pas les dangers que représente une telle situation. Déjà, l’enfant est fragile. Elle est beaucoup plus petite qu’un bébé normal. Tous pensent qu’elle ne survivra pas plus de quelques jours. Et si elle survit, elle est une Loinvoyant, elle aussi. Cette apparenté la met en danger au même titre que Fitz l’a été dans ses premières années. Or, Fitz refuse que sa fille devienne une cible. Il se fait donc la promesse de toujours protéger son enfant et de la préserver des souffrances que lui-même a connues. Mais une telle naissance ne va pas se passer sans remous. Et il sait que très bientôt, il devra en répondre à certains. De nouveaux dangers se bousculent à la porte de notre assassin retraité qui pourrait bien reprendre les armes…

Après des années d’absence, voilà que Robin Hobb nous propose une nouvelle aventure pour FitzChevalerie Loinvoyant. Une intrigue qui démarre doucement nous laissant apprécier ces retrouvailles avec notre héros. Il est intéressant de voir quelle tournure a pris sa vie, de voir qu’il avait enfin trouvé la paix et qu’un certain bonheur lui était accordé. Et puis, c’est l’introduction de nouvelles menaces qui viennent le bousculer. Comment va-t-il réagir ? Comment l’histoire va-t-elle évoluer puisqu’elle se termine sur un drame inéluctable et déchirant ? Robin Hobb nous prouve encore une fois combien sa plume peut être habile pour nous rendre accroc. 

Fantasy à la carte

26/07/2015

Robin Hobb

De son vrai nom Margaret Astrid Lindholm Ogden est une célèbre écrivaine de fantasy et de science-fiction, née le 5 mars 1952 à Berkeley, en Californie. Mais elle passe une grande partie de son enfance en Alaska, d’où son affection pour les grands espaces. D’ailleurs, elle se mariera très jeune avec un pêcheur et aura quatre enfants. Ce qui ne l’empêchera pas d’assouvir sa grande passion : l’écriture. 

C’est en 1971 sous le pseudonyme de « Megan Lindholm », qu’elle commence à écrire, d’abord des nouvelles publiées dans des magazines pour enfants et adolescents comme Jack and Jill, Humphy Dumpty ou Highlight. Puis par la suite, elle écrit des textes de science-fiction pour des fanzines. D’ailleurs, c’est grâce à l’un de ces fanzines : Fantaisie et Terreur qu’elle est remarquée. En effet, l’une de ses nouvelles se retrouvera publiée dans une anthologie au côté de grands noms des littératures de l’Imaginaire. Cette anthologie lui met donc le pied à l’étrier et lui permet de se constituer un premier lectorat. 

Plus tard, toujours sous ce nom de plume, le premier roman qui lui vaut un certain succès est Le Dernier Magicien. C’est l’histoire d’un vétéran de la guerre du Vietnam qui ère dans les rue de Seattle, luttant contre son syndrome de stress post-traumatique. Mais au-delà de ses démons intérieurs, il possède un don. Il ne le sait pas encore mais il est le seul être capable de sauver la ville d’un mal insidieux, il est le dernier magicien… un remarquable roman de fantasy urbaine qui reçoit en 2003 le prix Imaginales du meilleur roman de fantasy. Autre roman intéressant à citer, c’est le cycle de Ki et Vandien qui se divise en quatre tomes : Le Vol des harpies, Les Ventchanteuses, La Porte du Limbreth et Les Roues du destin, traduits et publiés aux éditions Mnémos entre 2004 et 2006. Par vengeance, la jeune Ki détruit un nid de harpies. Depuis ces ignobles créatures lui vouent une haine mortelle. Orpheline et désespérée, elle accepte de partir seule sur les routes avec sa roulotte afin d’emmener un colis à travers une chaîne de montagnes réputées infranchissables. En chemin, elle fait la connaissance d’un étrange voleur, Vandien qui se joint à son périple. Un duo étonnant qui emprunte le plus dangereux des chemins… 

Ainsi que le diptyque Le Peuple des rennes et Le Frère du Loup édité en France entre 2004 et 2005 par Le Pré aux Clercs. Pour sauver la vie de son fils, une jeune mère n’hésite pas à s’éloigner de sa tribu. Dans un univers froid et désolé, la guérisseuse Tillu vit seule avec son fils afin de le protéger des prétentions du chaman Carp qui souhaite en faire son apprenti. La vie de la jeune femme bascule le jour où elle trouve un chasseur blessé. Elle n’a pas d’autres choix que de l’accueillir chez elle afin de le soigner. Mais ce chasseur n’est pas n’importe qui, il fait partie de la tribu du peuple des rennes. Un détail qui pourrait bousculer bien des choses.

La particularité de cette autrice de fantasy est d’écrire sous deux pseudonymes. Après Megan Lindholm, elle se met à publier ses textes sous celui de Robin Hobb. D’ailleurs, c’est sous ce nom de plume qu’elle connaîtra ses plus grands succès littéraires. Des textes si marquants pour le genre qu’ils feront d’elle, l’auteure de fantasy la plus incontournable de ces dernières années. Pourquoi écrire sous deux noms différents ? Pour une plus grande liberté d’écriture, sans doute. Comme elle le dit elle-même dans une interview tirée du premier numéro de la revue fantasy, Asphodale : « Il y a des histoires qui correspondent à un style, et d’autres qui correspondent à l’autre style ». Cela lui permet d’écrire plus de choses. Ce qui est au final très libérateur pour elle. 

Presque tous les romans signés Robin Hobb appartiennent à un même univers qu’elle a commencé à développer avec l’écriture de son premier cycle : L’Assassin royal. Celui-ci se compose de six tomes : L’Apprenti assassin, L’Assassin du roi, La Nef du crépuscule, Le Poison de la vengeance, La Voie magique et La Reine solitaire. L’ensemble de ces romans ont été traduits et publiés par les éditions Pygmalion entre 1998 et 2000. Il est à noter qu'elle y ajoute un prélude en 2013 avec son roman Le Prince Bâtard. Ce premier cycle relate la destinée du jeune FitzChevalerie Loinvoyant, enfant illégitime de l’aîné des Loinvoyant, Chevalerie. A l’âge de six ans, le garçon se retrouve propulsé à Castelcerf, la capitale du royaume des Six-Duchés. Abandonné par sa mère dont il n’a aucun souvenir, Fitz est élevé par Burrich, le maître d’écurie mais aussi l’homme lige de Chevalerie. Cet homme bourru prendra maladroitement soin du jeune garçon pendant son enfance en lui apprenant notamment à s’occuper des animaux sans pour autant tolérer qu’il utilise son Vif aux yeux de tous. L’Assassin royal est en fait un roman d’apprentissage dans lequel Fitz va devoir apprendre à survivre au milieu des intrigues de cour d’abord sous la protection de Burrich, puis sous celle d’Umbre qui deviendra son mentor en faisant de lui un redoutable assassin ainsi que sous celle de son loup, Œil-de-nuit avec lequel il se liera par le Vif et enfin sous celle du Fou, qui prendra les traits de bouffon du roi dans la première partie de l’histoire. En devenant un assassin du roi à l’adolescence, Fitz s’engage sur un chemin semé d’embûches dans lequel il connaîtra danger et trahison mais aussi une vie bien solitaire. Car pour le bien de son roi et du royaume, il devra tout sacrifier. 

Dans le second volet des aventures de Fitz intitulé Le Prophète blanc, quinze ans se sont écoulés. Il comprend sept volumes : Le Prophète blanc, La Secte maudite, Les Secrets de Castelcerf, Serments et Deuils, Le Dragon des glaces, L’Homme noir et Adieux et Retrouvailles que les éditions Pygmalion ont publié entre 2004 et 2007. Fitz vit loin de la cour et de ses intrigues. Il s’occupe d’un jeune garçon prénommé Heur et reçoit régulièrement la visite de son amie, la ménestrelle Astérie avec laquelle il entretient des rapports charnels. Sa tranquillité se voit mise à mal le jour où il reçoit la visite de son ancien mentor, Umbre ainsi que celle de son ami le Fou. Le prince héritier Devoir a été enlevé par Les Pie. Leur but, se venger de ceux qui les ont persécutés car ils sont doués du Vif. Pour Fitz, il ne sera pas seulement question de sauver Devoir mais aussi de s’engager dans une nouvelle quête pour assurer la paix entre les Six-Duchés et les clans des îles.

Enfin, Robin Hobb s’est lancée il y a peu dans l’écriture d’un troisième relançant ainsi les aventures de son extraordinaire héros, FitzChevalerie. Car comme elle le dit dans une interview parue en début de semaine dernière dans Aujourd'hui en France, elle n'en a pas encore fini avec son héros. Cette trilogie se nomme Le Fou et L’Assassin. Seuls les deux premiers tomes ont été publiés à ce jour : Le Fou et L’Assassin en 2014 et La Fille de l’assassin en 2015, toujours aux éditions Pygmalion. Cette fois-ci, dix ans se sont écoulés depuis les dernières péripéties de notre assassin favori. Il était temps pour Fitz de déposer ses armes et d’épouser enfin la femme qu’il a toujours aimé, la douce chandelière Molly. Les voici donc mariés depuis huit années partageant un quotidien paisible à Flétribois. Tout allait bien jusqu’à cette Fête de l’Hiver au cours de laquelle ont débarqué trois étrangers à l’allure louche. Bien qu’ils se fassent passer pour des ménestrels pour justifier leur présence, l’instinct d’assassin de Fitz fut éveillé ce soir-là. D’autant qu’il découvrira des traces de lutte dans son bureau où l’attendait une messagère. Seul indice de sa présence, des taches de sang mais nul signe de la femme en question. Une bien étrange affaire qui restera un mystère. Car d’autres préoccupations vont accaparer toute son attention. En effet, la santé de Molly semble décliner. Pendant deux années, elle se croit enceinte. Tout le monde pense qu’elle a perdu la raison, même son époux. Jusqu’au soir où elle met au monde une étrange toute petite fille, prénommée Abeille. Que signifie cette étonnante naissance ? Une enfant blonde aux yeux très clairs en plus. Fitz a dû mal à réaliser qu’il est à nouveau père, surtout que la petite est bien chétive et à ce titre, elle pourrait bien ne pas survive très longtemps. Une naissance qui plonge l’ancien assassin dans les affres de l’inquiétude car comme lui, Abeille est une Loinvoyant, et si elle survit, elle risque de devenir autant un pion qu’une menace pour la couronne. 


Entre les deux premiers cycles de L’Assassin royal, Robin Hobb a intercalé une série de neuf romans réunis sous le titre des Aventuriers de la mer. Tous paraissent en français entre 2001 et 2007 édités chez Pygmalion. Il y est question de la destinée d’une famille de marchands de Terrilville. En fait, les Vestrit possèdent une vivenef, prénommée Vivacia qui leur permet de remonter le Désert des Pluies afin de faire le commerce d’objets merveilleux. Les vivenefs sont des navires doués de raison et de parole grâce au bois-sorcier dans lequel ils sont construits. 

Enfin, dernier cycle écrit par Robin Hobb qui s’inscrit dans ce même univers des Aventuriers de la mer est celui qui s’intitule Les Cités des Anciens. Cette tétralogie paraît en France en huit tomes entre 2010 et 2013 avec Dragons et Serpents, Les Eaux acides, La Fureur du fleuve, La Décrue, Les Gardiens des souvenirs, Les Pillards, Le Vol des dragons et Le Puits d’Argent. En échange de la protection de la dragonne Tintaglia, les marchands de Terrilville ont promis de prendre soin des dragons, prêts à éclore. Seulement, une fois éclos, ces derniers ne sont pas tout à fait en mesure de prendre seuls soin d’eux. Les riches marchands recrutent donc un groupe de gardiens chargés de les accompagner plus loin, en amont du fleuve du Désert des Pluies. Leur but, les éloigner au plus vite de la ville mais aussi avec l’espoir caché qu’ils découvrent l’emplacement de Kelsingra, la célèbre cité des anciens. Dans cette quête, ils seront escortés par une vivenef et son atypique capitaine. Il est à noter que Les Cités des Anciens prennent directement la suite des Aventuriers de la mer

Lorsque Robin Hobb commence à écrire les aventures de Fitz, elle ne pensait pas être inspirée pour développer son univers à un tel degré de précisions que de nombreux cycles verront le jour par la suite. Le point commun à tous ces textes est de proposer des intrigues différentes dans un univers imaginaire similaire et cohérent. 
La première étape empruntée par Robin Hobb est en l’occurrence d’insérer ses histoires dans une géographie spécifique. L’essentiel de l’action se déroule entre trois espaces distincts : Les Six-Duchés, le royaume des Montagnes et les Rivages Maudits. Néanmoins, Robin Hobb ne fige pas ses histoires dans de tel ou tel espace en fonction du roman concerné. Bien au contraire, dans la plupart de ses sagas, il y a des allusions à tel ou tel lieu et elle n’hésite pas à faire passer l’un de ses héros d’un cycle à l’autre. Si on regarde de plus près cet univers, on y découvre le royaume des Six-Duchés dans lequel se déroule l’essentiel de l’action de L’Assassin royal. Celui-ci se divise en six duchés, autrement dit six places fortes. Il y a Labour, Rippon, Béarns, Haurfond, Bauge et Cerf. A l’ouest, se trouve le royaume des Montagnes que Fitz découvre au cours de l’histoire lorsqu’il doit aller chercher la future épouse de son roi, Vérité. Enfin, plus au sud, s’étendent les Rivages Maudits. Ce sont les fameuses îles des Outriliens, plus connus sous le nom de Pirates rouges. Ceux qui ont tant sévi sur le continent des Six-Duchés et que Fitz a dû longtemps combattre. Ces Rivages Maudits seront aussi longuement mentionnés au cours des Aventuriers de la mer. Autre lieu mythique de l’univers de Hobb est Terrilville et la Baie des Marchands. Cette baie se situe au sud des Six-Duchés. Et c’est un haut lieu de commerce. Enfin, toujours à l’ouest des Six-Duchés mais au sud du royaume des Montagnes, existe un lieu secret où seule une poignée de personnes peuvent s’y rendre. C’est le Désert des Pluies, théâtre de l’action du cycle Les Cités des Anciens

Non seulement, Robin Hobb a inventé des pays imaginaires dans lequel évoluent ses personnages, mais elle leur a aussi attribué des cultes et des religions propres. Ainsi, les habitants des Six-Duchés et les Outriliens vénèrent la déesse de la terre Eda et le dieu de la mer El. Quant aux montagnards, ils sont protégés par la divinité Chranzuli. Enfin à Terilville et à Chalcède, les habitants prient Sâ. Alors qu’à Jamaillia, les Jamalliens lui préfèrent Odava, le dieu-serpent. 

Avec la mise en place d’un tel univers, Robin Hobb donne à ses récits une dimension fantasy. Impression renforcée avec la magie qui imprègne ses romans. Elle prend différentes formes. Déjà dans L’Assassin royal, la magie existe. Il y en a même deux pour être exact. Il y a ce que l’on appelle la magie des Loinvoyant surnommée l’Art. Elle est surtout détenue par les personnes dotées de sang royal dans leurs veines. A la base, c’est un pouvoir qui permet de communiquer par l’esprit, d’artiser dans le langage « hobbien ». Mais chez certains, cette puissance est si développée que l’artiseur dispose de certaines capacités comme la téléportation par l’intermédiaire de colonnes de pierres noires, la prolongation de sa vie, l’influence sur les décisions d’autrui, ou encore la faculté de soigner ou de blesser à distance. Les pouvoirs de l’artiseur deviennent presque illimités. Quant à l’autre magie, c’est le Vif. Celle-ci permet de ressentir toutes les formes de vie aux alentours. Grâce à lui, il est possible de se lier à un animal particulier pour former un lignage. Mais attention, le lien est si fort que lorsque l’un des partenaires disparaît, le survivant en souffre terriblement, à l’image de Fitz lorsque Œil-de-Nuit meurt. Même si le Vif est un pouvoir pacifique en comparaison à l’Art, il n’en demeure pas moins très mal perçu au sein des Six-Duchés. Cette aversion est due aux exactions commises par le prince Loinvoyant Pie qui était doué de Vif. Depuis, la coutume de pendre les Vifiers, puis de découper leurs corps pour les brûler et de disperser leurs cendres dans un cours d’eau a longtemps été pratiqué dans le royaume. L’autre aspect que peut revêtir la magie est l’introduction de créatures merveilleuses. Dans les œuvres de Robin Hobb, il s’agit du dragon. Créature ailée, à laquelle Fitz, en compagnie du jeune souverain Devoir, va redonner vie en sortant l'un d'eux, prisonnier d’une gangue de glace afin de sauver les Six-Duchés des Outrîliens, manipulés par la femme pâle. Les dragons sont également omniprésents dans Les Aventuriers de la mer qui nous révèlent l’origine de ces vivenefs hors du commun, ainsi que dans Les Cités des Anciens où là, ils occupent une place de choix comme personnages à part entière. 

Derrière chaque aventure se dessinent des quêtes que mènent les différents protagonistes. Par exemple dans L’Assassin royal, il sera toujours question pour Fitz de préserver la paix des Six-Duchés en éliminant certains ennemis comme les Pirates rouges, ou en participant aux pourparlers pour consolider des unions avec les pays voisins comme ce fut le cas lorsque le jeune homme a dû représenter Vérité au moment de l’union de ce dernier avec dame Kettricken, du royaume montagnard. Fitz est de toutes les missions et de tous les combats. Il a été formé pour ça. Il est à la fois assassin et proche conseiller du roi. Au moins, jusqu’à ce qu’il se retire définitivement du pouvoir comme c’est le cas au début du dernier cycle. Il est de sang royal et même s’il sera longtemps considéré comme un bâtard, il n’en demeure pas moins un Loinvoyant utile. FitzChevalerie est l’image même de l’anti-héros. Déjà, il est né bâtard. Il a été abandonné par sa mère aux portes de Castelcerf alors qu’il n’avait que six ans et son père, devant la disgrâce de cette naissance, a fui avec sa femme à Flétrybois. Et c’est Burrich, un garçon d’écurie qui se charge de son éducation. Un démarrage dans la vie difficile, d’autant que cela lui vaudra de nombreuses brimades au cours de son enfance, aussi bien par les autres enfants du château que par certains adultes. Ainsi, lorsqu’il montrera des dispositions pour l’Art, il deviendra le souffre-douleur du maître d’Art, Galen. Plus tard, il devra renoncer à tout pour honorer son roi. En effet, Fitz est un héros solitaire largement malmené par la vie, dont il ne se relèvera pas indemne. Bien plus qu’un renoncement, c’est une véritable aliénation de sa personne que Fitz va connaître au fur et à mesure de l’aventure. Car que peut-il y avoir de pire que de renoncer à l’amour de sa vie, de laisser sa propre fille être élevée par un autre ? De perdre tous ses repères, ses amis en se faisant passer pour mort ? 

Bien entendu, Robin Hobb insère ses histoires dans un contexte fantasy remarquable où rien n’est laissé au hasard. Elle a choisi cette littérature comme toile de fond pour la plupart de ses romans. Néanmoins, on remarque qu’il ne s’agit pas seulement pour elle de raconter des histoires de dragons, de magie, de chevaliers partant guerroyer. En développant avec minutie chacun de ses personnages, en travaillant sur leurs dimensions psychologiques, elle va plus loin. Ainsi, pour chacune de ses sagas, elle dresse le portrait de personnages complexes. Ils ne sont pas lisses, ils sont loin d’être parfaits. A l’image de Fitz, ils sont tous en souffrance. Tout comme l’humain peut l’être, chacun de ses héros a deux facettes d’ombre et de lumière. Certains sont franchement mauvais, néfastes que les héros vont justement devoir combattre. Ainsi, on retrouve bien cette lutte entre le bien et le mal qui est une dimension inhérente au genre, d’ailleurs. Mais ses propres héros connaissent une lutte interne sur la voie à suivre. Ils combattent leur propre part d’ombre et sont loin de toujours faire le bon choix. 

Quelque-soit le cycle lu, on l’aura compris Robin Hobb met l’accent sur ses personnages. Alors que certains de ses pairs vont davantage mettre en exergue une magie spectaculaire ou encore des scènes de grandes batailles épiques, elle, va davantage se concentrer sur des questions plus intimistes. Elle va parler de ce qui la fascine le plus chez l’humain, sur ce qui détermine ses actions, sur ce qui le pousse à faire tel ou tel choix et ses conséquences par exemple. C’est surement la raison qui explique l’immense succès de ses sagas et en particulier celle de L’Assassin royal. Finalement, chacun s’y retrouve car on est à un moment ou à un autre confronté à des choix difficiles, à l’image de ceux que doivent faire Fitz. C’est une belle manière de s’interroger sur la vie, de réaliser une introspection personnelle. Enfin, ce qui ne gâche rien à l’ensemble est la fluidité d’écriture de Robin Hobb qui nous rend ses textes si prenants et ses personnages aussi attachants. Le tout plongé dans un univers fantasy dépaysant et passionnant

Fantasy à la carte

A lire sur le blog mes avis sur les nombreux romans de l'autrice déjà chroniqués sur le blog : le cycle Le Fou et L'Assassin : Le Fou et L'Assassin, La Fille de L'Assassin, En Quête de Vengeance, Le Retour de L'Assassin, Sur Les Rives de L'Art, Le Destin de L'Assassin. Les Cités des Anciens : Les Eaux Acides, La Fureur du Fleuve, La Décrue, Les Gardiens des Souvenirs, Les Pillards, Le Vol des Dragons, Le puits d'argent. Sous son nom de plume de Megan Lindholm, Liavek, Le Dieu dans L'Ombre, Le Dernier Magicien, Gypsy ainsi que son cycle Ki & Vandien Le Vol des Harpies, Les Ventchanteuses et La Porte du Limbreth