L'influence du "gaming" à la littérature

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25/11/2023

Floriane Soulas, Les Oubliés de L'Amas, éditions Pocket Imaginaire

Floriane Soulas, Les Oubliés de L'Amas, éditions Pocket Imaginaire 

En octobre dernier, Floriane Soulas a rejoint le label des étoiles montantes de l'Imaginaire avec la sortie chez Pocket Imaginaire de son roman, Les Oubliés de L'Amas. 

Primé aux Utopiales en 2022, sa réédition au format poche me donne l'occasion d'être à jour dans la bibliographie de cette autrice dont j'apprécie beaucoup la plume. En effet, ayant déjà découvert ses autres univers, il me tardait de voir ce que celui-ci me réservait. 

Lu dans le cadre d'un partenariat avec les éditions Pocket Imaginaire, je remercie Emmanuelle Vonthron pour l'envoi de ce service de presse. 

Résumé :

L'Amas est un agglomérat de vaisseaux échoués les uns à côté des autres après leur échec d'atteindre Jupiter. Refuge pour les uns et prison pour les autres, la vie y est rude et hostile. Cela fait un an que Kat a débarqué là, elle est une recycleuse mais a le projet secret de retrouver son frère jumeau disparu. Fasciné par Jupiter depuis tout petit, elle est persuadée qu'il a tenté le voyage. Il lui faudra donc marcher dans ses pas pour espérer le retrouver. C'est ainsi qu'elle cherche à s'embarquer dans les courses spatiales clandestines mais arrivera-t-elle à ses fins ? Est-il seulement encore vivant ? 

Mon avis :

Les Oubliés de L'Amas est un space opera de haut vol qui a l'ambition de nous emmener à la conquête de Jupiter. Sous la plume de Floriane Soulas, l'humanité a colonisé les planètes du système solaire, excepté Jupiter qui fait de la résistance. Le voyage spatial y est maîtrisé. Des satellites servent même de réserves alimentaires. Les trois quarts de l'action se passant sur L'Amas, l'autrice y met en lumière l'adaptation humaine aux conditions de vie difficile, à travers l'enjeu de l'oxygène. Les résidents sont soumis à des confinements dans leurs quartiers respectifs le temps du nettoyage des espaces et du renouvellement de l'air. Une économie de troc s'est installée. Tout y est monnayable, y compris les informations. Le contexte est propice aux cercles clandestins qui ont proliféré à l'ombre des autorités. Or, parmi les activités illicites, il y a donc des courses de vaisseaux spatiaux qui servent d'ailleurs de fil narratif à ce roman. Les descriptions sont hyper immersives. D'autant que l'autrice a bien travaillé sa copie pour nous parler de l'environnement de la gazeuse Jupiter. Elle demeure un objectif pour bien des protagonistes de cette histoire et les recherches scientifiques menées pour réussir à pénétrer sa magnétosphère et passer la barrière des tempêtes joviennes donnent à ce récit une grande crédibilité. 

Comme tout bon space opera, Les Oubliés de L'Amas est bien un roman d'aventure où les actions s'enchaînent vite. L'autrice y a même ajouté une dimension horrifique qui s'exprime par un danger latent que l'on perçoit au fur et à mesure des chapitres. 

C'est un roman dense aux enjeux multiples que l'on apprivoise donc avec le temps. En outre, ce livre est à la fois une histoire familiale et une quête personnelle parce que le personnage principal est à la recherche de son frère qu'elle pense en danger. Or, cette mission qu'elle s'est assignée se révèle être un véritable challenge pour elle car cela va l'obliger à se dépasser et à s'affirmer. 

Les sujets traités entre ces lignes sont nombreux. Il y est aussi bien question d'écologie que d'intelligence artificielle. Floriane Soulas aborde les dérives de l'usage de l'intelligence artificielle, notamment dans ses connexions neurologiques avec le cerveau humain. Elle en pointe les dangers mais évoque aussi les atouts auxquels l'homme a dû renoncer par peur d'être dépassé. 

Avec ce roman, l'autrice table sur un récit rythmé et captivant, porté par un duo de protagonistes féminins fort attachants. Kat et Jaspe sont deux personnalités à l'opposé. Autant Kat est timorée et sur la défensive que Jaspe est solaire et imposante. Toutes deux vont se lier d'amitié au fil du roman et donner à ce texte son caractère touchant. Cependant, Kat ne fait pas mystère de ses motivations, en tout cas du point de vue des lecteurs, il en va bien différemment de Jaspe qui garde par-devers elle bien des secrets et nous ménage ainsi quelques surprises des plus inattendues. Point fort indéniable du récit, on apprécie grandement de les suivre dans leur aventure.

Pour conclure :

Avec Les Oubliés de L'Amas, on goûte à un autre parfum de l'Imaginaire avec une autrice qui s'est lancée le défi d'écrire de la science-fiction. C'est donc un pari réussi ! Si vous aimez le genre, ne passez donc pas à côté de cette plume montante des littératures de l'Imaginaire qui fait indéniablement des étincelles. 

Fantasy à la Carte

A lire sur le blog, mes avis sur Rouille, Les Noces de la Renarde et Tonnerre après les ruines. 

Informations

D'autres avis sont à lire sur la blogosphère : Les pages qui tournent, Les mots étaient livres et SyFantasy

Floriane Soulas
Les Oubliés de L'Amas
9782266333238
832 pages
Editions Pocket Imaginaire

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15/11/2023

Linda, Louise & Mike Carey, La Cité de Soie et d'Acier, éditions L'Atalante

Linda, Louise &  Mike Carey, La Cité de Soie et d'Acier
éditions L'Atalante 

La Cité de Soie et d'Acier est le fruit de trois plumes de l'Imaginaire qui ont décidé de mêler leur talent de conteurs pour nous livrer une histoire des plus envoûtante.

Mike Carey, connu également sous le pseudonyme de MR Carey, est l'auteur de nombreux comics, de thrillers et de romans fantastiques. Linda Carey, elle, est l'autrice de livres fantasy pour enfants et jeunes adultes. Quant à Louise Carey, elle a écrit Inscape, un thriller dystopique et participé à l'écriture de récits de fantasy et d'un roman graphique.

Lu dans le cadre d'un partenariat avec les éditions L'Atalante, je remercie Emma pour l'envoi de ce service de presse. 

Résumé :

Après l'assassinat du sultan Bokhari al-Bokhari, les trois-cent-soixante-cinq concubines de son sérail sont d'abord condamnées à l'exil, puis à la mort. Mais refusant de succomber à ce funeste destin, elles se rebellent en commençant par se débarrasser de leurs geôliers, puis organisent leur survie dans le désert. A force de travail, elles finissent par triompher de l'adversité et l'idée de reconquérir leur cité commence à germer peu à peu en elles. Dès lors, démarre pour elles une nouvelle vie où chacune peut prendre ses propres décisions se libérant ainsi du joug masculin. Une révolution mais pourront-elles réellement agir à leur guise en menant leur audacieux projet à son terme ? 

Mon avis :

Avec La Cité de Soie et d'Acier, Linda, Louise et Mike Carey signent une fantasy féministe qui s'épanouit dans la chaleur brûlante du désert et envoûte à coup de contes. Chaque chapitre correspond à une nouvelle histoire portant soit sur l'une des concubines ou tout autre résident de Bessa, soit sur un épisode décisif pour ladite cité. Ecrite à la manière des contes des Mille et Une Nuits, la destinée de cette cité hors norme est hissée au rang des légendes oubliées que l'on découvre ou redécouvre en lisant cette histoire fragmentée. La Cité de Soie et d'Acier prend donc cadre dans un univers oriental baigné par la présence des Djinns qui comblent de bienfaits certaines protagonistes. Ainsi, Rem la bibliothécaire possède un don de prescience bien utile pour avertir certains dangers et éviter certains écueils. Loin d'être ostentatoire, la magie qui prend corps entre ces lignes est délicate, s'exprimant par touches secrètes et agissant sur les lecteurices comme un élixir ensorcelant. 

Maintenant que le décor est posé, analysons l'intrigue d'un peu plus près. Il s'agit d'une histoire de femmes en but à une domination patriarcale qui refusent d'être sacrifiées sur l'autel d'une idéologie. C'est d'abord bien malgré elles qu'elles se retrouvent à prendre leur destin en mains, en apprenant à se défendre et à travailler pour conserver leur autonomie. De leur expérience va découler l'élaboration d'un modèle de société utopique instaurant une véritable démocratie participative, l'accès à l'éducation pour tous, l'abolition des titres au profit d'une égalité entre les habitants de Bessa. Les femmes exercent ici un soft power privilégiant de saines relations commerciales aux conflits armés par pure rivalité. Elles font de Bessa une cité prospère qui ne manque pas de créer des tensions et de la jalousie, notamment de la part des hommes qui voient d'un mauvais œil de laisser prospérer pareilles idées au cœur de leur sultanat respectif ou pour s'arroger un pouvoir qu'ils croient légitimes. Au fil des histoires, on suit la lutte de ces femmes, on goûte à leur courage et à leur volonté farouche de maintenir l'équité. Incarnant la femme ordinaire plutôt que l'élue prédestinée à accomplir de grandes choses, les héroïnes qui prennent part à cette aventure ressemblent à nos mères, à nos filles, à nos sœurs et à nous-mêmes. Les auteurs nous brossent donc le portrait de protagonistes féminins très réalistes dont on se sent facilement proche. On est sensible à leur belle sororité qui s'incarne dans leur noble projet. Sur cette communauté de femmes règne la bienveillance. Elles sont animées par des valeurs de liberté et de tolérance. Ainsi, on rencontre dans le livre des personnages LGBT et il est parfois question d'amour libre. 

Pour Linda, Louise et Mike Carey, l'écriture de La Cité de Soie et d'Acier a été aussi l'occasion de mettre à l'index les idéologies sectaires conduisant à la destruction du savoir par l'autodafé des livres, à la persécution des pensées dissidentes et à l'invisibilisation des femmes. 

Notre trio d'auteurs s'appuient sur une importante communauté de personnages aussi bien féminins que masculins pour porter cette fabuleuse histoire. Il y a, par exemple, Zuleika, la concubine formée aux arts de l'assassin. Non seulement, elle est celle qui a sauvé ses consœurs d'une mort certaine mais elle prend en main leur formation pour que toutes sachent répliquer lors des attaques. Entêtée, rebelle et frondeuse, elle est un pilier au bon fonctionnement de cette toute jeune société. Rem, la bibliothécaire est, à contrario, un être éthéré. Discrète et réservée, elle va jouer un rôle, autant pour la protection du savoir que dans la défense de la cité chère à son cœur. Gursoon, elle, incarne la sagesse et s'impose presque naturellement comme figure tutélaire même si elle ne cherche pas à endosser ce rôle. Toutes sont attachantes pour des raisons qui leur sont propres, toutes ont une histoire qui mérite d'être porté à la connaissance de tous. Enfin, il y a l'insolent et irrésistible maître-voleur Anwar Das. Un escroc notoire qui se retrouve enrôlé dans l'aventure sans le vouloir mais va exceller dans le rachat de sa conscience.

Linda, Louise et Mike Carey jouent beaucoup avec le support du conte en multipliant les clins d'œil aux célèbres contes des Mille et Une Nuits en changeant notamment de paradigme avec un homme, mécréant de surcroît, qui utilise une histoire imaginaire pour subjuguer son auditoire féminin et ainsi sauver sa tête. Ce roman est clairement un hommage aux livres servant de véhicule au savoir pour qu'il soit gravé dans le marbre et passer ainsi à la postérité. 

Dans La Cité de Soie et d'Acier, les plumes de Linda, Louise et Mike Carey s'accordent parfaitement pour nous délivrer une histoire éblouissante, terrible et merveilleuse à la fois, que l'on quitte avec un petit pincement au cœur tant on s'est attaché à cette communauté cosmopolite.     

Pour conclure :

On referme ce livre avec des étoiles dans les yeux et l'espoir de voir de telles sociétés vertueuses fleurir partout dans le monde. Coup de cœur !

Fantasy à la Carte

Informations

Linda, Louise & Mike Carey
La Cité de Soie et d'Acier
9791036001611
526 pages
Editions L'Atalante

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09/11/2023

Fabien Clavel, Buffy, baroque épopée, éditions Mnémos

Fabien Clavel, Buffy, baroque épopée, éditions Mnémos 

De Fabien Clavel, je ne lui connaissais jusque-là que sa casquette de romancier pour avoir lu les excellents, Feuillets de Cuivre et La Niréide, mais aujourd'hui, je vais plutôt m'intéresser à celle d'essayiste à travers son essai sur Buffy, sorti depuis peu en librairie.

Culte pour certains ou série B pour d'autres, Buffy n'a pas laissé indifférent et quoi que l'on en dise, elle demeure un phénomène pop culture. 

Pour ma part, me replonger dans l'univers de Buffy a été un moment de nostalgie de redécouvrir une série qui a marqué ma jeunesse et sans doute même suscité, inconsciemment, mon goût pour l'Imaginaire.

Lu dans le cadre d'un partenariat avec les éditions Mnémos, je remercie Estelle Hamelin pour l'envoi de ce service de presse. 

Résumé :

Avant de rentrer dans le vif du sujet, je vous propose un petit rappel du synopsis de Buffy contre les vampires si d'aventure vous ne connaissiez pas. Bien qu'elle aspire à une vie tranquille de lycéenne, Buffy Summers est une Elue chargée de tuer vampires et démons à chaque tombée de la nuit afin de nettoyer les rues de Sunnydale. Elle est guidée par le bibliothécaire Giles qui lui sert d'Observateur et d'entraîneur, et est accompagnée de ses deux amis Willow et Xander. L'ensemble forme un bouclier contre les forces du Mal qui sont à l'œuvre au sein de cette petite communauté construite sur une bouche de l'Enfer. 

Mon avis :

Dans son ouvrage Buffy, baroque épopée, Fabien Claver s'est surtout intéressé à l'esthétique très particulière de cette série pour comprendre en quoi elle est à la fois, selon lui, épique et baroque. 

Il a organisé son analyse selon trois angles d'attaque. Il commence par mettre en exergue l'épopée moderne que fut cette série, à travers son lien nourricier avec la mythologie antique. Ainsi, la construction du personnage de Buffy répond bien au mythe du héros ou dans le cas présent de l'héroïne qui est toujours décrit comme étant solaire, à l'image d'Achille dans L'Iliade. Clairement, Buffy Summers l'est également par sa blondeur, par ses goûts vestimentaires très colorés, ainsi que par sa vivacité. De même, en tant qu'Elue, elle est bien une héroïne puissante, disposant de capacités hors norme lui permettant d'accomplir sa mission. Proche de la vision du super-héros à travers sa force, sa vitesse, sa maîtrise des arts martiaux ou encore sa capacité de régénération rapide, Buffy correspond bien au modèle héroïque tel qu'il nous est décrit dans les mythes. D'autant qu'elle occupe également le rang suprême de cheffe en s'opposant à l'autorité et en commandant les autres Tueuses. Enfin, elle n'œuvre pas seule dans sa quête puisqu'elle est entourée de compagnons faisant directement référence au thème du "double" cher à certains mythes comme celui d'Achille qui est accompagné de Patrocle. A la lumière de tous ces éléments, on ne peut donc que s'incliner sur le caractère épique de Buffy contre les vampires

Mais, quid du genre auquel elle appartient. Difficile de s'entendre sur le sujet entre les uns qui la classent en fantasy urbaine, les autres en horreur et certains, même, en science-fiction. Pour Fabien Clavel, la question mérite d'être posée puisqu'elle occupe même la deuxième partie de son essai. Ainsi, pour la caractériser, il commence par s'appuyer sur la définition de la fantasy d'André-François Ruaud : "Relève de la fantasy une littérature dotée d'une dimension mythique et qui incorpore dans son récit un élément de surnaturel ou d'irrationnel au traitement non purement horrifique notamment incarné par l'irruption ou l'utilisation de la magie". Buffy est donc bien de la fantasy disposant à la fois d'un héritage mythique et usant de magie, à travers les sorts lancés par Willow & co, sans oublier l'abondance de créatures surnaturelles qui défilent à chaque épisode. En outre, l'horreur y est également très présente. Elle s'exprime déjà par les nombreux monstres, tous plus difformes et repoussants les uns que les autres que doit affronter l'héroïne. Il est même question d'épouvante lorsqu'est introduit de manière suggestive le retour de l'un des protagonistes décédés sous la forme de zombie. Le frisson est donc garanti lors de ces moments critiques de l'action. Enfin, les nombreuses références à des robots classent, de facto, cette série en science-fiction, tout comme l'agence gouvernementale qui transforme les démons en rats de laboratoire et travaille sur des puces à implanter pour les contrôler. 

Fantasy, horreur ou science-fiction, Buffy contre les vampires est tout cela à la fois et bien d'autres choses encore que l'auteur prend le temps d'expliquer entre ses lignes. En mélangeant les ambiances, le producteur Joss Whedon a sans doute trouvé là la clé du succès. 

Mais pourquoi Fabien Clavel insiste tant pour qualifier Buffy contre les vampires de baroque ? Peut-être parce qu'elle correspond à quatre critères propres à l'art baroque : l'instabilité, la mobilité, la métamorphose et la domination du décor. L'univers de Buffy contre les vampires est clairement instable car Sunnydale construite sur une bouche de l'Enfer est régulièrement parcouru de secousses sismiques. Des lieux y sont, d'ailleurs, souvent détruits comme le lycée qui sera entièrement détruit à la fin de la saison 3, pour être reconstruit et à nouveau détruit par la suite. Cette mobilité réside aussi beaucoup dans les dispositifs privilégiés par Joss Whedon, notamment concernant le choix des décors qui rappelle le théâtre shakespearien privilégiant toujours une scène principale dominée par une galerie surélevée. Aussi, dans les décors de la série, il y a beaucoup d'escaliers favorisant le déplacement des acteurs tout en multipliant les points de vue. 

En outre, en passant des visages humains à des figures démoniaques autant pour les vampires que pour les héros de l'histoire, la métamorphose demeure bien le fil conducteur de cette série. Comme le dit Fabien Clavel lui-même "la série explore bien toutes les possibilités du masque afin de créer une confusion sans fin". Rien n'est donc figé et tout se transforme. 

Enfin, le baroque cherche à séduire aussi bien par le visuel que par le langage. Pourtant, la domination du décor ne passe pas ici par son abondance car celui-ci a été réalisé à peu de frais. Mais, Joss Whedon compte sur les illusions pour impressionner son public. Ainsi, les personnages de sa série rêvent beaucoup les uns des autres au point de générer de la confusion chez les spectateurices qui s'interrogent sur ce qui est réel ou relève du fantasme. Mais, le phénomène le plus marquant demeure l'omniprésence du langage qui nous noie littéralement sous les dialogues pour mieux subjuguer ou au contraire, accabler. 

En somme, on ne peut qu'acquiescer à la fine analyse de Fabien Clavel qui nous démontre que la série répond bien à ces quatre critères. 

Pour conclure :

En signant cet essai très détaillé sur Buffy contre les vampires, Fabien Clavel nous invite à poser un autre regard sur un élément de la pop culture qui est loin de se résumer à un simple divertissement. 

Clairement, Buffy, baroque épopée se présente comme une invitation à un énième revisionnage de ce teen drama riche de plus d'un sens.

Fantasy à la Carte

A lire sur le blog, mes avis sur Feuillets de Cuivre et La Niréide

Informations

D'autres avis sont à lire sur la blogosphère : Books, Tea time & Sweet apple pie et Vampirisme.com

Fabien Clavel
Buffy, baroque épopée
9782382670873
240 pages
Editions Mnémos

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05/11/2023

Vincent Mondiot, Les Rues de Mirinèce, T.3, Les Mondes-Miroirs

Vincent Mondiot, Les Rues de Mirinèce, T.3, Les Mondes-Miroirs 

Après une réédition sous la forme de deux tomes, aux éditions Mnémos intitulés Les Mondes-Miroirs et L'Ombre des Arches, Vincent Mondiot a repris la main sur son projet littéraire. Une aventure enthousiasmante autant pour l'auteur que pour nous, les lecteurices, qui nous sommes passionnés dès le premier texte. 

Lu dans le cadre d'un partenariat, je remercie Vincent Mondiot qui a choisi de me faire confiance pour vous parler de ce troisième volet. 

Résumé :

Après avoir participé à l'arrestation de terroristes coordonnés par l'ancien héros de guerre Teliam Vore, puis avoir empêché un coup d'Etat dans la province d'Auterre, Elsy et Elodianne sont de retour à Mirinèce. Mais loin de retrouver leur routine, elles sont placées sous l'étroite surveillance du Palais central. Pour Elodianne, cela signifie de voir son évolution mise sur pause en attendant de convaincre ses supérieurs. Pour Elsy, c'est se conformer à un contrôle administratif hebdomadaire en promettant de se tenir à carreau. Sauf qu'avec un contrat placé sur sa tête, ne pas faire de vague risque d'être difficile pour la mercenaire. Alors qu'Elodianne va employer son temps à chercher à prouver qu'elle est une grande magicienne, Elsy, elle, va tâcher de trouver le moyen de survivre. Mais arriveront-elles réellement à leur fin ? 

Mon avis :

Loin de l'action explosive des deux premiers tomes, Les Rues de Mirinèce est un roman plus intimiste, centré sur les deux personnages principaux en s'intéressant notamment à leur trajectoire respectif. Pour ce faire, Vincent Mondiot entame chaque début de chapitre en explorant un moment crucial de leur passé afin de mieux comprendre leur choix de vie et par la même occasion, leur personnalité. La balade est agréable, largement agrémentée d'émotions fortes. Pour peu que l'on ait un crush pour ces deux héroïnes ou pour assouvir une certaine curiosité, on apprécie de les découvrir en profondeur puisque l'auteur s'est attelé dans ce tome-ci à leur donner une vraie épaisseur. En outre, en tablant sur deux temps de narration, cela a le double intérêt de nous dépeindre un portrait très complet d'Elsy et d'Elodianne et d'en apprendre plus sur certains des protagonistes secondaires croisant leur route. Or, si dans les romans précédents, les deux jeunes filles se retrouvent un peu fortuitement propulsées dans ces aventures politiques, dans ce présent livre, leur implication va prendre une toute autre dimension liant même leurs destins à celui de Mirinar. 

Elodianne et Elsy s'aiment autant qu'elles s'agacent. Il faut dire que Vincent Mondiot ne pouvaient pas choisir des caractères plus opposés que les leurs. Autant Elodianne est studieuse et réservée qu'Elsy est impertinente et volubile. Bien qu'elles aient grandi ensemble, elles vont pourtant suivre des chemins différents. 

En effet, en se découvrant une sensibilité à la magie, la vie d'Elodianne a profondément changé puisqu'elle a eu accès à une éducation lui permettant d'être formée à la maîtrise de ses pouvoirs. C'est par un travail acharné qu'elle va se hisser à une position sociale plus élevée. Pour autant, elle n'oublie pas d'où elle vient et voue à sa famille adoptive un amour sincère et une reconnaissance éternelle. Sa pugnacité et son statut d'orpheline nous touchent. Au vu du parcours semé d'embûches qu'elle a dû emprunter, on comprend, d'autant mieux, qu'elle tient à son statut, obtenu de haute lutte. On apprécie sa réserve, son abnégation et son courage. 

Quant à Elsy, son itinéraire est clairement plus chaotique. Elle ne dispose pas des compétences ésotériques de sa sœur adoptive mais désire ardemment devenir une héroïne. Pour y arriver, elle va prendre des chemins de traverse, fréquenter des gens peu recommandables, embrasser la carrière de mercenaire et finir tout de même par attirer l'attention. Qu'on l'admire ou la déteste, nul ne reste totalement indifférent à Elsy. Cette gamine n'a pas froid aux yeux et a de la suite dans les idées. Bagarreuse et bravache, elle rend toujours les coups qu'on lui donne et cherche, à tous prix, à se sortir du ruisseau par elle-même. Sa violence est la réponse à l'injustice subie, le rejet parental et les sévices reçus. Derrière son insolence et sa désinvolture, il faut aussi y lire des blessures psychiques non cicatrisées qu'elle tente de dissimuler. Son destin est réellement touchant et force juste le respect. 

Toutes les deux sont indéniablement le point fort de ce récit et cela, Vincent Mondiot l'a bien compris puisqu'il nous donne ici davantage de matière pour les apprécier encore plus. 

Avec Les Rues de Mirinèce, l'auteur poursuit l'écriture d'une série passionnante qui mêle amour, amitié et aventure à des complots politiques bien menés. 

Il est à noter la richesse de ce texte du point de vue de la diversité des thématiques abordées comme les ravages psychologiques de la violence intra-familiale ou encore la mort à travers la perte d'un proche. 

Au fur et à mesure de la lecture, on est parcouru par un tout un panel de sentiments qui nous happent complètement au point de trembler pour ces deux héroïnes aux destinées si malmenées. 

Mais Les Rues de Mirinèce n'est pas qu'une simple parenthèse ouverte pour tout connaître d'Elsy et d'Elodianne car en les suivant dans leur présent, l'auteur nous trace un chemin vers les sources nourricières de son monde et ainsi tutoyer de très près ses origines mythologiques. Ainsi, sans en avoir l'air, Vincent Mondiot nous donne certaines clés de compréhension de son univers et prépare même le terrain d'une suite que l'on pressent déjà fort apocalyptique. 

Illustration signée Matthieu Leveder

La publication des Rues de Mirinèce est le fruit d'un pari audacieux, celui de plusieurs passionnés qui ont refusé de voir leur création disparaître sans avoir atteint son terme. Il en ressort un très bel objet livre qui respecte l'identité visuelle des deux premiers tomes et insère pas moins de 5 superbes illustrations signées par le très talentueux Matthieu Leveder, ainsi que la couverture qui a clairement ma préférence par rapport aux deux autres. 

Une nouvelle fois enchantée par ma lecture, je ne peux que vous recommander de lire cette saga à votre tour car elle n'a pas fini de faire des étincelles, j'en suis certaine ! Disponible à la vente le 6 novembre 2023. 

Fantasy à la Carte

A lire sur le blog, mes avis sur Les Mondes-Miroirs et L'Ombre des Arches

Informations

Vincent Mondiot
Les Rues de Mirinèce
T.3
Les Mondes-Miroirs
541 pages

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29/10/2023

Olivier Bérenval, Des Nuées, éditions 1115

Olivier Bérenval, Des Nuées, éditions 1115

Grand amateur de science-fiction, Olivier Bérenval écrit son premier roman en 2015, Ianos publié aux éditions Mnémos. C'est de la hard science-fiction. Ensuite, il enchaîne en 2017 avec un space opera intitulé Nemrod, puis toujours chez le même éditeur, il publie en 2020 Le Janissaire, un planet opera mêlé à une ambiance polar, tiré du même univers de son précédent roman. 

Septembre 2023 a marqué son retour en librairie avec Des Nuées, un thriller fantastique édité cette fois-ci chez les éditions 1115. 

Lu dans le cadre d'un partenariat avec les éditions 1115, je les remercie pour l'envoi de ce service de presse. 

Résumé :

Lieutenant de police chevronné, Leon Visagie pensait tout connaître du sordide et du violent. Pourtant, lorsqu'il est appelé sur les lieux d'un nouveau crime, il ne s'attendait clairement pas à retrouver la victime exsangue, totalement vidée de son sang, réalisé presque de manière chirurgicale. Alors qu'avec ses collègues, ils piétinent littéralement, un autre meurtre est commis avec le même modus operandi à des kilomètres de là. Est-ce réellement le fruit du hasard ou s'agit-il de l'œuvre d'un tueur en série ?

Mon avis :

Des Nuées est un roman contemporain teinté de fantastique qui nous emmène sur les traces d'un assassin laissant ses victimes vidées de leur sang. Un mode opératoire qui n'est pas sans rappeler celui du vampire. Mais l'esprit bien trop cartésien des inspecteurs en charge de l'enquête refuse de céder aux sirènes de l'onirisme en dépit des croyances locales encore très ancrées. 

Pourtant, Olivier Bérenval, lui, a beaucoup joué sur celles-ci et en particulier sur cette vision de la persistance du souffle vitale de l'ancêtre qui ne cesse de se réincarner et/ou de l'appropriation de la force vitale de l'autre par la possessions des corps pour augmenter la sienne et ainsi survivre. Deux éléments très présents dans la religion animiste. 

Son récit s'inscrit donc dans un cadre ésotérique solide auquel il a ajouté une dimension scientifique à travers la casquette de paléoanthropologue de l'un de ses protagonistes. Entre ses lignes, on remonte aux origines des humanités. L'auteur explore avec beaucoup d'ingéniosité ce lointain passé qu'il fait rejaillir sur le présent de manière inattendue en s'appuyant notamment sur la génétique et la biologie cellulaire pour rendre le phénomène crédible.

De cette lecture, on en ressort aussi dérouté que captivé car l'imaginaire de l'auteur y est clairement des plus fertile. Ainsi, quand on lit Des Nuées, bien des émotions nous traversent : de la curiosité, d'abord, pour les explications scientifiques données par l'auteur et que l'on va confronter à nos propres théories, puis, une certaine fascination pour les mythes africains que l'on connait souvent mal et enfin de l'effroi car l'atmosphère du récit est de plus en plus lourde et inquiétante. 

Plus qu'un thriller fantastique, Des Nuées nous offre aussi une photographie sociologique de cette Afrique du Sud marquée par la violence et la pauvreté. Le récit est âpre et sans concession pour mettre en lumière le fléau des gangs et la misère sociale. Il nous transmet la peur et le désespoir d'une population broyée par un système en faillite face à une criminalité hors de contrôle. 

Enfin Des Nuées est porté par un kaléidoscope de personnages qui nous entraînent aux quatre coins du monde et sur une amplitude temporelle longue. Parmi eux, il y a le lieutenant Leon Visagie. C'est un vieux flic qui a pas mal roulé sa bosse. Il est rustre préférant sa solitude aux mondanités. Or, cette enquête va profondément l'ébranler autant sur le plan psychique que sur celui de sa rationalité. Il en ressortira changé l'incitant peut-être à décrocher. Ensuite, il y a l'énigmatique docteur Mndeni Dlamini qui exerce dans le service d'oncologie de l'hôpital universitaire de Pretoria. Il possède le don de sonder les esprits qui l'entourent et peut ainsi lire les pensées des gens et connaître leurs souvenirs. Un pouvoir précieux qui en fait un être à part, mais dont on est loin d'imaginer jusqu'à quel point. Il faut dire qu'il garde jalousement ses secrets par-devers lui et les découvrir suscitera bien des rebondissements à l'intrigue. Enfin, il y a Elsabe van der Merwe qui est paléoanthropologue et étudie donc l'évolution de la lignée humaine. Vive et curieuse, elle se retrouve embarquée, bien malgré elle, dans cette histoire qui la fascine au plus haut point. Mais jouer avec de telle force pourrait lui brûler les ailes, qui sait ? 

Pour conclure :

Des Nuées est un roman qui captive par son originalité. On prend plaisir à cavaler dans ce dédale d'un passé lointain qui est, d'ailleurs, encore loin d'avoir révélé tous ses secrets.

Fantasy à la Carte

D'autres avis sont à lire sur la blogosphère : Zoé prend la plume, Vampirisme et Fantastinet.

Informations

Olivier Bérenval
Des Nuées
9791097100964
315 pages
Editions 1115

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25/10/2023

Pascale Quiviger, Les filles de mai, T.2, Le Royaume de Pierre d'Angle, éditions Folio Fantasy

Pascale Quiviger, Les filles de mai, T.2, 
Le Royaume de Pierre d'Angle
éditions Folio

Récompensée par de nombreux prix : Elbakin.net, de la librairie Millepages, de la ville de Vannes et du Festival du livre de Gien, la saga, Le Royaume de Pierre d'Angle de Pascale Quiviger n'est clairement pas passée inaperçue. 

A l'heure où l'autrice nous propose une nouvelle incursion dans son univers en explorant un nouveau pan avec La Dernière Saison de Selim (éditions Rouergue), les éditions Folio poursuivent leur réédition en poche de l'illustre Royaume de Pierre d'Angle avec la publication en septembre dernier du tome 2, Les filles de mai

Lu dans le cadre d'un partenariat, je remercie les éditions Folio pour l'envoi de ce service de presse. 

Libéré de la Catastrophe, Thibault en est revenu confus et désorienté. Alors que son esprit bat sérieusement la campagne, le royaume a plus que jamais besoin d'un roi fort et solide. Surtout que le malveillant Jacquard guette la moindre faiblesse pour reprendre le pouvoir. Pire encore l'hiver promet d'être rigoureux menaçant même de famine les sujets de Pierre d'Angle. Alors est-ce que Thibault reprendra ses esprits suffisamment vite pour éviter la ruine ? 

Point d'aventure maritime dans ce deuxième volet puisque le prince héritier est de retour au bercail pour arracher les rennes du pouvoir des griffes acérées de son demi-frère. Les filles de mai est un récit riche d'intrigues de cour nourries par les mesquineries et les traîtrises d'un triste sire. Aussi, au fil des pages les désastres s'enchaînent et sont de plus en plus difficilement gérables pour notre jeune monarque qui se retrouve bien vite dépassé. Il faut dire que les éléments semblent s'être donnés le mot pour se déchaîner sur l'île car comme si l'hiver rigoureux accompagné d'une disette ne suffisaient pas, il a fallu qu'une épidémie s'invite au programme, suivie d'une sécheresse sans précédent. Rien ne va donc plus à Pierre d'Angle au point que Thibault ne sait plus à quel saint se vouer pour maintenir le cap de ce monde en perdition. En outre, pour en apprendre plus sur les intentions de Jacquard, une enquête s'impose que Thibault a délégué à l'un de ses fidèles. Ce qui aura le don de brusquer l'intrigue en lui faisant prendre un tour aussi éclairant que violent. Les secrets de famille ne manquent pas dans ce tome 2, certains seront révélés et d'autres non. L'étau se resserre autour de Thibault et de sa descendance. L'ombre d'un danger plane tout du long et seule Ema en a conscience. La malédiction de l'île s'apprête à réclamer son tribut et le prix s'annonce déjà trop élevé. En dépit de la menace qui sert de fil narratif au roman, il y a une certaine légèreté de ton qui allège un peu l'ambiance lourde. Celui-ci tient à cette communauté de personnages haute en couleur que Pascale Quiviger a mis en scène ici. Le style est vif et rythmé. Il interpelle le lecteur qui se laisse facilement prendre au jeu de cette histoire mystérieuse et surprenante. 

Dans Les filles de mai, l'autrice laisse les catastrophes naturelles se succéder pour mettre l'accent sur la vulnérabilité des hommes à y faire face et à s'en sortir. Lanceuse d'alerte à sa manière, elle a conféré à son texte une portée écologique.

Il est également question de sectarisme à travers la méfiance et le rejet que subit la reine Ema. Le fait qu'elle soit étrangère à l'île et noire de peau éveillent la superstition de ses concitoyens qui la taxent d'être à l'origine de leurs malheurs. Un raccourci facile mais typique des petites communautés qui cherchent toujours un bouc émissaire. Cela nous la rend encore plus touchante et s'ajoute à son statut d'ancienne esclave. Ema est un protagoniste qui n'arrête pas d'être malmenée par la vie. Dans Les filles de mai, Pascale Quiviger a resserré son intrigue autour d'un motif qui trouve son origine dans une réalité historique en vigueur dans de précédentes civilisations. Il est vrai que le sacrifice d'enfants en échange de faveurs divines était courant, notamment à l'Antiquité. L'autrice s'en est clairement inspirée pour donner corps à la malédiction de la Catastrophe. Or, l'ombre de cette menace laisse peu à peu s'installer une atmosphère oppressante. Ambiance frissonnante pour ce tome 2 qui garde par-devers lui tous ses secrets.

Enfin, Pascale Quiviger nous parle de maladie et plus particulièrement de troubles neurologiques à travers le brouillard cérébral dont souffre Thibault depuis sa sortie de la Catastrophe déposant une chappe sur ses souvenirs. On a donc un personnage principal en but à de graves difficultés qui ébrèche l'image du héros tout puissant mais établit une proximité touchante avec les lecteurs.

Avec Les filles de mai, Pascale Quiviger continue de tenir ses promesses d'écrire un récit de haut vol captivant et sans temps mort. Les réponses sont à portée de mains et pourtant nous échappent encore. Alors, patience jusqu'au prochain épisode. 

Fantasy à la Carte

A lire sur le blog, mon avis sur L'Art du Naufrage

Informations

Pascale Quiviger
Les filles de mai
T.2
Le Royaume de Pierre d'Angle
9782072999178
472 pages
Editions Folio  

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21/10/2023

Wesley Chu, Time Salvager, éditions Pocket Imaginaire

Wesley Chu, Time Salvager, éditions Pocket Imaginaire 

Wesley Chu est un touche-à-tout. Il a expérimenté bien des professions, de financier à cascadeur, avant de prendre la plume. Il est déjà l'auteur de plusieurs séries comme The Mortal Instrument, co-écrit avec Cassandra Clare, L'Art de la Guerre, Io ou encore Time Salvager. Ainsi, il écrit aussi bien pour la jeunesse que pour un public adulte et s'intéresse autant à la fantasy qu'à la science-fiction.

En septembre dernier, son très remarqué Time Salvager qui a, au passage, tapé dans l'œil du producteur Michael bay, est ressorti en poche. 

Lu dans le cadre d'un partenariat avec les éditions Pocket, je remercie Emmanuelle Vonthron pour l'envoi de ce service de presse. 

Résumé :

Après des décennies de crises qui n'ont eu de cesse de dépeupler la planète, l'humanité s'est dispersée aux quatre coins du système solaire. Dans ce monde décadent, la survie ne tient qu'aux chronmen, ces voyageurs du temps qui effectuent des bonds dans le passé pour ramener les sources d'énergie manquantes. James est l'un d'eux et est usé par ses trop nombreux voyages. Mais avant de raccrocher, il est chargé d'une dernière mission sensible. Il est donc envoyé récupérer une technologie sur la plateforme Nutris juste avant son explosion qui condamnera la Terre. Mais au lieu de se dérouler normalement, les événements vont lui échapper au point de le pousser à violer la première Loi Temporelle. Mais quelles en seront les conséquences ? 

Mon avis :

Time Salvager est un roman de science-fiction qui mêle le postapocalyptique à la dystopie en passant par le thriller. On plonge dans un futur décadent dans lequel la Terre a été dévastée suite aux Guerres Technologiques obligeant les humains survivants à coloniser les autres planètes du système solaire. Mais, ces conquêtes spatiales n'ont pas été exempts de conflits puisque des rivalités éclatèrent entre Venus, Terre et Mars les poussant à drainer les ressources énergétiques des planètes satellites : Eris, Pluton et Mercure. Seulement la plus meurtrière des guerres fut celle des Gazeuses, opposant Jupiter, Neptune, Uranus et Saturne, et tuant pas moins d'un milliard de personnes en seulement quarante ans. De ce désastre écologique et humain, il en ressort un monde en souffrance qui a dû s'adapter en développant la technique du voyage spatio-temporel afin de ramener du passé les ressources absentes. Celui-ci est régulé par un organisme appelé Chronocentre qui forme des chronmen, encadrés par des contrôleurs, chargés de réglementer chacune de leurs missions pour éviter toute perturbation du flux temporel. Ils répondent donc à des règles précises appelées Lois Temporelles qui apparaissent comme des garde-fous pour empêcher toute dérive. En outre, ces chronmen disposent d'une panoplie de bracelets leur donnant des capacités d'hommes augmentés avec l'accès à des barrières de protection, à des armes de précision ou encore à un dispositif de propulsion. Le tout donne un visuel très spectaculaire propice à une adaptation cinématographique. 

En nous attachant à l'un de ces chronmen, Wesley Chu nous fait donc évoluer au sein de cette structure stratégique qui suscite bien des convoitises et constitue un véritable enjeu pour ce monde en perdition. A l'ombre de cette organisation s'agitent des forces en présence qui se crispent à la moindre transgression de l'un de ses éléments. Or, Time Salvager nous entraîne dans une chasse à l'homme suite à la trahison de l'un d'eux et nous dévoile un univers sombre, pavé de mensonges et de dissimulations. 

C'est un roman d'action qui emprunte au thriller un rythme effréné et un suspense latent. 

Mais Time Salvager est aussi un récit engagé qui porte un propos écologique fort en mettant à la fois en garde l'humanité sur ses agissements destructeurs pour la planète et sur les opportunistes qui agissent dans leur propre intérêt, souvent pour une question de profit et au détriment de la communauté. 

L'histoire est râpeuse et passionnante. Bien que le récit soit dense et totalise 592 pages, on ne voit pas le temps passer. Sans doute que la fluidité de cette plume n'est pas étrangère à ce phénomène, tout comme le choix de Wesley Chu d'alterner les points de vue pour dynamiser son texte. Aussi, on suit un chapitre sur deux James Griffin-Mars, un chronman alcoolique et un tantinet désabusé qui est de plus en plus hanté par ses bonds dans le passé. Son propre passé le rattrape, le décès prématuré de sa mère et la disparition de sa sœur notamment. Il sombre peu à peu dans la folie, torturé par les visions des personnes rencontrées dans de précédentes missions. Rongé par la culpabilité, celle-ci va le pousser à braver l'interdit. C'est un personnage ambivalent, plutôt gris, qui se retrouve bien malgré lui entraîné dans un contre la montre riche en révélations. C'est un être renfermé sur lui-même qui ne faisait confiance qu'à son ami et référent Smitt mais qui va s'attendrir au contact d'Elise Kim. Cette dernière est joviale et solaire. Elle débarque inopinément dans la vie de James et vient le bousculer dans sa routine et le bouleverser dans ses émotions. Arrachée brutalement à son environnement, elle s'adapte pourtant plutôt bien à la situation. Elle n'incarne pas la femme fatale mais sait mener son monde à la baguette lorsque cela est nécessaire. Avec James, ils forment un bon duo pour affronter ensemble l'adversité imposée par leur cavale. Enfin, l'autre protagoniste central au récit est Levin Javier-Obéron, un gradé intransigeant et obtus. C'est un homme inflexible plein de principes qui se donne corps et âme à sa mission. Il a une foi aveugle dans son institution et fait de la traque de James une affaire personnelle. Néanmoins, il va mettre à jour des informations qui vont le perturber profondément au point de semer le doute dans son esprit. Pour autant, il ne renoncera pas à ce qu'il croit juste. Les deux hommes sont des personnalités fortes alors leur rencontre promet déjà des étincelles. 

Pour conclure :

Time Salvager fut une belle surprise qui m'a offert un voyage haletant prometteur de nouveaux horizons étonnants à explorer lors d'un prochain embarquement.

Fantasy à la Carte

A lire sur la blogosphère, les avis de : Le nocher des livres, De livres en livres ou Les Blablas de Tachan.

Informations

Wesley Chu
Time Salvager
9782266337274
592 pages
Editions Pocket Imaginaire

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16/10/2023

Sacha Bazet, La Citerne, Naos, éditions Mnémos

Sacha Bazet, La Citerne, Naos, éditions Mnémos 

Derrière le pseudonyme Sacha Bazet se cachent deux amis qui partagent la même passion pour les livres et l'écriture. Après Ce qui nous hante - un roman qu'il me faudra lire - ils viennent de récidiver en publiant un nouveau livre partageant le même univers mais qui peut très bien se lire de manière indépendante. 

Lu dans le cadre d'un partenariat avec les éditions Mnémos, je remercie Estelle Hamelin pour l'envoi de ce service de presse. 

Résumé :

Au divorce de ses parents, Sarah a dû suivre son père et par conséquent, quitter sa mère, ses amis et sa cité qu'elle aime tant. Elle est de retour après une longue absence et se fait une joie de retrouver son petit monde. Pourtant sa mère lui fait très vite comprendre qu'elle ne peut pas s'éterniser, d'autant que l'ombre d'un confinement plane. Alors que son petit ami Victor décide de s'exfiltrer à Paris, elle choisit de rester. Seulement, les événements vont vite dérailler, à commencer par sa relation avec Vanja qui se met à battre de l'aile. Si l'une demeure extatique devant la Citerne, l'autre ne rêve que de s'en échapper. Face à ce mur d'incompréhension, une réconciliation sera-t-elle possible ? 

Mon avis :

La Citerne est un roman contemporain ponctué de notes fantastiques. Il prend cadre dans une cité HLM abritant une communauté solidaire et bienveillante. Une apparente normalité qui dissimule en réalité bien des secrets car les lieux n'ont rien de banal. En effet, personne ne semble vouloir en partir, pas même les morts dont leurs fantômes reviennent posséder les vivants d'un commun accord avec eux. Un petit arrangement dont il ne faut pas ébruiter l'existence. Alors lorsque débarquent des gens de l'extérieur, on n'a aucun mal à imaginer le branle-bas de combat que cela suscite pour maintenir l'illusion d'une vie ordinaire. 

La Citerne témoigne d'un imaginaire fécond peuplé de revenants amicaux, de spectre vengeur et d'esprit captif qui nous entrainent dans une sarabande infernale, troublante de révélations pour les habitants de cette cité insolite. 

Déjà son histoire est atypique. Elle a été construite sur les ruines d'un pénitencier et un trou béant s'est formé dans les soubassements, menaçant l'édifice d'effondrement. Elle est donc en soi une curiosité. Mais alors que tous devraient fuir les lieux, il n'en est rien car les gens s'y sentent protégés, à l'abri. Et pour cause, la Citerne est douée d'une âme propre et s'avère être une éponge émotionnelle pour ses résidants en absorbant leurs affects. Ainsi, la Citerne n'est donc pas qu'un simple cadre d'action mais elle est aussi et surtout un personnage central de l'histoire. Les mystères autour de ses origines et de son fonctionnement en font un objet de fascination pour le lecteur qui souhaite en comprendre tous les mécanismes. Sa présence sert de fil narratif auquel va s'agglomérer le destin des deux principales narratrices et de leurs proches. 

Dans ce roman Young Adult, les auteurs nous attachent aux pas de deux jeunes filles qui sont happées par des préoccupations personnelles propres à leur âge. On est donc sur une thématique classique d'un récit d'apprentissage avec deux adolescentes qui s'interrogent sur ce qu'elles veulent faire de leur vie respective. 

Le style est très rafraîchissant et le récit se retrouve vite pimenté par des complications ésotériques inattendues qui oscille entre énigmes à résoudre et danger. La lecture est juste agréable. 

Sacha Bazet nous parle beaucoup d'amitié, de solidarité et d'entraide. Il est aussi question de secrets familiaux, de refoulement psychique et même de maltraitance infantile. Il en ressort un texte empreint d'une certaine émotion rendant les protagonistes authentiques et touchants. 

Au fil des pages de ce livre, on fait la connaissance de Sarah et Vanja, deux amies qui se retrouvent à l'occasion des vacances. Par son exil forcé, Sarah a fait de la Citerne et de ses habitants, un refuge très enjolivé en occultant les souvenirs négatifs. Cette cité devient même une obsession au point de taper sur les nerfs des autres, y compris sur ceux de sa meilleure amie. Mais son retour va être aussi l'occasion d'une introspection personnelle, doublée d'une exploration des souvenirs enfouis. Son séjour prolongé auprès de sa mère à cause du confinement va lui permettre de crever l'abcès avec cette dernière afin de mettre enfin des mots sur le rejet maternelle qu'elle subit depuis ses 6 ans. Une confrontation nécessaire pour aller de l'avant et lever le voile sur les non-dits qui ont entaché son enfance. Quant à Vanja, elle fait face à l'égocentrisme d'une Sarah tellement autocentrée sur elle-même qu'elle ne s'intéresse pas réellement à cette dernière. Elle finit par laisser sa colère exploser entraînant une rupture entre elle deux. Elle est pour sa part en plein questionnement quant à son avenir. Elle se cherche, rêve d'évasion et d'indépendance mais ne sait pas comment s'y prendre et surtout comment se débarrasser de ce sentiment de culpabilité qui l'empoisonne. La tournure des événements va les recentrer sur un but commun et leur permettre de s'affranchir de leurs griefs respectifs. 

Pour conclure :

Avec La Citerne, on plonge dans des instantanés de vie émouvants par le biais de protagonistes hauts en couleur. Sacha Bazet y dessine un univers mystérieux et fascinant dont on a envie de poursuivre l'exploration. Rendez-vous au prochain épisode !

Fantasy à la Carte

Informations

Sacha Bazet
La Citerne
Collection Naos
9782382670927
304 pages
Editions Mnémos

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10/10/2023

Floriane Soulas, Tonnerre après les ruines, éditions Argyll

Floriane Soulas, Tonnerre après les ruines, éditions Argyll

Après le steampunk avec Rouille, la fantasy avec Les Noces de la Renarde et le space opera avec Les Oubliés de L'Ama, Floriane Soulas se tourne maintenant, avec Tonnerre après les ruines, vers le postapocalyptique

Autrice à succès, sa plume caméléon a su toucher le cœur de son public. 

Lu dans le cadre d'un partenariat avec les éditions Argyll, je remercie Xavier et Simon pour l'envoi de ce service de presse. 

Résumé :

Dans un monde où l'humanité ne réside plus que dans quelques bastions, Lottie et Férale sont pisteuses. Elles survivent en vendant leurs services de protection contre les malbêtes aux nomades en déplacement. Un jour, Férale entend parler de la cité de Tonnerre, fief de scientifiques travaillant à comprendre les mutations génétiques qui défigurent les humains, et espère y trouver des réponses quant à sa propre différence. Mais il n'est pas sûr que celles-ci lui plaisent ? 

Mon avis :

Dans Tonnerre après les ruines, on pénètre dans un monde asphyxié où la pollution a eu raison du vivant. On y rencontre une humanité finissante, rongée par la maladie. Les pluies acides ont rendu les terres infertiles retranchant la poignée d'humains dans les ruines de villes anciennes. Au milieu de ces vastes plaines arides se dresse Tonnerre, une citadelle peuplée de scientifiques qui cherchent ardemment un remède aux maux de l'humanité. Elle est un phare pour les miséreux qui s'agglutinent à son pied, parcourant parfois des milliers de kilomètres, dans l'espoir d'être sélectionnés afin de participer à des expériences visant à les guérir. Source d'espoir pour les uns ou lieu honni pour les autres, Tonnerre occupe une place centrale dans cette intrigue. Elle est une énigme à percer mais son exploration risque surtout de susciter horreur et épouvante. L'univers imaginé par l'autrice se nourrit autant du progrès scientifique que d'un légendaire oublié. Son imaginaire est très fertile. On note, par exemple, l'existence d'enfants foudre dont les corps sont parcourus par l'électricité faisant d'eux de parfaits générateurs.  

Tonnerre après les ruines est un roman d'action fort bien rythmé. Les évènements s'enchaînent vite, l'atmosphère y est rugueuse et suffocante

Floriane Soulas a fait de Tonnerre après les ruines, un roman implacable comme il sied dans un bon postapocalyptique. Elle nous dessine un futur inquiétant où l'humanité a brûlé sa chandelle par les deux bouts au point de s'être condamnée. Il est question ici de virus, de manipulations génétiques et de stérilité. La science est même érigée au rang de religion dans le sens que tous les espoirs sont placés exclusivement dans sa réussite. A ce titre, les scientifiques sont considérés comme des messies par tous ces nécessiteux qui se savent perdus. Ils en sortent grisés au point d'oublier l'éthique dans leurs démarches. Ainsi, ce choix narratif permet à l'autrice d'orienter sa réflexion sur les pratiques de la science lorsqu'elles se font au détriment du patient et pose la question de la réelle nécessité du sacrifice d'un grand nombre pour en sauver certains. De sauveur, le scientifique devient donc entre ces lignes, bourreau en nous questionnant sur ses dérives monstrueuses. 

Or, cette notion de monstruosité est également au cœur de ce roman puisque Floriane Soulas a choisi de mettre en scène une humanité hybride, fruit de manipulations génétiques. Par leurs différences d'aspect, les yeux jaunes, une mâchoire démultipliée, une force et une rapidité presque animale, ces humains d'un nouveau genre incarnent bien la figure du monstre en suscitant la peur et la défiance. Pour autant, celle-ci ne se mesure pas à la difformité mais plutôt au poids des actes. En tout cas, c'est ce que Floriane Soulas nous rappelle à travers le portrait de certains de ses personnages qui, bien que mutants, dégagent un profond altruisme. 

En nous décrivant une nature dévastée réduisant quasiment à néant la survie humaine, Floriane Soulas inscrit son récit dans une dimension écologique tout en y ajoutant l'idée d'une résilience nécessaire à la pérennisation des êtres vivants. 

Sans doute influencée par l'image de l'homme augmenté, chère aux supers héros des comics, la transformation de l'humanité qui naît sous la plume de Floriane Soulas n'est pas si aisée car elle se réalise dans la douleur et la violence, mais demeure irrémédiable pour achever son adaptation à un environnement changeant. 

Clairement Tonnerre après les ruines est un roman ambitieux qui nous propose un avenir crédible. Le récit est convaincant et démontre une vraie maturité d'écriture. 

Mais la force de ce texte réside aussi dans son duo de personnages féminins qui mènent la danse et s'imposent dans ce monde âpre. Il y a la sauvage Férale dont la proximité impressionne. Sa particularité de posséder des yeux jaunes fait d'elle une paria. Maltraitée, battue et rejetée, sa rencontre avec Lottie l'a fait renaître à la vie. Bien que taxée de démon par beaucoup, son questionnement perpétuel sur les origines de sa nature et sa soif de reconnaissance en font un être profondément bon. Son altruisme et son désir de sauver ses prochains sont particulièrement touchants. On goûte à toutes les facettes de sa personnalité sur le temps la rendant encore plus attachante à nos yeux. A ses côtés se tient son mentor, Lottie. C'est une femme pleine de secrets sur son passé. On la découvre d'abord à travers le regard admiratif de Férale faisant d'elle un être solaire et une âme libre. La réalité est bien évidemment plus complexe. Elle dissimule des blessures qui l'ont transformée en profondeur au point de nourrir chez elle une part d'ombre non négligeable. A travers ses deux protagonistes principaux, l'autrice joue sur les nuances pour rappeler que nul n'est ni blanc ni noir. 

Pour conclure :

Avec ce roman, Floriane Soulas confirme qu'elle est une valeur sûre pour le genre et s'impose de plus en plus comme un nom incontournable dans le paysage des littératures de l'Imaginaire. Clairement avec Tonnerre après les ruines, elle envoie du lourd, alors attention aux secousses !

Fantasy à la Carte

A lire sur le blog, mes avis sur Rouille et Les Noces de la Renarde.

Informations

Floriane Soulas
Tonnerre après les ruines
9782492403996
520 pages
Editions Argyll

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06/10/2023

Nghi Vo, Entre les méandres, Les archives des Collines-Chantantes, éditions L'Atalante

Nghi Vo, Entre les méandres, éditions L'Atalante 

Après L'Impératrice du Sel et de la Fortune et Quand la tigresse descendit de la montagne, Nghi Vo conclut son triptyque d'histoires avec Entre les méandres.

Lu dans le cadre d'un partenariat avec les éditions L'Atalante, je remercie Emma pour l'envoi de ce service de presse. 

Résumé :

De retour sur les routes, l'adelphe Chih et Presque-Brillante se sont arrêtées dans une taverne pour y prendre un thé, au moment où un client malotru a décidé de s'en prendre physiquement à la serveuse. Mais alors que l'adelphe pensait intervenir pour calmer la situation, elle est interrompue par une femme qui, en un tour de main, met ce dernier hors d'état de nuire. Or, Presque-Brillante a reconnu le style du Singe du Sud dans sa technique de combat. Au vu de la rareté des adeptes de cette école d'arts martiaux, Chih a envie d'en apprendre plus et propose d'accompagner cette combattante et sa sœur sur un bout de chemin. Accepteront-elles ? 

Mon avis :

Dans sa série Les archives des Collines-Chantantes, Nghi Vo compile des histoires qu'elle nous narre sous la forme de contes. Racontés de manière éparse, il nous faut toujours démêler ce qui touche directement les personnages présents de ce qui relève de figures légendaires. 

Chacune des sorties de l'archiviste est donc l'occasion de collecter ces récits de vie afin de les consigner et ainsi en garder une trace. Aussi, le duo formé par l'adelphe et la huppe incarne ici la mémoire à transmettre aux générations suivantes. D'ailleurs, cette thématique est le fil directeur de ces trois novellas car derrière les hauts faits qui nous sont contés se dessine le destin agité d'un empire.

Bien loin des canons classiques de la fantasy où l'intrigue s'inscrit dans une lutte entre le Bien et le Mal avec des personnages qui prennent part pleinement à celle-ci, ici Nghi Vo nous propose plutôt une balade louvoyant entre présent et passé. En effet, ses deux principaux interviennent davantage comme observatrices plutôt qu'en tant que véritables actrices des événements. Submergées par l'afflux d'informations, elles sont davantage concentrées sur la manière de les retranscrire. Ainsi, Nghi Vo articule sa dernière novella autour du questionnement sur les choix faits par le passeur d'histoires car obligatoirement des détails seront occultés pendant que d'autres seront ajoutés. L'autrice rappelle que ces annales sont donc le fruit d'une perception subjective d'un tiers et qu'elles ne reflètent à ce titre que la vérité du témoin. 

Même si Nghi Vo cantonne bien souvent Chih et Presque-Brillante à un rôle passif, il n'en demeure pas moins que l'action et le danger hantent bien les pages de cette novella. Il faut dire qu'elles vont traverser les Méandres, une région infestée de brigands. Ces derniers se sont constitués en une secte que l'on appelle la Main creuse et dont l'ombre inquiétante va assombrir la sérénité de leur voyage et laisser fleurir un sentiment d'épouvante. 

Entre peur diffuse et tension latente, ce texte distille une atmosphère teintée d'effroi qui tient son lectorat en haleine le temps d'en connaitre le fin mot de l'histoire.

Dans Les archives des Collines-Chantantes, Nghi Vo a pris les habits d'une ménestrelle pour nous emporter dans un maëlstrom de légendes toutes plus passionnantes les unes que les autres. 

Chacun de ses textes est riche du point de vue de la diversité de ses personnages. Elle accorde une importance aux anciens, à la figure de la femme forte et à la sororité. Derrière l'aspect suranné de ces histoires s'exprime un engagement qui s'inscrit bien dans notre époque. 

Pour conclure :

Délicate et sensible, la plume de Nghi Vo renoue avec son héritage culturel pour nous livrer trois novellas empreintes d'une puissante féérie. 

Fantasy à la Carte

A lire sur le blog, mes avis sur L'Impératrice du Sel et de la Fortune et Quand la tigresse descendit de la montagne

Informations

Sur la blogosphère, lisez les avis : Le Nocher des Livres et Sodome et Gomorrhe.

Nghi Vo
Entre les méandres
Les archives des Collines-Chantantes
9791036001567
122 pages
Editions L'Atalante

Lien vers le site

03/10/2023

Aurélie Wellenstein, Les Loups chantants, éditions Pocket Imaginaire

Aurélie Wellenstein, Les Loups chantants, éditions Pocket Imaginaire 

Après Le Dieu Oiseau, Mers Mortes et Le Désert des Couleurs, j'ai profité de mon bref passage aux Aventuriales pour craquer pour un autre livre d'Aurélie Wellenstein. Parmi les titres présents sur sa table de dédicace, il y avait quelques exemplaires des Loups chantants, un roman qui me faisait de l'œil depuis un bon moment déjà. L'occasion était donc trop belle pour la laisser passer, n'est-ce pas ?

Mais avant de vous parler en détails de ce roman fort passionnant au demeurant, je tiens à remercier Aurélie Wellenstein pour sa gentillesse, sa dédicace et sa recommandation littéraire pour une autre Aurélie toute aussi sympathique.

Résumé :

Le dieu de l'Hiver règne sur les terres givrées de Sibérie. C'est là-bas, au sein d'une petite bourgade peuplée d'éleveurs de rennes que vit Yuri. A l'abri derrière un Blizzard maintenu par la magie des Gardiens, les habitants se sentent protégés des créatures envoyées par le terrible Korochun, à l'image des loups chantants. Pourtant le danger est bien là, Yuri en sait quelque chose puisque sa fiancée a cédé à l'appel des loups et a disparu dans le Blizzard. Or, un nouveau malheur vient de s'abattre sur lui car sa sœur est atteinte d'une étrange maladie. En effet, sa peau se couvre peu à peu de cristaux de glace. Pour le chaman local, Kira a été maudite et doit être bannie sans plus tarder pour ne pas attirer le courroux divin sur le reste du village. Mais il est impensable pour Yuri de la laisser partir sans lui. Alors au mépris du danger, il attelle ses chiens au traîneau et s'embarque aux côtés de sa sœur dans un périlleux voyage avec l'espoir ténu de trouver une solution. Y en a-t-il seulement une ?

Mon avis :

Les Loups chantants nous plonge dans un conte venu du froid où la beauté glacée des paysages côtoie un onirisme teinté de notes horrifiques. Ainsi, la magie imprègne chacune de ces pages. Elle s'exprime par bien des manières, tantôt par le pouvoir des Gardiens qui aspire les formules inscrites sur les pages des livres de magie afin qu'elles interagissent avec les éléments et maintiennent ainsi en place le Blizzard, tantôt par l'ombre du dieu Korochun entouré de créatures au corps altéré et à la puissance démultipliée ou tantôt par l'alchimie qui unit l'homme à l'animal permettant, au besoin, de fusionner l'âme humaine à celle de la bête.

Comme à son accoutumé, Aurélie Wellenstein a choisi un cadre rude pour ce présent roman où ses personnages doivent faire corps avec une nature hostile et inhospitalière. Les descriptions sont à couper le souffle et les animaux, omniprésents. Ils sont hissée au rang de protagonistes et témoignent de son profond attachement à leurs égards. Entre ces lignes, les loups sont aussi majestueux qu'inquiétants tandis que les chiens sont profondément attachants. 

Avec Les Loups chantants, on retrouve la signature d'un imaginaire singulier, foisonnant et féroce où l'épouvante fraie avec le beau. Aurélie Wellenstein est l'une de ces plumes qui a l'art d'horrifier et d'émerveiller, tout à la fois. Chacun de ses textes se savoure, ne serait-ce pour les ambiances très particulières qu'ils dégagent. Les Loups chantants ne fait donc pas exception et est tout aussi riche que ses autres livres. 

L'autrice y aborde des sujets durs comme l'ostracisme ou la maladie. Elle explore l'intimité de ses personnages en les mettant à nu face à des situations douloureuses telles l'acceptation de la mort ou l'abnégation de soi pour le bien d'autrui. 

C'est un récit également intéressant du point de vue des émotions qu'il suscite. Il est clairement difficile de rester de marbre face à ces destins tourmentés. Les personnages mis en scène sont jeunes et se cherchent encore. Ainsi, pour Yuri qui est le protagoniste principal, cette quête est aussi l'occasion de trouver sa place en cessant de regarder vers le passé pour se concentrer sur l'avenir. 

Récit iniatique ou roman d'aventure, Les Loups chantants nous embarque surtout dans un tourbillon d'actions dont on a du mal à décrocher. 

Dans ce roman, Aurélie Wellenstein nous attache aux pas d'un trio de personnages. Il y a d'abord Yuri, un adolescent hanté par la disparition de son amour au point de ne plus voir les gens qui l'entourent. Or, le mal inconnu qui ronge sa sœur va le ramener brutalement sur terre. Pourtant tout au long de son périple, il va lutter coûte que coûte contre l'attrait de l'inconnu. Tiraillé entre son obsession de retrouver son amour perdu et son sens du devoir, Yuri est un garçon touchant et troublant dont les choix risquent de surprendre jusque dans les dernières pages du livre. Sa sœur Kira est une jeune femme dévouée à la protection de son clan au point de s'oublier elle-même. Alors, lorsque les siens lui ont tourné le dos et que seul son frère demeure auprès d'elle, elle va se raccrocher à l'espoir d'être sauvé, au moins pendant un temps. Elle est une âme courageuse qui ne manque pas de cran pour affronter les épreuves qui l'attendent. Quant à Anastasia, la meilleure amie de Yuri, elle est une jeune fille plutôt intrépide qui a décidé de tout lâcher pour les accompagner dans leur quête insensée. Animée par de puissants sentiments qui la lient à Yuri, saura-t-elle lui faire oublier le fantôme qui l'obsède?

Avec Les Loups chantants, Aurélie Wellenstein signe un récit tout en clair-obscur qui nous tient captif tout du long autant par la puissance des émotions qu'il dégage que par la majesté des lieux décrits. A lire.

Fantasy à la Carte

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Informations 

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Aurélie Wellenstein 
Les Loups chantants 
9782266273138
286 pages
Éditions Pocket Imaginaire 

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