L'influence du "gaming" à la littérature

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08/01/2021

Estelle Faye, Un Éclat de Givre, éditions Folio SF

Estelle Faye, Un Éclat de Givre, éditions Folio SF

Avant la sortie de son prochain roman, Un Reflet de Lune aux éditions ActuSF qui s'inscrit dans le même univers, j'avais envie de vous parler d'Un Éclat de Givre d'Estelle Faye. 

Dans ce roman, Estelle Faye nous plonge dans un Paris post-apocalyptique et nous attache aux pas d'un jeune chanteur de jazz, prénommé Chet. L'apocalypse survenue au XXIe siècle a laissé la place à un monde distordu dans lequel Paris semble être le seul endroit où un semblant de vie demeure. Au fil du temps, les survivants s'y sont entassés et vivotent sous une chaleur écrasante et perpétuelle. Enfant de ce nouveau siècle, Chet vit de ses représentations musicales et de petits services, pas toujours très légaux, qu'il rend ici ou là. Incapable de résister aux beaux yeux du bel apollon qui se présente à lui, le voilà qui accepte une mission bien payée mais suicidaire. Seulement il risque de comprendre trop tard où il a mis les pieds. 

Estelle Faye est une belle plume de l'Imaginaire français que je découvre au fur et à mesure de ses textes. J'avoue avoir été d'abord ensorcelée par son univers fantasy développé dans Les Seigneurs de Bohen (éditions Critic) et Les Révoltés de Bohen (éditions Critic). C'est donc tout naturellement que j'ai eu envie de lire ses autres romans.

Avec Un Éclat de Givre, elle explore un autre rivage d'Imaginaire et nous fait accoster dans un futur décadent mais qui n'est pourtant pas exempt de merveilleux. 

Suite à une exploitation excessive des sols, les hommes ont épuisé les ressources de la terre. La disette a pris le pas sur l'abondance et les populations ont été progressivement décimées. Ici, des restes de technologie côtoient la misère. Des enfants naissent même avec des dons de télépathie ou de télékinésie qu'ils perdent à l'âge adulte. 

Dans son roman, Estelle Faye tisse un monde bouleversé où les chimères d'hier sont devenues réalité. La vie ne semble se concentrer plus qu'à Paris et dans sa proche banlieue car les terres situées au-delà sont devenues hostiles et inhabitées. Cadre principal de l'action, Paris y est tantôt vibrante, tantôt inquiétante. Ce roman se lit comme un hommage à la ville lumière qui n'a rien perdu de sa superbe même si les hauts lieux de la capitale renaissent sous cette plume de manière bien différente. Ainsi, le centre commercial les Quatre-Temps nous apparaît comme figé pour l'éternité dans un passé perdu et la piscine Molitor est devenue un club privé à sirènes, nées de manipulations génétiques. Quant aux égouts, ils sont peuplés de dangereux rats hybrides, crées par des savants fous parce qu'à l'époque, ils ont trouvé cela amusant. Une torpeur s'est littéralement abattue sur la ville, la chaleur y est insoutenable. Le climat est toujours déréglé même si des apprentis scientifiques ont inventé au siècle dernier un régulateur. Celui-ci est d'ailleurs au cœur des enjeux de ce récit car tombé aux mains de fanatiques, il promet une canicule éternelle. C'est également un Paris où la nature a repris ses droits, la végétation s'y épanouie de manière désordonnée, formant un ensemble sauvage et luxuriant. 

Avec Un Éclat de Givre, elle signe un univers envoûtant que l'on s'imagine bien connaître mais qui, pourtant, ne cesse de nous étonner au fil des chapitres. 

Porté par un héros à la personnalité multiple, le roman n'en est que plus immersif. Chet est un homme qui se cherche. Il fascine, attache et surprend. En tant que chanteur, il doit se fondre dans toutes les chansons qu'il interprète. C'est pourquoi, au fur et à mesure du livre, on le voit enfiler de nombreux masques. A lui seul, il incarne de nombreux personnages. Âme solitaire, Chet est un héros tout en contradictions qui prend l'aventure à bras le corps et se découvre plein de ressources. 

A l'image de son héros, Un Éclat de Givre est un roman touchant qui véhicule son lot d'émotions et nous fait vibrer d'un bout à l'autre. 

Avec ce roman, je découvre une autre facette de cette autrice qui s'est réappropriée, ici, les codes d'un genre que je lis peu et qui pourtant, m'a totalement emportée. 

Fantasy à la Carte

Lisez également mes avis sur Les Seigneurs de Bohen et Les Révoltés de Bohen.

Estelle Faye
Un Éclat de Givre
Editions FolioSF

02/01/2021

Adrien Tomas, Engrenages et Sortilèges, Rageot Éditeur

Adrien Tomas, Engrenages et Sortilèges, éditions Rageot

Avant la sortie de Dragons et Mécanismes, toujours aux éditions Rageot, il me fallait absolument lire Engrenages et Sortilèges. Même si Adrien Tomas précise dans une communication que son prochain livre ne sera pas une réelle suite, j'avais tout de même envie de découvrir ce cycle dans le sens de son écriture. 

Si Engrenages et Sortilèges est le premier roman qu'Adrien Tomas a inséré dans cet univers steampunk, il n'est plus le seul depuis la sortie de Vaisseau d'Arcane aux éditions Mnémos dont je vous ai déjà parlé sur le blog.

Mais revenons à ce présent roman dans lequel on fait la connaissance de Grise et Cyrus, deux élèves scolarisés dans la prestigieuse Académie des Sciences Occultes et Mécaniques de Celumbre. Alors que les deux jeunes gens se détestent, ils manquent de se faire enlever dans l'enceinte même de l'école, bien qu'ils s'y croyaient en sécurité. Par crainte d'une trahison interne, tous deux décident donc de mettre leur inimitié de côté pour trouver refuge dans les bas quartiers de la ville. Mais sauront-ils faire face au danger et démasquer leurs ennemis ? 

Dans Engrenages et Sortilèges, Adrien Tomas nous immerge au cœur de l'empire mycéen et plus précisément dans la ville sombre et pluvieuse de Celumbre. La société y est scindée en deux avec d'un côté, les ésotériciens, autrement dit des mages détenteurs de pouvoirs magiques et de l'autre, les technologistes qui inondent le marché des machines et des automates qu'ils ont fabriqués. L'auteur nous brosse donc le portrait d'un monde progressiste dans lequel on croise de nombreux automates. Certains sont les serviteurs de familles aisées alors que d'autres ont intégré les rangs des soldats qui veillent à la sécurité de la cité. Si beaucoup sont les esclaves de ce monde moderne, quelques-uns ont pu s'affranchir et trouver la liberté dans les quartiers populaires. En outre, on ne s'étonne pas non plus de rencontrer des drones qui s'avèrent être de fidèles compagnons, à l'image de Cog, le petit drone de Grise. Magie et technologie ancrent donc cet univers dans un steampunk marqué. Mais qu'ils soient magiciens ou technologistes, tous ont besoin de l'arcane, un minerai très convoité qui sert de batterie autant pour les pouvoirs magiques que pour les machines. Cette énergie est au cœur des enjeux comme, c'est d'ailleurs le cas dans Vaisseau d'Arcane

En outre, Adrien Tomas a également coloré son récit d'une dimension sociale en s'appuyant sur un clivage très prononcé avec d'un côté, la caste aisée dont sont issus ses deux héros, et de l'autre côté, la caste plus populaire où ils ont trouvé refuge. Néanmoins, c'est essentiellement au sein du quartier le plus pauvre de Celumbre que l'auteur nous emmène. En effet, avec les Rets, on retrouve l'ambiance de la cour des miracles où vivent voleurs, assassins, sorciers renégats ou encore automates affranchis. Certains font même partie d'une guilde tenue d'une main de fer par la mystérieuse Arachnide. C'est d'ailleurs avec elle que nos deux étudiants vont sceller un pacte pour comprendre qui se cache derrière cette machination dont ils sont les victimes. 

Bien que l'auteur mette en scène une communauté très variée de protagonistes, la force de ce récit repose surtout sur ses deux personnages principaux qui se détestent cordialement. Il faut dire que le pédant Cyrus Vorocle est insupportable. Cette supériorité permanente qu'il affiche hérisse le poil de Grise qui ne peut s'empêcher de répondre à ses provocations. Cyrus est le fils de la très respectée générale et baronne Abylabe Vorocle. Héritier d'une lignée d'esotériciens, cela fait de lui un être très pompeux. Pourtant des quatre disciplines qu'il doit maîtriser, une seule lui échappe encore. En effet, s'il manie le mentalisme et l’illusionnisme à la perfection, et se débrouille bien en sortilèges curatifs, l'élémentalisme continue de se dérober à lui. Ne pas être capable d'allumer la moindre flammèche est un peu gênant surtout pour quelqu'un qui souhaite devenir un grand ésotéricien. Quant à Grisella Oolonga, elle aspire à suivre les traces de son père, un brillant ingénieur d'Etat. Contrairement à Cyrus, Grise est une jeune fille timorée et solitaire. Sa passion pour la mécanique l'isole de ses camarades avec lesquels elle n'a pas su se lier. Alors se retrouver en tête à tête avec le garçon le plus populaire et le plus exécrable de l'Académie promet de faire quelques étincelles dont on se délecte d'avance. Ainsi, Adrien Tomas réunit dans ce livre deux esprits brillants auxquels il a retiré tous leurs repères pour les embarquer dans une aventure qui les dépasse mais dans laquelle ils vont devoir jouer un rôle s'ils espèrent survivre.

Avec Engrenages et Sortilèges, Adrien Tomas se fait encore une fois l'auteur d'un récit palpitant qui prend corps dans un univers fabuleux. 

Récompensé par pas moins de quatre prix : prix Saint Exupéry, prix Les Hallienales, prix Babelio.com et prix Les Mordus du Polar, ce roman jeunesse ravira les lecteurs quels que soient leur âge.

Fantasy à la Carte

A lire aussi sur le blog mes avis sur Les Hurleuses et L'Empire des Abysses (tome 1 et 2 de Vaisseau d'Arcane) et Les Six Royaumes

Adrien Tomas
Engrenages et Sortilèges
Editions Rageot

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31/12/2020

Mary Poppins, une nounou parfaite en tous points


Le Retour de Mary Poppins

Pour célébrer Noël, cette année, M6 a décidé d'inviter dans nos maisons Mary Poppins lors d'une soirée spéciale en diffusant les deux films. En effet, cette célèbre nurse qui a enchanté nos noëls pendant des années a fait son grand retour au cinéma en 2018 avec la sortie d'une suite, Le Retour de Mary Poppins

Cinquante-quatre après le premier film, les studios Walt Disney ont eu envie de surfer sur la vague des nostalgiques en proposant un second film. L'occasion pour eux de faire une pierre deux coups en accrochant les enfants d'hier et la génération d'aujourd'hui. 


Dans Le Retour de Mary Poppins, on retrouve un Michael Banks adulte qui est à son tour employé dans la banque de son père. De même, qu'il vit toujours au 17 allée des Cerisiers, avec ses trois enfants, Annabel, Georgie et John, et leur gouvernante Ellen. Comme sa mère avant elle, Jane Banks se bat pour les droits des ouvriers et apporte son aide à la famille de Michael. Lorsque cette dernière subit une perte tragique, Mary Poppins réapparaît magiquement dans leur vie. Avec l'aide de Jack, l'allumeur de réverbères toujours optimiste, Mary va tout faire pour que la joie et l'émerveillement reviennent dans leur existence...

Pour ce second volet, le producteur Bob Marshall a repris les mêmes motifs qui ont fait le succès du premier film : la comédie musicale mêlant plans filmés et séquences de dessins-animés. Ce film suit donc le même fil que le premier avec une Mary Poppins qui débarque quand les enfants Banks en ont le plus besoin. Mais, si dans le premier film, il s'agissait surtout de trouver la nurse qui convient à deux garnements difficiles, dans le second, il est plutôt question de sortir Michael Banks et ses enfants d'une situation délicate. Néanmoins, Le Retour de Mary Poppins est construit de la même manière avec Mary Poppins qui entraîne les enfants dans une succession d'aventures à chacune de leur sortie de la maison familiale. La seule différence est que ce n'est plus le ramoneur Bert qui l'accompagne mais Jack, l'allumeur de réverbères. Ainsi, les scénaristes se sont surtout conformés aux standards du film original pour éviter, sans doute, toute déconvenue. 

Au casting de ce nouveau film, on retrouve dans le rôle de Mary Poppins, la pétillante Emily Blunt. Pour ce rôle, elle suit les traces de Julie Andrews et fait preuve d'un joli jeu de jambes pour nous embarquer dans quelques danses endiablées. Elle demeure toujours cette bonne fée dont le sac à mains semble sans fond et elle a toujours avec elle son fameux parapluie parlant. Moins drôle que Dick Van Dyke, dans le rôle de Bert, Lin Manuel Miranda se défend tout de même bien en donnant la réplique à cette nounou inoubliable. Jack est un personnage attachant qui s'est entiché de la famille Banks, ne résistant pas au charme de Jane. C'est Ben Wishaw qui incarne Michael Banks. Dépassé par les événements, ce doux rêveur est surtout écrasé par la tristesse et le regret. Cela fait de lui un personnage émouvant, noyé dans ses souvenirs. Emily Mortimer, c'est à dire Jane Banks s'est pas mal inspirée de Winifred Banks, alias Glynis Johns pour insuffler à son personnage le même dynamisme. En guest-star, Dick van Dyke fait une petite apparition et enchante les téléspectateurs car à 95 ans, il n'a rien perdu de sa souplesse. On retrouve également un Colin Firth sous les traits d'un banquier peu scrupuleux et une Meryl Streep en cousine fantasque de Mary Poppins. Bien dans leur rôle, cette nouvelle équipe d'acteurs et d'actrices nous entraînent sans mal dans leur folle aventure. 

Si pour ma part, j'ai moins accroché aux chansons de ce second volet, j'en ai pas moins apprécié les scènes époustouflantes et très rythmées où personnages et figurants exécutent avec beaucoup de talent les différentes danses. Je pense notamment  à celle réalisée par les allumeurs de réverbères pour la chanson "Luminomagifantastique" qui est autant un clin d’œil à celle des ramoneurs qu'à la fameuse "Supercalifragilisticexpialidocious". Il s'en dégage un bel esthétisme qui donne juste envie de se joindre à cette joyeuse sarabande. 

Bien que je reste une inconditionnelle du film de 1965, particulièrement pour ses ritournelles entêtantes, j'ai pris plaisir à découvrir cette suite que je trouve dans l'ensemble réussie. J'y ai retrouvé un peu de la magie de mes noëls d'enfant. Comme quoi Mary Poppins demeure à jamais un conte très enchanteur. 

Fantasy à la Carte

Le Retour de Mary Poppins
Walt Disney Company
2018

29/12/2020

Alan Moore, La Voix du Feu, collection Perles d’Épice, éditions ActuSF

Alan Moore, La Voix du Feu, éditions ActuSF

Pour cette fin d'année, les éditions ActuSF vous proposaient de garnir vos souliers d'un nouveau beau-livre, édité dans leur superbe collection Perles d’Épice. Ainsi, après Liavek de Megan Lindholm & Steven Brust, Skin Trade de G.R.R. Martin ou encore A la pointe de l'épée d'Ellen Kushner, c'est donc au tour d'Alan Moore de rejoindre ces grands noms de l'Imaginaire avec son recueil de nouvelles, La Voix du Feu

Scénariste de comics, Alan Moore a rencontré le succès avec ses œuvres : Watchmen, V comme Vendetta ou encore From Hell. Mais, il est également auteur de nombreuses nouvelles dont L'Hypothèse du Lézard. Pour rappel, cette novella a inauguré la très belle collection de romans graphics de cette maison d'édition. 

Originaire de la ville de Northampton, il lui rend hommage à travers deux de ses textes : La Voix du Feu et Jérusalem. C'est donc dans un bel écrin que les éditions ActuSF ont décidé de rééditer ces étonnantes nouvelles. Je remercie, d'ailleurs, Jérôme Vincent pour l'envoi de ce très beau service de presse. 

A travers douze récits, l'auteur relate l'histoire de Northampton de l'âge du bronze à nos jours. L'ensemble forme un corps de textes insolites dans lesquels Alan Moore fait entendre une pléiade de voix qui semblent toutes fascinées par le feu quelque soit la forme qu'il prend. Northampton qui sert de cadre à l'action et le feu apparaissent donc comme les fils d’Ariane de ces courts récits. 

En effet, Alan Moore remonte loin dans le passé, au temps où le feu était un rituel funéraire comme dans "Les champs de crémation", soit 2500 avant Jésus-Christ. On y retrouve une femme qui, au court d'un voyage, a décidé de se substituer à une autre après l'avoir assassiné afin de prendre sa place de fille de chef de clan mourant. En agissant ainsi, elle espère se ménager une meilleure place et s'enrichir. Mais trouvera-t-elle réellement ce qu'elle cherche ? Ici, l'auteur nous immerge dans la vie d'un clan en mettant l'accent sur leurs croyances et leurs coutumes, notamment leur rapport à la mort et au traitement du corps lorsque la personne est passée de vie à trépas. 

Parfois, cet auteur se plaît à insérer des références de certaines de ses nouvelles dans d'autres comme dans "La tête de Dioclétien" où l'on rencontre un Romain chargé de mener une enquête autour de Londinium pour mettre à jour un trafic de fausse monnaie. C'est au cours de ses investigations que les locaux lui confient les contes fantastiques et autres histoires à dormir debout du coin comme celle sur cette centaine de personnes mystérieusement dévorées par des chiens géants mais dont on a retrouvé aucune trace. Clin d’œil à "Dans les terres inondées" à n'en pas douter ! 

Le feu a aussi servi à purger le malin qui s'est emparé de l'âme impure de ces femmes qui se sont données au diable. Enfin, c'est ainsi que l'on a justifié tous ces bûchers qui ont brûlé celles que l'on qualifiait de sorcières, à l'image de Mary et Elinor dans "Complices ès tricots". Alan Moore nous raconte par le menu les nombreux supplices qu'elles ont subis avant de finir par être brûlées vives. Étonnamment elles font corps avec les flammes au point de ne rien sentir car tel est le pacte qu'elles ont fait avec les Esprits malins. 

Chez Alan Moore, le feu peut être également métaphorique faisant plutôt référence au brasier intérieur qui enflamme les sens et fait perdre toute raison. Ce n'est pas le juge Augustus Nicholls qui vous dira le contraire car dans "Le Langage des anges", il se sentira bien démuni face aux charmes de certaines rencontres, et ne résistera d'ailleurs pas longtemps avant d'y succomber. Mais attention où l'on met les pieds ou autre chose, d'ailleurs, car qui peut savoir qui sera réellement la souris dans cette histoire ? 

Bien souvent sombres, voire empreintes d'une certaine violence crue, les nouvelles d'Alan Moore peuvent, cependant, parfois faire montre d'un certain humour grinçant. C'est le cas avec "Confessions d'un masque" qui nous fait partager les souvenirs d'un homme dont il ne reste plus qu'une tête parlante accrochée au mur de la ville. Il en va ainsi quand on est jugé pour trahison, la sentence est, à coup sûr, la décapitation. A travers lui, l'auteur nous plonge avec une légère causticité dans l'Histoire d'un pays qui s'est écrite dans le sang. 

Au fil de ses nouvelles, Alan Moore explore la psychologie humaine à travers leurs peurs, leurs névroses ou leurs fascinations morbides pour la mort, celle des autres de préférence. Avec La Voix du Feu, il se fait l'auteur de textes étranges où le fantastique nous cueille ici ou là pour nous emmener vers des rebondissements et des conclusions inattendues. Il brosse le portrait d'une ville, à travers le temps qui l'a profondément marqué dans ses racines. Ayant grandi dans les quartiers pauvres de Northampton, une certaine noirceur se dégage de ses textes qui lui ont sans doute servi d'exutoire pour extérioriser ce passé marquant. 

Oseriez-vous à votre tour pousser la porte de cet imaginaire fabuleux capable de redonner vie à un passé plus vrai que nature. 

Fantasy à la Carte

A lire aussi sur le blog mon avis sur L'Hypothèse du Lézard

Informations

Alan Moore
La Voix du Feu
Collection Perles d'Epice
400 pages
978-2-37686-280-2
Editions ActuSF

25/12/2020

Chloé Garcia, Un monde pour demain, éditions Le Lys Bleu

Chloé Garcia, Un monde pour demain, éditions Le Lys Bleu

Il y a peu, je vous parlais d'une jeune autrice à travers son premier recueil de nouvelles, intitulé Un grain de magie, publié aux éditions Le Lys Bleu. Comme elle en a écrit deux, il est temps que je vous partage également mes impressions sur son second titre, Un monde pour demain. Je la remercie d'ailleurs à nouveau pour l'envoi de ce service de presse. 

Alors que le premier s'inscrit beaucoup dans le merveilleux, le second, lui, questionne plutôt sur l'avenir. 

A travers douze nouvelles, Chloé Garcia nous propulse dans une multitude de futurs. Si certains sont inquiétants, d'autres sont prévisibles. 

Parfois la Terre est tout simplement détruite au point d'avoir obligé les humains survivants à se réinventer comme dans "Un voyage dans le temps" où la vie est devenue sous-marine. Ainsi, la technologie a donné naissance à de véritables villes au fond des océans. C'est là que l'on retrouve Chris, un explorateur des mers devenu amnésique, suite à un accident survenu lors de sa dernière expédition. Mais derrière cette incroyable prouesse technique qui a permis de vivre sous la mer, se cache des intérêts peu louables. A travers ce texte, l'autrice revisite d'ailleurs un mythe qui fascine encore aujourd'hui. 

Dans "Une lueur d'espoir", le monde n'est plus le même. En effet, les êtres vivants habitent sous cloche, enfin plus précisément sous un dôme qui est entretenu par un personnel dédié, à l'image des Lumineurs. C'est eux qui sont chargés de nettoyer les astres artificiels qui illuminent le ciel de ce dôme. Un jour, l'un d'eux abîme accidentellement la surface de celui-ci et fait une découverte dérangeante. Et si tout ce en quoi il croit n'était qu'un mensonge d'Etat? 

Chloé Garcia aborde souvent la question de la place du pouvoir dans le façonnement des sociétés de demain. Or, justement dans "Une signature ou la vie", elle brosse le portrait d'un système de gouvernance des peuples, écrasé par un carcan administratif lourd qui place les gens sous haute surveillance. Ainsi, Stéphane, fonctionnaire, étouffe de ces nombreux papiers à signer en permanence pour se conformer aux règles édictées et de cette surveillance en continu. Il aspire à une autre pensée. Et s'il n'était pas le seul ? 

Derrière ces nouveaux mondes se dessinent souvent la volonté d'une élite qui détient le pouvoir. Mais face à cette puissance naît une résistance de certains esprits qui refusent le modèle imposé et rêvent d'une vraie liberté. C'est ce que la jeune Bénédicte découvre dans "D'un commun accord" à travers le bien étrange et très caché héritage que lui a laissé ses parents. Et si les gens n'étaient que les âmes dociles à la pensée factice impulsée par l'intelligence artificielle ?

Au fil de ses nouvelles, Chloé Garcia explore des futurs qui se dessinent déjà. En lien avec notre inquiétante actualité, elle a eu envie de mettre des mots sur ce futur incertain où l'humanité pourrait devenir une espèce menacée. 

Fantasy à la Carte

A lire aussi sur le blog mon avis sur Un grain de magie

Chloé Garcia
Un monde pour demain
Editions Le Lys Bleu