Quand on se lance dans la lecture des Chroniques d'Alvin Le Faiseur d'Orson Scott Card, on se rend très vite compte que s'en détacher devient, au fil des livres, de plus en plus difficile. En tout cas, c'est la réflexion que je me suis faite en refermant, il y a peu, le troisième tome.
Mais heureusement, les éditions L'Atalante m'ont fait la surprise de m'envoyer le tome 4. Je les remercie ainsi qu'Emma pour ce nouveau partenariat qui me donne l'occasion de continuer de vous parler de cet incontournable du genre.
Dans ce quatrième opus, Alvin est de retour à Hatrack River, en compagnie d'Arthur Stuart. Seulement, la joie des retrouvailles avec le père adoptif d'Arthur est vite gâchée par la plainte de vol, déposée à son encontre par son ancien patron, Conciliant Smith. Il l'accuse de lui avoir dérobé de l'or pour réaliser le soc de charrue, marquant le début de son compagnonnage. Bien que le motif soit ridicule, Alvin n'en est pas moins emprisonné le temps de son jugement. Clairement, cette affaire sent la malveillance. Maintenant est de savoir si le Défaiseur est en cause ou s'il s'agit d'autre ennemis ? Alvin sait que ses prochains jours seront compliqués. Mais ce qu'il ignore encore, c'est que la trahison pourrait venir de son entourage proche. En effet, à quoi s'attendre d'autre quand son propre frère a développé une telle jalousie qu'il choisit de s'éloigner afin de se forger de nouvelles armes à utiliser contre lui.
Dans Le Compagnon, Orson Scott Card a divisé son récit en deux temps d'action avec d'un côté, les péripéties que subit Alvin et de l'autre côté, les manigances que fomente Calvin. A travers ces deux personnages, l'auteur explore les deux facettes de la personnalité d'un Faiseur car ils sont bien les 7e fils d'un 7e fils alors ils disposent des mêmes pouvoirs de Faiseur. Seulement, l'un incarne le Bien et l'autre, le Mal.
Dans ce quatrième volet, l'auteur introduit de nouveaux personnages ou donne de l'importance à certains. C'est le cas de Calvin qui en grandissant a pris son frère en grippe. Or, en se laissant complètement submergé par la jalousie et la haine, il devient l'instrument idéal du Défaiseur pour nuire à Alvin. Dernier de la fratrie, il n'a pas réussi à y trouver sa place. Il se sent comme un laissé-pour-compte et tient Alvin pour entièrement responsable de cette situation. Il voudrait, lui aussi, être reconnu comme un Faiseur à part entière, seulement il ne sait pas comment faire. Toute cette rancœur accumulée va faire de lui un ennemi mortel pour Alvin. Finalement, à travers eux, Orson Scott Card revisite le mythe d'Abel et de Caïn, même si dans son récit, il inverse les rôles. Cela nous donne déjà des pistes quant à la tournure que l'auteur va donner à la suite de son intrigue.
Cependant, chemin faisant, Alvin noue également de belles et solides amitiés comme avec En-Vérité Cooper qui souhaite comprendre la nature et la portée de ses propres pouvoirs et vient donc s'en remettre au Faiseur. C'est ainsi que cela se passe quand un Faiseur naît, il en attire d'autres. Au fil des pages de cette saga, Alvin s'entoure de personnes ayant le don ou maîtrisant des sortilèges. Or, la présence de tous ces détenteurs de pouvoir va lui permettre d'accomplir son oeuvre et de mettre ainsi en échec le Défaiseur.
Dans Le Compagnon, la magie n'est donc pas seulement du fait d'Alvin. De plus, Orson Scott Card nous ouvre parfois la porte sur un autre espace-temps qui réduit considérablement les distances rien qu'en traversant une porte. Cela ancre son récit dans un ésotérisme qui s'affirme de plus en plus.
D'autre part, en filigrane de l'intrigue que l'auteur tisse, on retrouve les grandes thématiques qui ont été au cœur des fondements des Etats-Unis d'Amérique : l'indépendance, la nation, l'égalité et l'abolition de l'esclavage. Orson Scott Card a à cœur de rattacher sa fantasy à la genèse du Nouveau Monde. En conséquence, il n'hésite pas à peupler son uchronie de grandes figures du passé. C'est ainsi que l'on recroise la route d'un Napoléon Bonaparte, souffrant de la goutte que Calvin espère manipuler en agitant ses dons de guérisseur pour apprendre auprès de celui qui a régné un temps sur l'Europe. Plus étonnant encore est cette étrange amitié que ce dernier a noué avec un certain Honoré, poète sans le sou qui anime les salons de son verbe haut.
Dans ce livre, les clins d’œil ne manquent pas comme celui adressé à J.R.R. Tolkien afin de nous rappeler, sans doute, ce que l'on doit au père fondateur du genre, même si depuis les écrivains se sont totalement affranchis du cadre.
Les Chroniques d'Alvin Le Faiseur ont donné une pleine liberté d'écriture à Orson Scott Card lui permettant ainsi de jouer entre la réalité et la fiction.
Remarquablement bien écrit, cette saga nous embarque avec fluidité au point de rendre la séparation chaque fois plus douloureuse.
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