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25/08/2023

Arnaud Cazelles, Nous regrettons la mort, éditions Les Trois Nornes

Arnaud Cazelles, Nous regrettons la mort, éditions Les Trois Nornes 

Parmi les nouvelles signatures de l'Imaginaire francophone, il y a Arnaud Cazelles, à qui l'on doit déjà deux romans publiés en 2022 : Un Certain goût de plomb (éditions Oneiroi) et Nous regrettons la mort (éditions Les Trois Nornes). Or, justement ce second livre m'attendait dans ma pile à livres depuis l'été dernier, alors il était donc plus que temps que je m'y intéresse. 

Résumé :

La mort n'est plus. En effet, à l'expiration de leur dernier souffle, les humains deviennent de dangereux spectres contre lesquels les vivants ne peuvent se prémunir qu'avec du sel. Les sorcières en seraient la cause, ainsi que de l'élévation d'infranchissables barrières de brume. Depuis lors, les prêtres et les sœurs inquisitrices du Culte du Grand Œil traquent toutes les sorcières afin de les éliminer dans l'espoir de faire revenir la mort. Fàinella est l'une de ces sœurs. Elle a été chargée par sa hiérarchie de retrouver celle que l'on surnomme la Corneille Blanche, pendant qu'elle retourne sur sa terre natale pour noyer sa mère devenue une non-morte. C'est accompagnée d'un vieil homme que Fàinella s'engage dans cette nouvelle mission qui pourrait bien ébranler ses certitudes, qui sait ? 

Mon avis :

Dans Nous regrettons la mort, on pose ses valises dans un univers de fantasy remarquable et détaillé dans lequel Arnaud Cazelles a donné à son monde imaginaire un historique et une chronologie précis. Après des années de guerre et de pillages, les quinze clans, installés sur les îles situées au nord du continent d'Aboshàt, ont entériné la paix par le truchement d'un traité. Depuis lors, ils vivent à l'écart avec leurs propres croyances, en dépit de l'hégémonie du Culte du Grand Œil. Néanmoins, celui-ci demeure vivace sur le continent grâce au zèle de ses disciples qui gagnent toujours plus de terrain pour convertir les peuples et éteindre les sources de magie en supprimant les sorcières. On y retrouve ici des influences celtiques, à travers la présence de druides ou par le parallèle que l'on peut faire avec la dissolution progressive de la religion polythéiste celte dans la culture romaine. Sous la plume d'Arnaud Cazelles, la magie se nomme le viviccia et forme des nœuds de pouvoir perceptibles et utilisables que par une poignée d'élues. C'est aussi une source d'énergie utilisée pour ensorceler des armes servant à combattre les spectres et alimenter les navires-cathédrales, une sorte de bateaux volants qui ajoute une touche steampunk à l'ensemble.

Nous regrettons la mort est un roman court mais bien mené qui nous conte le road-trip d'un duo de personnages détonnant. Elle est jeune, lui est un homme vieillissant. Elle s'est convertie au Culte du Grand Œil, lui croit aux anciens dieux. Ils semblent incompatibles pour ce voyage et pourtant ils finiront par se compléter. Fàinella est un personnage plutôt ambivalent. Par sa chevelure rousse et ses racines, elle incarne l'image populaire que l'on se fait de la sorcière. Pourtant, elle s'est destinée plus par opportunité que par réelle conviction à la fonction de chasseuse. Au fil de l'aventure, on découvre donc cette femme dans toute sa complexité. Curieuse et pugnace, elle s'est hissée par sa seule volonté à une position élevée. Mais en retournant chez elle, elle va se confronter à son passé et à une réalité dont elle s'était coupée en partant. Ce voyage est donc l'occasion d'une introspection personnelle qui s'avéra à la fois douloureuse et perturbante. Un parcours qui fait d'elle une protagoniste particulièrement intéressante à suivre, d'autant qu'elle centralise à la fois des forces et des faiblesses. Quant à Callean, il se retrouve embarqué bien malgré lui dans ce périple dans lequel il va prendre part et jouer d'ailleurs un rôle décisif. Arnaud Cazelles nous brosse donc le portrait d'un personnage âgé en mettant en exergue toutes les problématiques liées à l'âge avec d'un côté, les douleurs du corps, la baisse du tonus et le dynamisme amoindri et de l'autre côté, l'expérience et la sagesse qui sont d'indispensables atouts. Sa volonté de protéger et de préserver Fàinella dégage de lui une vision paternelle. C'est vraiment un personnage très attachant, particulièrement dans sa démarche. Personnellement, j'ai eu un vrai coup de cœur pour ces deux protagonistes, autant pour l'évolution que l'auteur leur donne que pour les liens qu'ils tissent entre eux. 

Nous regrettons la mort est un roman d'action qui enchaîne les péripéties sans temps mort. En outre, Arnaud Cazelles a ponctué son récit de complots politiques, ce qui ne gâche en rien au plaisir de lecture. C'est également un texte intéressant du point de vue des thèmes traités puisqu'il nous parle de deuil, de vieillissement et de regret. Or, ce n'est pas forcément la panacée des récits de fantasy. Alors, c'est clairement un bon point pour ce livre qui se démarque. Il met également en lumière les relations intergénérationnelles en soulignant l'importance de se nourrir des expériences de ses aïeux car elles sont très formatrices pour tous. 

Pour conclure: 

Entre un imaginaire fertile et une plume travaillée, Arnaud Cazelles s'inscrit de suite dans la nouvelle génération d'auteurs à lire. Avec Nous regrettons la mort, j'ai passé un très bon moment de lecture, alors je ne peux que vous le recommander. Et puis, c'est aussi l'occasion de soutenir une jeune maison d'édition, alors foncez !

Fantasy à la Carte

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Informations

Arnaud Cazelles
Nous regrettons la mort
9782492118067
231 pages
Editions Les Trois Nornes

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