L'influence du "gaming" à la littérature

Google console

accueil2

accueil2

07/10/2018

Nadia Coste, Jivana, éditions ActuSF

Jivana est le dernier roman de Nadia Coste. C'est un livre qui s'inscrit dans le même univers que celui de son cycle des Feydelins. Inconnue pour moi jusque là, je remercie au passage les éditions ActuSF pour m'avoir permis de rentrer dans le petit monde merveilleux de cette autrice. 

Jivana est une Feydelin, autrement dit une petite créature ailée, pas plus grande qu'un insecte. Après une naissance hors-norme qui lui vaut de partager son corps avec l'esprit de la déesse Savironah, tous la traitent comme un être à part. Elle est la fille de Delyndha, personnage déjà présent dans le cycle des Feydelins de Nadia Coste. Première particularité elle a survécu à la traversée du désert effectuée par sa mère alors qu'elle était encore dans sa bulle. Née bien avant les cinq ans réglementaires, elle est précoce et son existence en effraie sans doute plus d'un parmi les siens. D'autant que Savironah qui a raté sa réincarnation vit en elle. Il n'en faut pas plus aux membres de son espèce pour l'isoler. Un jour, une nuée d'insectes qui semble être infinie vient obscurcir le ciel et dissimulée leur Dor les condamnant à une nuit éternelle. Ne supportant pas de rester les bras ballants, Jivana et sa déesse décident donc de partir en quête d'une solution. 

Dans ce livre la quête est mise en exergue comme c'est souvent le cas en jeunesse et fantasy. Ici, il s'agira pour Savironah de retrouver sa place de divinité ainsi que ses pouvoirs, et pour Jivana de se trouver une place bien à elle et de se forger sa propre identité. Car toute la difficulté pour Nadia Coste a été ici de jongler entres ses deux héroïnes qui ont des personnalités bien distinctes tout en ne formant qu'un seul corps. Finalement l'originalité de ce récit réside d'abord dans ce choix d'appréhender l'histoire.

Ensuite l'autre élément remarquable à signaler est bien évidemment l'univers très immersif imaginé par l'autrice. Intégré à son monde des Feydelins, ce livre nous replonge dans l'environnement méconnu et pourtant féerique du petit peuple des herbes et des mares. A la manière de certaines productions cinématographiques comme Fourmiz ou 1001 pattes, Nadia Coste a choisi de mettre aussi en lumière le microcosme de ces petites créatures souvent invisibles à nos yeux d'humains. D'un battement d'ailes nous voici emportés dans l'aventure extraordinaire de cette petite fée aux fausses allures de la célèbre Clochette qui doit trouver le moyen de mettre un terme à cette terrible invasion. Mais vu sa petite taille, on imagine sans mal les mille et uns dangers auxquels elle va devoir faire face. Cela nous promet d'ores et déjà de connaître un ascenseur d'émotions et de lire un récit palpitant. 

Nadia Coste profite de la personnalité et des choix faits par ses héroïnes pour aborder des notions fortes comme la tolérance, l'acceptation de soi, l'indépendance, la liberté de son corps ou encore l'amour au pluriel. Plus qu'un simple récit d'aventures, ce texte est riche d'un message de paix et d'ouverture d'esprit.

Ecrit avec une belle fluidité, ce roman jeunesse n'a donc pas fini de se faire remarquer.

Fantasy à la carte

Informations

Nadia Coste
Jivana
392 pages
978-2-36629-915-1
Editions ActuSF

02/10/2018

Clément Bouhélier, Olangar, Bans et Barricades, partie 2, éditions Critic

Clément Bouhélier, Bans et Barricades, partie 2, 
Olangartome 1, 
éditions Critic

Bien que ma lecture de la première partie d'Olangar remonte à quelques semaines, je n'ai pourtant eu aucune difficulté à me replonger dans l'univers de Clément Bouhélier. C'est la force de ce récit qui distille à doses thérapeutiques le suspense nécessaire pour donner l'envie de continuer cette histoire. Mais avant d'aller plus loin, je vais commencer cette chronique par remercier les éditions Critic pour ce partenariat. 

Dans cette partie, Evyna et Torgend qui ont survécu à l'attaque spectaculaire de leur train perpétrée par des membres de la pègre, débarquent à Frontenac. Là-bas ils espèrent retrouver l'ami d'Andréan d'Enguerrand qui s'était enrôlé avec lui dans l'armée afin d'en savoir plus sur les circonstances de sa mort. Les difficultés vont se multiplier avec des ennemis toujours plus nombreux pour leur barrer la route. Il leur faudra user de tous les subterfuges et faire preuve d'un sang-froid implacable pour vaincre et obtenir les réponses voulues. 
Quant au nain Baldek demeuré à Olangar, il poursuit la lutte avec les siens contre les grands patrons. Leurs petites investigations vont même mettre à mal les élections à la Chancellerie et révéler un complot de grande ampleur. 

La seconde partie de ce diptyque s'annonce dès le départ sous haute tension. Alors que la première n'était là que pour poser ses pions, la seconde, elle, va nous dévoiler toutes les cartouches que l'auteur a mis en jeu. Il faut dire que le secret est le maître-mot de ce roman. Alors on n'attend qu'une chose, c'est de comprendre ce que Clément Bouhélier nous cache avec tant d'implication depuis le début. 

Dans ce livre, on est cernés entre l'enquête menée par cette sœur éplorée, par le combat acharné d'une population qui souhaite améliorer ses conditions de vie et par cet univers incroyable peuplé d'elfes, de nains et d'orcs imaginé par l'auteur. C'est un savant mélange d'authenticité et de fantasy auquel on ne peut pas résister. 

Son roman est l'occasion d'aborder des thématiques fortes comme la tolérance, le racisme ou encore l'envie de domination. Des notions qui nous touchent dans notre quotidien et qui sont traitées ici avec finesse et intelligence. Cela réveille un écho en nous et nous affecte au final très profondément. 

Sorti de sa zone de confort, Clément Bouhélier s'essaye avec brio à ce genre qu'il ne connaissait pas jusque-là et dont il maîtrise pourtant parfaitement les codes aujourd'hui. D'ailleurs Olangar nous le prouve de bien des façons. 
Clément Bouhélier a une manière bien à lui d'amener les éléments de son intrigue. En effet, il donne par exemple de l'importance à chacun de ses personnages mis en scène, même les plus secondaires. On apprend toujours quelques détails sur le pourquoi de leur intervention à ce moment précis de l'histoire. Cela apporte des points de vues différents et influence notre regard sur les héros et cette aventure en général. Au fur et à mesure qu'il déroule la bobine, tout nous est dévoilé. Ainsi, les rouages de cette intrigue implacable se mettent en place et nous laisse juste sans voix. 

Olangar, Bans et Barricades (éditions Critic), c'est un tsunami qui vous laisse sens dessus-dessous, c'est une claque que vous prenez en pleine face. A la manière de ses thrillers, l'auteur nous tient dans le même suspense insoutenable. Avec ce roman, Clément Bouhélier devient l'auteur d'une fantasy que l'on recommande à son prochain. C'est juste une fantasy dont on se languit déjà de retrouver.

Fantasy à la carte

Sur le blog, vous pouvez lire mes avis sur Bans et Barricades, partie 1 et Une Cité en flammes.

Informations

Clément Bouhélier
Bans et Barricades
partie 2
Tome 1
Olangar
Editions Critic

28/09/2018

Bertrand Crapez, L'héritier du roi Arthur, tome 3, Livr'S éditions

Bertrand Crapez, L'Héritier du roi Arthur, tome 3, Livr'S éditions

La sortie du tome 3 de L'héritier du roi Arthur était autant attendu par l'auteur que par ses lecteurs. 

Un an après la lecture du tome 2 qui nous laissait avec bien des questions en suspens, Fantasy à la carte ne cachait plus son impatience d'obtenir toutes les clés de cette intrigue au long court.

Enlevée par Loki lors de la chute de l'Atlantide, Aelyne court un grave danger. Nul ne sait les raisons de cet enlèvement, mais tous se doutent de la gravité des conséquences d'un tel acte. Kadfael ne peut se résoudre à abandonner sa fille entre les griffes de ce dieu fourbe. Ni une ni deux, il s'enrôle avec ses amis Dargo, Merlin et Marwan dans la quête de la sauver. Attachés à leurs pas, ils nous font voyager dans certains des neuf mondes qui forment l'Yddrasil afin de découvrir où Loki se cache et surtout ce qu'il cherche à faire. Plus que de sauver une vie, cette aventure va mettre au jour un vaste complot ourdit par des dieux traîtres et avides. Mais tous grands héros qu'ils sont, seront-ils capables ici de mettre fin à la folie des Dieux? Rien n'est moins sûr car face à une force divine, le courage apparaît comme un simple grain de poussière qui peut vite être balayé. 

Ce troisième tome de L'Héritier du roi Arthur place encore une fois nos héros au cœur de la mêlée. Mais cette fois-ci la charge héroïque promet son lot de morts sanglantes car il ne s'agit pas moins que d'intervenir dans la guerre que les dieux se font. Affaibli le dieu des Dieux, Odin est menacé et trahi par les siens qui lui envient sa place. Comme chacun des romans de cet auteur, une prophétie est à l'origine de ce récit. Ici, on l'a bien compris, elle concerne la succession à la tête du royaume d'Asgard. Elle met clairement en danger Odin et les charognards ne vont pas manquer de sortir du bois pour se jeter sur leur proie. Le titre du roman est suffisamment évocateur pour que l'on se doute qu'un successeur est attendu. La question est de savoir qui sera cet héritier? Les candidats sont nombreux. Et l'enjeu est d'autant plus grand que le mal est à l'oeuvre et il risque d'accoucher du chaos. 

Pour son dernier volet, Bertrand Crapez a cherché à taper fort en faisant courir mille dangers à ses héros. Il les malmène, les blesse, les laisse sur le carreau parfois. Ce roman nous offre sa part de batailles titanesques qui en éclipseraient presque celles menées dans les précédents tomes les faisant passer pour de simples escarmouches. Rompu aux scènes de combat, le récit de Bertrand Crapez prend une tournure de chevauchée fantastique avec toutes ces créatures ailées qu'il met en scène. Le spectacle en ressort grandiose. 

Le troisième opus de L'héritier du roi Arthur met le panthéon scandinave à l'honneur. L'auteur truffe son récit de héros de la mythologie nordique. Il fait souvent référence à certains de leurs hauts faits comme la fameuse partie de pêche de Thor et du géant Hymir. Ici ils se battent aux côtés ou contre le camp du roi de Logres. Il a encore réussi son challenge audacieux de mêler avec talent les vieux mythes à une histoire inédite. 

Ce dernier tome apporte le mot de la fin d'une saga de fantasy bien écrite. Une trilogie qui a permis à une belle plume de sortir de l'ombre. Un auteur qui nous ouvre d'ailleurs la perspective de le retrouver pour un autre cycle arthurien dans les prochains mois. On se réjouit donc d'avance de continuer à lire sa fantasy

Fantasy à la carte
A lire aussi sur le blog mes avis sur les tomes 1 et 2

Bertrand Crapez
L'Héritier du roi Arthur
 tome 3
Livr'S éditions

23/09/2018

Lionel Davoust, Port d'Âmes, éditions Critic

A l'heure d'aujourd'hui, Lionel Davoust est devenu un nom incontournable de la fantasy française. Régulièrement présent aux nombreux festivals du genre, il est impossible de faire l'impasse sur cette plume quand on cherche à faire l'état des lieux de cette littérature. C'est d'ailleurs à l'occasion du festival Cidre et Dragon que Fantasy à la carte a pu le rencontrer. 

Ses romans étant nombreux, il a fallu faire un choix pour commencer à faire connaissance. Le mien s'est arrêté sur Port d'Âmes. En effet il m'a semblé judicieux comme entrée en matière dans l'imaginaire foisonnant de cet auteur. Bien qu'appartenant à un vaste projet d'écriture cherchant à nourrir un univers copieux, Port d'Âmes peut également se lire individuellement. 

D'un simple roman, l'auteur a fait de Port d'Âmes (éditions Critic) une oeuvre magistrale aussi bien du point de vue de sa richesse que de sa subtilité. A travers la trépidante vie d'un jeune noble désargenté, Lionel Davoust nous fait explorer l'incroyable cité franche d'Aniagrad. 

Condamné à huit ans de servitude dans la Marine, Rhuys ap Kaledan débarque contre toute attente à Aniagrad. En vie, plus fringuant que jamais le petit noble devenu le matelot Levant ne rêve que de prendre sa revanche en récupérant son titre de baron et en faisant revivre son domaine. Mais cette ville aussi belle soit-elle n'en demeure pas moins remplie de chausse-trappes. Un retour qui ne sera pas indolore. Au fil des rencontres, il va devoir vite apprendre à jouer sa partition aux notes amères et calculatrices. Car on ne peut survivre en ces lieux sans devenir un bon stratège. Sera-t-il pour autant à la hauteur de son père pour atteindre son but ? 

Lionel Davoust est l'auteur ici d'un roman tout en ambivalence. Tantôt intimiste avec un héros solitaire qui y mène une introspection personnelle grâce à certaines de ses rencontres qui lui ouvrent notamment les yeux et l'amènent à réfléchir. Tantôt de grande envergure à travers cette course menée par le personnage principal pour redorer le blason familial et étancher sa soif de vérité. L'auteur lui-même incarne un peu l'alter-ego de son héros en se faisant parfois poète, parfois intriguant. L'histoire démarre sur une cause noble menée par un protagoniste pétri de bonnes intentions arborant même une grandeur d'âme pour évoluer vers une intrigue menée par un personnage calculateur et froid. 

Un récit qui nous promet de sacrés revirements tout au long du livre. Ainsi, il offre sa dose de suspense de par l’enquête menée par Rhuys tout en délivrant sa part de rêverie poétique grâce au panel de sentiments que va goûter ce héros hors-norme. 

Evanégyre est le challenge incroyable dans lequel cet auteur s'est lancé. Celui d'écrire une série de romans aux intrigues indépendantes mais gravitant dans un monde commun. Un univers coloré et flamboyant qui nous emporte au cœur d'une fantasy fabuleuse. Soutenu par les éditions Critic, Lionel Davoust est l'écrivain français de fantasy à ne pas rater. Son écriture est dotée d'une telle sensibilité et d'un esthétisme qui fait vivre et s'égailler les émotions. Ce qui donne à sa fantasy un autre relief et la met à la portée de tous. 

Fantasy à la carte

Lionel Davoust
Port d'âmes
Editions Critic

17/09/2018

Claire Krust, L'Envolée des Enges, tome 1, éditions ActuSF

L'Envolée des Enges (ActuSF) est la première partie d'un diptyque qui rehausse d'une touche d'originalité cette rentrée littéraire 2018 de la fantasy chez Les Indés de l'Imaginaire. Après un premier essai réussi, Claire Krust a repris sa plume pour nous transporter à nouveau en terres imaginaires peuplées de créatures fantastiques. Cependant point d'univers japonisant comme dans son roman, Les Neiges de l’Éternel, L'Envolée des Enges propose plutôt un monde médiéval riche et dépaysant. 

Ce premier volet se divise en deux parties. La première s'ouvre sur Céléno, une Enge adolescente rejetée par les siens qui vit en marge des autres jusqu'au jour où l'impensable survient. Le pilier sur lequel vit sa communauté d'Enges est attaqué par des hommes. Trop tournés vers le ciel, ils n'ont pas vu venir le coup. Beaucoup sont tués et quelques-uns sont faits prisonniers. Céléno, elle, a profité de la confusion ambiante pour s'emparer des ailes d'un autre Enge en passant à travers sa toile. C'est ainsi qu'elle se retrouve seule, désorientée au pied de son pilier, projetée dans le monde cruel des hommes. Elle va croiser la route d'un Être de l'eau qui va la protéger et l'aider dans sa quête de vengeance. Car un tel crime ne peut rester impuni. D'autant plus qu'il y a des Enges à sauver. La seconde partie, quant à elle, se déroule vingt ans plus tard et se concentre sur Arhan, un jeune servant travaillant comme apprenti-artificier dans l'espoir de racheter sa dette et de retrouver sa liberté. Une situation inconfortable qui le pousse à commettre quelques illégalités afin de se faire de l'argent sous le manteau. Des activités qui vont le mettre en fâcheuse posture tout en lui permettant de faire des découvertes sur lui-même. 

Plusieurs destins sont en jeu dans ce récit. Sauront-ils pour autant capables de trouver la voie de la communication pour vaincre l’adversité qui se dresse devant eux? 

Voici un grand roman de fantasy porté par des personnages forts, auréolés de lourds destins. Des héros en demi-teinte qui cachent une obscurité intérieure, fruit de leur triste passé. Difficile de se faire une place dans une société froide et égoïste sans écorcher son âme et prendre quelques vies au passage. Mais le jeu n'en vaut-il pas la chandelle ? Car se donner pour mission de sauver tout un peuple, n'y a-t-il pas de cause plus noble ? 

L'Envolée des Enges donne la parole aux enfants d'Hélias parmi lesquels on distingue trois races: les Elbes, les Êtres de l'eau et les Enges. Tous disposent de pouvoirs qui atteignent leur pleine maturité à l'âge adulte et leur confèrent une belle longévité. Face à eux, il y a les hommes qui voient leur nombre grossir d'année en année au point d'éclipser les autres races. Claire Krust se sert de son livre pour explorer le cheminement mené par les uns et les autres, s'avérant uniquement motivés par leurs intérêts personnels. En jouant sur différents points de vues, l'autrice chamboule perpétuellement l'avis que les lecteurs se font de son histoire. Elle signe un récit à plusieurs sens et offre une réflexion approfondie sur les comportements humains et non-humains. Finalement la finalité en est la même. Rien n'est ni blanc ni noir, ici ou ailleurs. Mais tout n'est pas dit avec ce premier tome. L'Affaire est donc à suivre avec la seconde partie à venir de ce beau diptyque qui stimule bien la fantasy française. 

Avec une intrigue aussi passionnante, L'Envolée des Enges promet de faire un carton pour cette rentrée des éditions ActuSF. 

Fantasy à la carte
A lire sur le blog, mon avis sur le tome 2, Les Secrets d'Eole

Informations

Claire Krust
L'Envolée des Enges, tome 1
488 pages
978-2-36629-903-8
Editions ActuSF