Après s'être essayé avec talent à la nouvelle en terminant notamment lauréat du prix Imaginales de la nouvelle 2022 pour "Ventraille" parue dans l'anthologie Férocité, Edouard H. Blaes a poursuivi l'aventure en tentant un format plus long. C'est ainsi qu'on le retrouve en ce mois de février publié, dans le cadre des pépites de l'Imaginaire, chez ActuSF.
Lu dans le cadre d'un partenariat avec les éditions ActuSF, je remercie Jérôme Vincent pour l'envoi de ce service de presse.
Résumé :
A Tinkleham, la vie s'écoule au rythme des carillons qui protègent la communauté des brumes. On y retrouve Ermeline Mainterre, fille d'un ingénieur automobile qui vit dans le garage familial avec son père et son frère. Son rêve secret est d'intégrer le beffroi pour y devenir mage. Elle s'entraîne depuis des années et maîtrise déjà quelques tours. Or, justement elle vient de recevoir la lettre d'acceptation pour y être formée. Pour autant, son père acceptera-t-il de la laisser partir ? Et si oui, réalisera-t-elle ses rêves ?
Mon avis :
Le Silence des Carillons nous immerge dans un univers de fantasy teinté de notes postapocalyptiques. En effet, le récit prend cadre dans la cité de Tinkleham dominée par un beffroi dont les carillons constituent une protection face à la menace de la brume. Celle-ci étant infestée de spectres, le son des carillons porté par le chant des mages, s'imprègne d'un pouvoir capable d'éloigner les ténèbres. Le beffroi incarne ici la puissance ésotérique qui sert à la fois de catalyseur et d'école pour former les futurs mages. C'est un lieu qui inspire autant le mystère que la crainte car nul ne sait réellement ce qu'il s'y passe. Beaucoup s'essayent en conjectures mais finalement seuls les élèves qui y séjournent peuvent en témoigner, à l'image d'Ermeline Mainterre. C'est d'ailleurs, à travers elle que l'on découvre cet endroit insolite dont l'intérieur se révèle être le fruit d'un empilement de créations d'univers par les différents magistères œuvrant entre ces murs. Baroque et déconcertant, voilà comment on peut qualifier ce beffroi. En outre, l'existence de cette brume d'où jaillissent des spectres ajoute une sensation d'oppression à l'ambiance.
Suite à une surexploitation de la terre par les précédentes générations, le soleil a disparu, éclipsé par ce brouillard permanent qui maintient les gens dans une forme de ténèbres. Edouard H. Blaes met en scène une humanité repliée sur elle-même et isolée car enfermée par une brume dont elle ignore la cause. Mais, les humains ne sont pas les seuls à peupler cette cité puisque l'auteur y a inclus des gigants et des miniards pour ajouter un peu de diversité à sa population. L'univers n'en est que plus foisonnant et questionnant. Dommage, qu'Edouard H. Blaes n'est pas creusé davantage certains éléments comme l'origine de ces spectres car il y a matière à explorer selon moi et cela ne sera pas sans susciter une certaine frustration chez ses lecteurs.
Il n'en demeure pas moins que Le Silence des Carillons demeure un récit intéressant qui n'hésite pas à interroger, notamment, notre société sur sa problématique écologique et les conséquences irréversibles de son inaction. Sans parler de l'analyse fine que l'auteur réalise à travers la psychologie de ses protagonistes. En les plaçant devant des situations délicates face à des choix cornéliens, il souhaite démontrer que même animés des meilleures attentions, l'innommable peut être commis au nom d'un intérêt que l'on croit supérieur. En ce sens, ses personnages ne sont ni blancs ni noirs mais plutôt gris. Ils doivent faire avec leurs forces et leurs faiblesses pour se réaliser chacun à leur tour. Aussi, la narratrice de cette histoire, Ermeline Mainterre, est une jeune fille complexe. Déterminée à rester dans les mémoires, elle va emprunter des chemins tortueux, pas toujours dénués de colère, et souvent dépassée par l'ampleur des évènements. Pour autant, la fin justifie-t-elle les moyens ? Telle est la réflexion à laquelle elle se heurte au cours de ce récit.
Pour un premier roman, Edouard H. Blaes fait montre d'un imaginaire fécond et habile qui s'exprime autant dans la construction minutieuse d'un univers original que dans l'élaboration d'une intrigue bien ficelée dont on ne rêve que d'en comprendre tous les tenants et les aboutissants, à peine le livre entamé.
En conclusion :
Pari réussi pour ce jeune auteur qui nous embarque sans mal dans cette nouvelle histoire au long cours. Rendez-vous en librairie, le 22 février prochain, pour le lire à votre tour.
Fantasy à la Carte
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