L'influence du "gaming" à la littérature

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05/07/2024

Raphaël Bardas, Les Fourneaux de Crachemort, éditions Mnémos

Raphaël Bardas, Les Fourneaux de Crachemort, éditions Mnémos 

Après Les Chevaliers du Tintamarre et Le Voyage des Âmes Cabossées, Raphaël Bardas revient en librairie avec une aventure culinaire haute en couleurs. 

Ayant pas mal ri à ses deux premiers romans, je ne pouvais clairement pas faire l'impasse sur ce troisième. 

Résumé :

Suite à un cambriolage qui a mal tourné, Catane, Fauve, Marcello et Mwandishé n'ont pas d'autre choix que d'aller se mettre au vert pour se faire oublier. C'est ainsi que les quatre amis prennent la route et survivre en amusant le tout venant par des spectacles théâtrales et en les régalant de petits plats mijotés. Mais pourront-ils échapper longtemps aux puissances qu'ils ont dérangées ?

Mon avis :

Avec Les Fourneaux de Crachemort, Raphaël Bardas continue l'exploration de l'univers de fantasy dont il avait initié les bases dans ses deux romans précédents. Autres lieux et personnages différents entre ces lignes car on quitte Morguepierre pour Brillanza. 

En outre, l'auteur y introduit des artefacts composés d'un masque de scène, d'une plume, d'une épée et d'un manteau d'hiver qu'il met entre les mains de ses protagonistes. Ces objets à caractère magique donne à ce texte toute sa saveur onirique d'autant qu'ils suscitent l'intérêt de la sorcière de Crachemort dont l'ombre menaçante plane tout du long sur le destin des héros de cette histoire. En effet, alors qu'ils pensaient échapper à leur sentence pour avoir commis ce méfait, les quatre amis se retrouvent persécutés par cette âme maléfique dont on ne sait pas grand chose si ce n'est qu'elle a lancé ses hordes à leurs trousses. 

Qu'elles sortent du bestiaire merveilleux sous une forme retravaillée ou directement de l'imaginaire débridée de l'auteur, bien des créatures s'égaillent entre ces pages pour enchanter notre lecture car il faut bien dire que l'on rencontre de drôles de zouaves par ici. C'est tout le charme de la plume de Raphaël Bardas qui nous entraîne toujours dans des péripéties impossibles à la rencontre d'êtres surprenants. 

Ce livre est une ode à la bonne chère et au théâtre. De représentation en représentation, les personnages nous embarquent dans une folle sarabande pour tenter d'échapper à leur passé et se réaliser par eux-mêmes. 

Les Fourneaux de Crachemort s'avère donc être un récit d'apprentissage pour chacun d'entre eux car ils s'y cherchent et souhaitent se tracer leur propre chemin et non celui décidé par leurs parents comme c'est le cas pour Catane qui refuse de se soumettre au mariage choisi par son père.

Raphaël Bardas y entremêle les histoires personnelles de ses protagonistes à une aventure épique dans laquelle il instille des clins d'œil à des grands noms du théâtre ou à des œuvres littéraires. Sa plume se fait ainsi la complice des lecteurs, tantôt drôle tantôt grave tout en les maintenant dans un suspense latent face à la finalité incertaine qu'il a réservée. 

30/06/2024

Jean-Philippe Jaworski, Les Fauteurs d'ordre, collection Lunes d'encre, éditions Denoël

Jean-Philippe Jaworski, Les Fauteurs d'ordre, collection Lunes d'encre, éditions Denoël

Grande figure de l'Imaginaire, Jean-Philippe Jaworski ne cesse de nous éblouir avec sa plume toujours très travaillée. 

Après ses séries à succès Gagner la Guerre, Le Chevalier aux épines ou encore Rois du monde, il est de retour aujourd'hui avec un texte court et engagé.

En effet, à l'aune des évènements politiques qui traversent le pays, il ne pouvait garder le silence.

Ainsi, pour faire écho à la tribune en faveur du Front Populaire, signée par les acteurs des littératures de l'Imaginaire, il nous a concocté une petite histoire nous rappelant que les heures sombres ne sont jamais loin. 

Lu dans le cadre d'un partenariat avec les éditions Denoël, je les remercie pour la proposition de ce service de presse. 

Résumé :

Suite à un renversement de pouvoir, Azurée Capitolina a pris les commandes. A son service, quelques éléments zélés dont le conseiller Praetor fait partie. Epuration et traque des opposants remplissent son quotidien. Il s'y attelle même avec une grande efficacité. Seulement la rivalité est de mise au milieu de ce panier de crabes et sa position si belle soit-elle, elle pourrait vite devenir inconfortable, qui sait !

Mon avis :

Les Fauteurs d'ordre est un conte sombre qui nous immerge dans une période trouble suite à un coup d'Etat. La lassitude populaire vis à vis des promesses politiques non tenues fait clairement le lit des extrêmes. En effet, il n'est pas possible de qualifier autrement toute action visant à faire taire l'opposition ou à user de purges pour effacer la diversité. 

21/06/2024

Chris Vuklisevic, Du thé pour les fantômes, collection Lunes d'Encre, éditions Denoël

Chris Vuklisevic, Du thé pour les fantômes, collection Lunes d'encre, éditions Denoël

Sacré Grand Prix de l'Imaginaire et prix des Imaginales 2024, Du thé pour les fantômes a fait son chemin dans le cœur des lecteurs qu'ils fassent, d'ailleurs, partis d'un jury littéraire ou non.

Mais ce roman n'est pas le premier de Chris Vuklisevic puisqu'elle a auparavant signée un postapocalyptique, Derniers jours d'un monde oublié, publié chez Folio SF et elle a également écrit sous le pseudonyme d'Ada Vivalda, une romantasy intitulée Porcelaine sous les ruines et publiée par les éditions Olympe. 

Lu dans le cadre d'un partenariat avec les éditions Denoël, je les remercie pour l'envoi de ce service de presse. 

Résumé :

Après le décès de leur mère, Félicité n'a qu'une obsession, celle de retrouver son fantôme. Facile pour cette passeuse de fantômes - me direz-vous - puisqu'elle possède naturellement le don de les voir et de communiquer avec eux. Pourtant celui de sa mère demeure introuvable. Mais Félicité est une obstinée, elle a même prévenu sa sœur qu'elle n'a pas revu depuis trente ans. Néanmoins elle n'est pas sûre que leurs retrouvailles se passent bien. Le temps lui dira vite si elle a bien fait, en attendant elle se demande toujours si elle arrivera à mener sa quête au bout ?

Mon avis :

Du thé pour les fantômes est une fantasy urbaine qui emprunte au conte pour réenchanter notre monde par un merveilleux baroque. L'univers est particulièrement original car il confère au thé une magie permettant d'interagir avec les morts pour peu que l'on maîtrise l'art de sa préparation ainsi que de sa récolte. Sous la plume de Chris Vuklisevic, les théières s'animent, s'entêtent et prennent parfois la poudre d'escampette. Elles sont indispensables à la préparation de ces étranges-thés car c'est ainsi que s'appellent ces thés aux propriétés magiques. Ils ont la particularité d'ancrer les fantômes dans le réel et facilitent l'interaction avec eux si l'on a bien évidement le don de les voir. A ces breuvages chimériques s'ajoutent l'utilisation d'objets phantopréhensibles nécessaires pour capter l'attention des esprits et obtenir d'eux les réponses aux questions posées.

En outre, pour nourrir son univers, Chris Vuklisevic trouve aussi son inspiration dans les contes en réinjectant dans son récit quelques éléments notables comme, par exemple, cette malédiction de cracher des insectes dès que l'on ouvre la bouche.

L'autrice a pris le parti de s'appuyer sur deux sœurs pour porter son histoire. L'une est passeuse de fantômes et l'autre est considérée comme une sorcière. Leurs singularités, ils la doivent à leur mère qui elle-même disposait de certains pouvoirs la connectant aux éléments et présente également une longue longévité. 

Le texte dégage un onirisme diffus qui s'accorde avec justesse à notre réalité. Le charme prend d'autant plus que la plume est bien travaillée tantôt poétique tantôt mélancolique, pour nous livrer un récit d'une grande profondeur. 

18/06/2024

Alex Nikolavitch, Trois coracles cinglaient vers le couchant, éditions Les Moutons électriques

Alex Nikolavitch, Trois coracles cinglaient vers le couchant
éditions Les Moutons électriques 

Alors qu'Alex Nikolavitch vient de mettre un point final à son cycle arthurien et après avoir lu et grandement apprécié L'ancelot avançait en armes puis Le garçon avait grandi en un gast pays, je me suis dit qu'il était plus que temps de sortir le premier volet de ma PAL pour enfin le lire avant de refermer à mon tour la porte sur cette belle réécriture. 

Me voici donc avec Trois coracles cinglaient vers le couchant entre les mains et sans surprise, c'est Uther qui y tient le premier rôle.

En effet, quoi de mieux que de remonter aux origines pour mieux comprendre et apprécier le mythe.

Résumé :

Sur la suggestion d'un étrange barde prénommé Cynddylan, Uther embarque avec lui quelques hommes sur trois coracles vers une destination inconnue. Cette expédition au fil de l'eau est l'occasion pour lui de se remémorer ses souvenirs et son passé guerrier marqué par des victoires et des défaites pour repousser l'envahisseur. Arrivé à un tournant de sa vie, trouvera-t-il un nouveau sens à lui donner ? 

Mon avis :

On ne peut pas parler du mythe arthurien sans revenir sur ses origines. C'est la raison pour laquelle Alex Nikolavitch ouvre le bal avec un portrait d'Uther Pendragon. Guerrier et meneur d'hommes, il prend la suite de son père pour bouter hors de la Bretagne les Saxons, les Jutes et les Angles qui n'ont de cesse d'envahir son île.  Ainsi, l'auteur a tissé son récit des Trois coracles cinglaient vers le couchant autour des luttes menées par ce chef de clan et égrenées par ses victoires et ses défaites. 

Dans son roman, Alex Nikolavitch s'est emparé de ses faits d'armes car ils ont façonné l'histoire de la Bretagne et apparaissent, de facto, comme le parfait écrin pour accueillir sa réécriture. Ainsi, il s'est réapproprié les éléments notables du mythe comme l'assistance d'un célèbre mage, l'usage d'un subterfuge pour pousser une femme à l'infidélité ou encore l'acquisition d'une épée prodigieuse. Ils sont les repères pour éclairer le chemin des lecteurs se plongeant dans cette histoire universelle. 

Au fil des pages, on va partager le quotidien et les souvenirs d'Uther. On goûte également à son introspection personnelle le menant sur une voie empreint de magie. 

En effet, il ne peut être question du mythe arthurien sans évoquer le merveilleux qui l'entoure. Déjà, il est fait mention du don de double vue qui permet à Uther de percevoir l'invisible. Ensuite, en s'embarquant sur les flots, il va non seulement donner une nouvelle impulsion à sa destinée mais aussi rencontrer ses dieux. C'est la porte d'entrée choisie par l'auteur pour introduire le peuple féérique qui accompagne les hommes dans le façonnage de leur légende. Pour Uther, le représentant le plus prégnant entre ces lignes est bien entendu Cynddylan qui n'est autre que Merlin. Dans ce premier volet, Alex Nikolavitch nous en livre une réinterprétation très sombre. Il est une créature surnaturelle insaisissable et mystérieuse dont il est difficile de connaître les pensées et de comprendre les actes. Sa présence instille au texte toute la dimension folklorique propre au mythe et lui donne même une aura envoûtante. Bien que la magie soit résiduelle, davantage suggérée qu'explosive, l'enchantement, lui, est total car la plume d'Alex Nikolavitch est habile pour redonner vie à certains épisodes des légendes arthuriennes et nous entraîner dans un voyage teinté de nostalgie. 

14/06/2024

Alex Nikolavitch, Le garçon avait grandi en un gast pays, éditions Les Moutons électriques

Alex Nikolavitch, Le Garçon avait grandi en un gast pays
éditions Les Moutons électriques 

Après Trois coracles cinglaient vers le couchant et L'ancelot avançait en armes, Alex Nikolavitch est de retour avec Le garçon avait grandi en un gast pays pour conclure son triptyque arthurien.

Lu dans le cadre d'un partenariat avec Les Moutons électriques, je remercie Maxime pour l'envoi de ce service de presse.

Résumé :

Elevé en plein cœur de la forêt et à l'écart des autres par sa mère, Perceval décide un jour de s'enfuir pour découvrir le monde. Chemin faisant, le jeune homme multiplie les rencontres, notamment de chevaliers sans connaître leur identité ni leur historique au sein de la cour qui vont le pousser dans des quêtes le rapprochant peu à peu du roi et de la bataille finale. Comment s'en sortira-t-il ?

Mon avis :

C'est donc toujours avec le même pas de côté qu'Alex Nikolavitch nous replonge dans les légendes arthuriennes en mettant en lumière un destin en particulier. Ici, il a porté son dévolu sur Perceval en débutant son récit au sein des bois où il grandit dans l'ignorance de ses origines et des événements décisifs de son époque. 

L'auteur est donc parti du même postulat de départ que le mythe à travers cette enfance esseulée et sa rencontre cruciale avec certains des chevaliers de la Table Ronde. Néanmoins, passés ces éléments, on rentre de plein pied dans la réécriture puisqu'Alex Nikolavitch n'envoie pas directement Perceval à la cour du roi Arthur s'illustrer dans des hauts faits, mais choisit plutôt de l'entraîner dans des pérégrinations qui vont l'aider à apprivoiser son environnement, à murir et à trouver sa place dans le monde. En cela, Le garçon avait grandi en un gast pays est une véritable ballade  dans laquelle on rencontre des figures légendaires, à l'image de Karadoc, un fidèle d'Uther qui finira par accepter la prise de pouvoir d'Arthur en devenant à son tour l'un de ses alliés. Ici, il prend les traits d'un mentor pour le jeune Perceval en l'aiguillonnant à emprunter un chemin héroïque. Mais les plus notables apparitions demeurent Gawain et L'ancelot qui l'accompagnent dans l'écriture de sa destinée car certaines de ses actions sont motivées sur la suggestion de l'un ou de l'autre. 

C'est également comme cela que les portes de la féérie lui sont ouvertes et qu'il va participer à des missions teintées d'onirisme. La magie imprègne pleinement les pages de ce roman et s'exprime au travers d'entrevues surnaturelles. Ainsi, la fée Morgane intervient tout naturellement à plusieurs reprises dans ce récit puisqu'elle est intimement liée au trépas du roi. Il est à noter, le choix orthographique privilégié par Alex Nikolavitch, "Morrigane" faisant directement référence à l'une des trois déesses guerrières des Tuatha Dé Danann puisque c'est exactement ce que la sœur d'Arthur incarne ici.