Nul besoin de présenter Aurélie Wellenstein entre ces lignes tant les romans de cette autrice sont toujours très appréciés ici. Or, cela tombe bien, son nouveau livre est paru cet automne chez Outrefleuve. Il s'agit de La Harpiste des terres rouges qui nous entraine cette fois-ci à la conquête de l'Ouest.
Lu dans le cadre d'un partenariat avec les éditions Fleuve, je remercie Estelle Revelant pour l'envoi de ce service de presse.
Résumé :
Alors qu'Abraham est au chevet de sa mère qui vit ses derniers instants, la lettre d'une femme donnant des nouvelles de son frère, parti dans l'Ouest il y a longtemps, est arrivée au domaine des Kessel. Celui-ci serait le prisonnier d'un drôle d'endroit, à moins qu'il ne soit déjà mort. Bien qu'il demeure sans certitudes, Abraham décide de s'embarquer dans ce voyage peut-être sans retour mais avec l'espoir ténu de retrouver Jarod et de le sauver, qui sait !
Mon avis :
Dans La Harpiste des terres rouges, Aurélie Wellenstein nous entraîne à nouveau dans un univers singulier et horrifique. Cette fois-ci, elle a pris pour décor l'ouest américain, ses immensités arides, ses saloons ou encore ses pistoleros à la gâchette sensible qu'elle accommode à un merveilleux monstrueux fort original.
C'est tout le talent de cette plume qui explore des imaginaires toujours très surprenants. Ainsi, au cœur de cet Ouest sauvage existe un lieu sinistre qui fascine autant qu'il terrifie. Il s'agit de Symphonie, un territoire secret, une geôle pour les âmes égarées tombées dans les rets de la Harpiste. Cette énigmatique créature incarne le mal que les plus téméraires ou les plus fous cherchent à abattre. Son nom est sur toutes les lèvres, son ombre plane sur ce monde tourmenté. Et pourtant elle semble inaccessible. Silhouette de femme avec une tête de harpe, elle soulève des armées pour se tenir hors de portée et protéger ainsi son territoire. Son existence nourrit les légendes les plus folles mais nul ne peut se targuer de l'avoir approché sans tomber en esclavage. Même en étant greffé et disposant donc d'un certain pouvoir, rien ne prouve que l'affrontement sera triomphant.
La magie qui coule entre ces pages repose donc sur la réussite des greffes qui changent à jamais les receveurs, soit en les tuant suite à un rejet, soit en les rendant plus fort tout en les modifiant profondément dans leur chair. C'est une magie qui flirte avec une expérimentation scientifique glauque et non maîtrisée. En effet, les chances de réussite sont minces et les revers sont violents. Le prix à payer pour devenir un humain augmenté et posséder cette puissance tant désirée est grand. Certains le font par choix mais beaucoup y sont contraints. Aussi au fil des chapitres, on croise aussi bien des humains avec des instruments de musique ou des armes greffés à la place des membres quand ce n'est carrément pas des extensions animales ou végétales comme par exemple une mâchoire de grand félin. Clairement, Aurélie Wellenstein a emprunté à l'ambiance du freak show pour nourrir son monde d'une aura d'étrangeté et de frissons.
Un emprunt qui lui permet d'explorer une thématique récurrente dans ses textes, à savoir la monstruosité. Elle aime confronter les humains à leur part d'ombre. Celle-ci est bien souvent dissimulée sous une apparence trompeuse. C'est tout le questionnement de l'autrice qui tourne autour de la figure du monstre, à travers le jugement hâtif souvent fait vis-à-vis de la différence.
Elle en profite également pour s'intéresser aux relations familiales et parler de violences conjugales. Son texte est une nouvelle fois très engagé à propos de la protection de la nature et du respect dû à la faune et à la flore. Elle évoque beaucoup la maltraitance animale, un sujet qui lui tient à cœur. Ici, il s'agit de dénoncer l'exploitation des chevaux ainsi que le traitement réservé aux mustangs, ces montures sauvages capturées et exploitées.
Le récit dégage une réelle émotion forte portée par sa communauté de personnages. Si l'on prend Abraham dans sa volonté farouche de retrouver son frère au détriment de sa propre survie ou l'abnégation d'Amy qui fait fi de ses plus grandes terreurs pour accompagner celle qu'elle considère comme sa seule famille dans une dangereuse mais néanmoins nécessaire quête.
Dans son roman, Aurélie Wellenstein s'est attelée à nous brosser le portrait de protagonistes à vif tous plus attachants les uns que les autres.
Pour conclure :
Avec La Harpistes des terres rouges, elle signe une fantasy âpre au goût de poudre qui nous transporte au cœur d'un ouest féroce et impitoyable. Elle revisite avec talent ce Far West cinématographique et nous en livre une fresque incroyable. Alors, vous reprendriez bien un peu d'Aurélie Wellenstein, non ?
Fantasy à la Carte
A lire sur le blog, mes avis sur Mers Mortes, Le Dieu Oiseau, Le Désert des Couleurs, Les Loups Chantants et les tomes 1 et 2 de L'Epée, la Famine et la Peste.
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