L'influence du "gaming" à la littérature

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26/10/2022

Gwen Geddes, Le Cauchemar de Mortimer Sax, éditions 1115

Gwen Geddes, Le Cauchemar de Mortimer Sax, éditions 1115

Fascinée par le fantastique et sensible aux textes de H.P. Lovecraft et d'Edgar Allan Poe, Gwen Geddes s'est donc naturellement tournée vers l'écriture d'histoires étranges. 

Après Jack in the box, elle signe avec Le Cauchemar de Mortimer Sax, une autre novella aux éditions 1115. 

Lu dans le cadre d'un partenariat avec les éditions 1115, je les remercie pour l'envoi surprise de ce service de presse qui me donne l'occasion de découvrir cette signature de l'Imaginaire. 

Fraîchement débarqué au Kraft, Mortimer Sax compte bien s'illustrer comme prestidigitateur. Si dans sa vie personnelle, Mortimer est un homme réservé et peu sûr de lui, lorsqu'il monte sur les planches, c'est un tout autre homme qui fait face au public. Admirateur du célèbre illusionniste Balthazar, Mortimer rêve d'égaler son idole. Or, une étrange découverte faite dans sa chambre, celle-la même qu'occupait le grand Balthazar en son temps, va lui offrir une opportunité difficilement refusable. Mais peut-il réaliser son rêve à n'importe quel prix ? 

Dans Le Cauchemar de Mortimer Sax, Gwen Geddes nous ouvre les portes du monde mystérieux du cabaret où règnent illusions, paillette et magie. Aussi, le Kraft nous apparaît comme le cadre d'action idéal pour laisser filtrer cette histoire brouillant la frontière entre chimère et réalité. 

Au fil des pages de cette novella, on pénètre lentement dans un fantastique qui se teinte progressivement de notes horrifiques. En effet, en quelques lignes, l'autrice pose une ambiance inquiétante et intrigante qui se manifeste notamment par cette entité maléfique dont l'ombre plane sur le narrateur. Or, en soulevant bien des questions quant à son origine et ses motivations, son existence captive le lecteur qui ne demande qu'à voir lever le voile de mystère entourant cette entité. Des auteurs qui ont marqué la littérature du XIXe siècle, j'y vois dans ce texte quelques clins d’œil, notamment au Frankenstein ou le Prométhée moderne de Mary Shelley. Quelque part, cette novella est un hommage au fantastique dans sa dimension originelle. 

A travers son personnage principal, Gwen Geddes revisite la figure de l'antihéros car par sa timidité presque maladive et sa réserve naturelle, Mortimer Sax n'incarne pas vraiment l'image du magicien qui assure le show. Or justement, ici, il est intéressant de suivre l'évolution que l'autrice va lui donner. En effet, en même temps qu'il prend confiance en lui, il prend une véritable épaisseur et s'impose peu à peu à l'histoire comme au spectacle. Ce pouvoir qui lui est conféré au début de l'aventure va le transfigurer sans pour autant l'aveugler complètement. Malgré son désir de faire ses preuves, de plaire aux autres et notamment à la gente féminine ou de ressembler à son idole, Mortimer a un sursaut de conscience lorsque la situation va l'exiger.  

22/10/2022

Louise Roullier, Grain de Sable, éditions Critic

Louise Roullier, Grain de Sable, éditions Critic

Passionnée par la mythologie grecque, Louise Roullier aime s'en inspirer pour habiller ses récits d'un cadre antique. Déjà l'autrice de trois romans et de quelques nouvelles, elle rejoint aujourd'hui le catalogue des éditions Critic avec son titre Grain de Sable

Heureux hasard du calendrier éditorial, cette sortie coïncide avec le Mois de l'Imaginaire qui se fait donc chez Critic sous les auspices d'un récit de fantasy haletant. 

Lu dans le cadre d'un partenariat avec les éditions Critic, je remercie Eric Marcelin pour l'envoi de ce service de presse.

Quinze ans après la disparition de son père, le célèbre mage Cobal Galtès, Lidia et sa famille continuent de souffrir de la situation. Sa mère s'enfonce toujours un peu plus dans la dépression et son frère Jaume est irascible et caractériel. Or, par manque de moyens, Jaume ne peut intégrer l'Osterie pour faire carrière dans l'armée provoquant chez lui une énorme colère et le conduisant à un coup d'éclat où il trouve la mort. Ne pouvant supporter la perte de son mari et de son fils, Dulce met fin à ses jours, plongeant Lidia dans une terrible détresse. Abandonnée à elle-même, écrasée par le chagrin, elle décide de trouver le moyen pour remonter le temps et réécrire l'histoire afin de faire revivre les siens et de ne plus être seule. Seulement, elle ignore encore qu'une force inconnue va tout faire pour qu'elle échoue. Alors arrivera-t-elle à mettre en échec cet adversaire invisible ?

Grain de Sable nous immerge dans un univers de fantasy dominé par les mages dont la grandeur du pouvoir atteste de leur influence sur la cité. Ainsi, ces enchanteurs et ces enchanteresses ont la capacité de lancer des sorts grâce à des mots de pouvoir énoncés oralement ou inscrits sur des morceaux de papier. Ils incarnent donc les puissants de ce monde. Or, la tradition veut que tous les cinq ans, les meilleurs mages de l'alliance unissant les pays du Nord s'affrontent lors du tournoi des 7 oriflammes. Une compétition qui emprunte clairement au modèle des jeux de la Rome Antique où se succédaient courses équestres, courses de chars et combats de gladiateurs. Ces derniers se trouvent substitués sous la plume de Louise Roullier par des magiciens qui viennent ici assurer le spectacle. En outre, cette influence gréco-romaine se retrouve également dans l'architecture et le parcellaire des différentes cités qui servent de cadre d'action au récit.  

Dans Grain de Sable, l'autrice entoure la magie de mythes et de légendes auxquels son personnage principal va devoir se confronter en faisant notamment face à de puissants sorciers, des goules, des êtres chimériques ou encore des nymphes déchues. 

Grain de Sable, c'est le récit d'un contre-la-montre dans laquelle l’héroïne de Louise Roullier s'engage pour sauver son père et par la même occasion le reste de sa famille. Aussi, au fil des pages, elle n'aura de cesse de remonter le temps pour réécrire l'histoire afin d'en modifier les conséquences. Le rythme y est nerveux et la lecture prenante, d'autant que l'autrice y a adjoint une dimension conspirationniste nécessaire à certains afin de renverser l'échiquier politique. 

18/10/2022

Chloé Chevalier, La Sans-Etoiles, tome 1, Loin des Îles Mauves, collection R, éditions Robert Laffont

Chloé Chevalier, La Sans-Etoiles, tome 1, Loin des îles mauves
collection R, 
éditions Robert Laffont

Autrice des Récits du Demi-Loup, dont le premier volet, Véridienne, avait marqué la rentrée de la fantasy 2015 des Indés de l'Imaginaire, Chloé Chevalier a repris sa plume pour nous emporter dans une nouvelle saga de fantasy, publiée, cette fois-ci, chez Robert Laffont. 

Lu dans le cadre d'un partenariat avec Collection R, je les remercie pour l'envoi de ce service de presse. 

Dans les îles mauves, une partie du peuple des Bruyères est contrainte de dissimuler leur genre en bandant leurs seins afin de se prémunir de la concupiscence des Leifa : le peuple dominant de ces îles. On les appelle les héros. D'ailleurs, Yvanel, Véli et Granite en font partie. Pourtant en dépit de leurs différences, lorsqu'un danger menace leur archipel, ils sont capables de s'entendre pour trouver une solution, à l'image d'Yvanel, de Granite, de Véli et de Mirja qui embarquent avec Manik et Peiders à bord d'un voilier. Leur but étant de comprendre l'ennemi, à savoir l'empire et peut-être de trouver un terrain d'entente. Une mission bien téméraire pour des jeunes gens qui n'ont jamais quitté leur terre natale. 

Dans Loin des îles mauves, Chloé Chevalier a imaginé un archipel d'îles boréales dont l'existence relève de la légende aux yeux du reste du monde. Deux peuples y vivent, celui des femmes qui demeurent dans des grottes sous les bruyères et celui des Leifa, des hommes à la carrure impressionnante. Ils y sont régis par des lois strictes imposant des rencontres limitées et réglementées. Ainsi, les femmes qui n'endossent pas le rôle de héros sont assujetties à porter des enfants et à remettre aux hommes, le cas échéant, un enfant de sexe masculin. Par-delà ces îlots, c'est le règne de l'inconnu où s'étendent les terres de l'empire. L'ombre de celui-ci plane comme une menace sur la survie des îles mauves à cause de leur pêche agressive des baleines, réduisant drastiquement la subsistance des îliens. Voici un monde dont on ne sait que peu de choses si ce n'est qu'il enferme les gens dans un carcan social pesant comme en prennent conscience les protagonistes lorsqu'ils s'en éloignent. 

La Sans-Etoiles nous conte l'épopée d'une poignée de jeunes gens qui s'embarquent dans une aventure à l'assaut du monde. Bravant leurs craintes, les voilà qui narguent leur destin tracé d'avance pour explorer des lieux étrangers, se confronter à l'inattendu et apprendre à s'accepter. Derrière la mission louable d'assurer un avenir aux îles mauves, pour chacun d'entre eux, c'est aussi une quête d'identité quant à l'adulte qu'ils souhaitent devenir. Cette expédition marque un vrai bouleversement car elle pousse certains héros à mener une introspection intérieure qui vient questionner leur féminité ou leur masculinité. 

11/10/2022

Antoine Ducharme, L'Âme du Chien, éditions Mu

Antoine Ducharme, L'Âme du Chien, éditions Mu

Chez Mu, ce Mois de l'Imaginaire 2022, c'est l'occasion de donner la parole à une nouvelle voix de l'imaginaire francophone. Il s'agit d'Antoine Ducharme qui, avec L'Âme du Chien, signe un premier récit atypique et mordant.

Lu dans le cadre d'un partenariat, je remercie les éditions Mnémos pour l'envoi de ce service de presse.

A Salabanka, celui que l'on surnomme le cavalier aux poings de colère a conquis bien des terres et tué de nombreux ennemis. Son nom suscite la crainte chez les uns et le respect chez les autres. Pourtant, en dépit de ses nombreuses victoires, une résistance demeure alors l'oracle lui conseille de rengainer son épée et de se chercher un champion. En effet, la lumière a parlé et c'est le guerrier à l'âme de chien qui devra livrer bataille en son nom et accomplir ainsi son destin. Qui sera cet homme ? Et peut-on réellement faire confiance aux augures pour voir juste ?

L'Âme du Chien est un récit guerrier qui nous conte le destin de deux hommes liés par une prophétie. C'est un univers épuré dont on ne sait que peu de choses si ce n'est qu'il est âpre et aride. Ce livre nous parle donc de la conquête d'un homme dont le destin a été prophétisé. Ainsi, la fantasy d'Antoine Ducharme casse les codes du genre en ne lui conservant finalement que quelques éléments à l'image de la divination, matérialisant ici l'incontournable magie, intrinsèque à cette littérature. De même que ce texte s'axe autour de la ferveur des combats, rappelant ainsi le modèle de l'épopée. Enfin, la construction narrative du livre emprunte beaucoup au conte dans sa musicalité. 

Pourtant, L'Âme du Chien est un roman déconcertant. Déjà, il n'est pas le témoignage des aventures de deux héros qui lutteraient contre le mal pour le bien commun. Au contraire, ici il est plutôt question d'un homme qui cherche à asseoir son pouvoir en menant une croisade sanglante grâce à l'abnégation et à la fidélité d'un autre dont le but se résumerait à la gloire de son maître. En se concentrant sur ces deux protagonistes, Antoine Ducharme livre un récit intimiste qui attache son lectorat à deux êtres singuliers. Au fil des pages, on éprouve leur relation qui passe de l'admiration pour l'un et un espoir pour l'autre à un détachement et une déconvenue. 

Court, nerveux et plein de fureur, L'Âme du Chien capte immédiatement l'attention en ne laissant finalement aucun répit à ses personnages ni à ses lecteurs. 

08/10/2022

Claire Krust, L'Héritage de l'esprit-roi, collection Bad Wolf, éditions ActuSF

Claire Krust, L'Héritage de l'esprit-roi
collection Bad Wolf, éditions ActuSF

Quoi de mieux pour célébrer le Mois de l'Imaginaire que de continuer de parler de la rentrée de la fantasy. Ça tombe bien car après Le Sang des Parangons de Pierre Grimbert (éditions Mnémos) et La Famille de l'Hiver et le Roi-Fée d'Elisabeth Ebory (éditions Les Moutons électriques), il me restait à vous parler de celle des éditions ActuSF qui ont choisi la plume de Claire Krust pour arborer fièrement les couleurs de la fantasy

Avec L'Héritage de l'esprit-roi, elle renoue avec cette fantasy japonisante qui avait fait le succès de son premier roman, Les Neiges de l’Éternel

Lu dans le cadre d'un partenariat avec les éditions ActuSF, je remercie Jérôme Vincent pour l'envoi de ce service de presse. 

Shinya est l'omnyoji impérial. Sa mission est de maintenir l'équilibre entre le monde des hommes et celui des esprits. Un jour, la fiancée de l'empereur est victime d'une terrible malédiction qui met sa vie en péril. Chargé de débusquer le ou les coupables, ses investigations semblent le conduire vers un lieu emblématique de son passé qu'il aurait préféré oublier. Mais peut-on réellement échapper à son destin ? 

Fasciné par ce Japon féodal, propice à un folklore opulent, Claire Krust l'a tout naturellement choisi comme cadre d'action pour son nouveau roman. Mieux encore, elle attache ses lecteurs aux pas d'un omnyoji, autrement dit un spécialiste en magie et en divination, dont les tâches variées incluaient de nombreux devoirs mystiques comme la protection de la capitale contre les mauvais esprits. Si elle lui a conservé sa capacité de convoquer et contrôler les Shikigami, des êtres surnaturels à l'aspect humain ou animal pouvant posséder ou enchanter les gens, elle lui concède aussi de bien plus grands pouvoirs. 

Dans L'Héritage de l'esprit-roi, on plonge dans la cosmologie ésotérique traditionnelle japonaise dans laquelle Claire Krust laisse libre court à son imaginaire en jouant beaucoup sur les Yokai, les créatures majeures des mythes japonais. Qu'ils soient démons ou esprits, ces êtres mystérieux peuplent les pages de ce roman et nous ouvrent les portes d'un monde secret et hanté où l'on rencontre aussi bien des âmes errantes que des Kitsune, Tengu ou Oni. 

Pour un lectorat de fantasy francophone, essentiellement influencée par le mythe arthurien, lire L'Héritage de l'esprit-roi offre l'opportunité de s'intéresser au folklore asiatique tout en contribuant à percevoir le monde sous un autre paradigme. C'est indéniablement la grande force de ce récit qui bouscule nos habitudes de lecteurs pour nous propulser en pleine inconnue pour qui n'est pas familier des croyances du pays du Soleil-Levant. 

Dans son roman, Claire Krust a privilégié deux temps de narration où le présent et le passé s'alternent épisodiquement, brouillant parfois nos repères temporels au point de nous perdre. En tout cas, il m'est arrivée de perdre le fil de l'histoire au détour d'un chapitre au point de devoir faire un arrêt pour raccrocher avec la narration.