L'influence du "gaming" à la littérature

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18/09/2020

Lionel Cruzille, Le Concile de Merlin, intégrale, éditions L'Alchimiste

Lionel Cruzille, Le Concile de Merlin, Intégrale, éditions L'Alchimiste

Avec la réédition du Concile de Merlin de Lionel Cruzille, les éditions L'Alchimiste inaugurent leur nouvelle collection d'intégrales illustrées. Après un financement participatif réussi, le voici qui débarque dans leur catalogue. Je dois vous avouer que j'étais très impatiente de l'avoir entre les mains. En tant qu'amatrice de fantasy arthurienne, j'avais, depuis longtemps, envie de lire ce cycle. Sa réédition en beau-livre m'a donc offert une belle occasion de m'y plonger. Je remercie au passage Lionel Cruzille de l'intérêt qu'il porte à Fantasy à la Carte, ainsi que pour l'envoi de ce superbe ouvrage. 

Le Secret

Après la mort d'Arthur à la bataille de Calann, Merlin est contraint de fuir l'île de Bretagne pour se réfugier au cœur de la forêt de Brech El Lean. Face à la montée grandissante du christianisme, il convoque dans le plus grand secret sa fille, Gwendaëlle, ainsi que quelques druides et moines influents. Il souhaite un rapprochement avec l'Eglise afin de sauvegarder l'héritage de l'ancienne religion. Alors pour montrer sa bonne foi, il est prêt à dévoiler l'existence de manuscrits araméens traitant de la vie du Christ. Seulement, ce trésor inestimable pourrait lui coûter cher et mettre bien d'autres vies en péril. Ainsi, c'est dans une course contre la montre qu'il entraîne sa fille qui devra aussi bien échapper à la surveillance de l'Eglise que déjouer les plans diaboliques de druides renégats. 

Les Pèlerins du Temps

Dans ce second volet, on retrouve Gwendaëlle, Gildas et Iloan qui parcourent le monde en quête de tous les manuscrits. Face à la menace grandissante de l'Eglise, ils n'ont pas d'autres choix que de les rassembler pour les mettre en sûreté. Au fur et à mesure de leurs pérégrinations, ils vont de découverte en découverte. Tandis que Gildas s'emploie à les traduire pour mieux comprendre cet étonnant héritage, Gwendaëlle, elle, en apprend plus sur le passé de son célèbre père, ainsi que sur elle-même. Tous deux prennent consciences qu'ils mènent une mission peu ordinaire, ils sont comme d'autres avant eux des Pèlerins du Temps, autrement dit les gardiens d'un savoir qui dérange et qui risque même d'ébranler toute la chrétienté. 

Graal

Graal conclut cette trilogie en apothéose de révélations. Alors que Gwendaëlle et Gildas tentent de poursuivre l'oeuvre initiée par Merlin et ses amis afin de préserver ce prodigieux héritage, l'Ombre est de nouveau à leurs trousses. La confrontation semble inévitable. Sauront-ils la mettre une nouvelle fois en échec et faire face à la pluie de secrets qu'elle ne va pas manquer de mettre à jour ? 

Le mythe arthurien est une porte ouverte sur un imaginaire infini. Beaucoup d'auteurs sont fascinés par ces légendes au point d'insérer leurs propres récits au cœur de ce précieux patrimoine. Avec Le Concile de Merlin, Lionel Cruzille suit l'exemple de ses homologues. Seulement, il est l'un des rares à avoir voulu explorer les événements après la mort d'Arthur, tué par Mordred à la bataille de Calann. Ainsi, son histoire prend corps en pleine montée du christianisme faisant reculer, puis disparaître le paganisme. En outre, la disparition d'Arthur sonne le glas de l'unité des Bretons et le royaume tombe aux mains des Angles, des Saxes et des Pictes. Ce contexte est donc propice à l'émergence d'une intrigue nourrie de complots. Ainsi, les protagonistes de Lionel Cruzille, qu'ils soient réels ou fictifs, se retrouvent immerger dans une chasse aux sorcières menée, aussi bien par l'Eglise corrompue que par des druides traîtres. Les enjeux sont donc multiples. Il s'agit autant de protéger des manuscrits renfermant des vérités oubliées de la chrétienté que de sauvegarder le savoir ancestral des druides. Secrets et mensonges sont les maîtres-mots de cette aventure, et donnent à ce texte sa dimension passionnante. En effet, une véritable aura de mystère plane sur cette trilogie. 

Avec Le Concile de Merlin, l'auteur fait une autre lecture du christianisme. Il établit des ponts entre l'ancienne et la nouvelle religion qui éclairent sous un nouveau jour les textes sacrés. Très bien documenté, son récit tient la route et s'inscrit parfaitement dans les grandes heures de l'Histoire. C'est pourquoi, on croise entre ces lignes des personnalités qui ont marqué leur époque comme Benoît de Nursie qui a inventé la fameuse règle monastique des Bénédictins ou Gildas le sage, un ecclésiastique rendu célèbre par son sermon De Excidio et Conquestu Britanniae, une source majeure de l'histoire de Grande-Bretagne des Ve et VIe siècle. D'autre part, les ombres d'Arthur et de Merlin planent également sur cette trilogie. Ici, Lionel Cruzille a pris la liberté de donner une fille à Merlin. C'est à travers ses yeux que l'on prend connaissance de cette histoire. Même si son père s'est volatilisé, il lui a laissé des journaux et un héritage à préserver. A travers eux, un lien ténu subsiste avec ce personnage mythique des légendes arthuriennes. L'auteur nous dévoile une autre facette de ce héros et lève le voile sur certains de ses hauts-faits, ainsi que sur ceux de son disciple, Arthur. Il n'y a donc pas que Myrdhin Emrys qui disposaient de pouvoirs à caractère magique, Arthur ainsi que de nombreux druides et moines qui leur sont contemporains en avaient également. Tous sont des mages, certains sont devins, d'autres guérisseurs ou combattants. A travers eux, Lionel Cruzille donne à sa trilogie son caractère fantasy. Les miracles deviennent donc ici une simple manifestation de ces pouvoirs. On est enchanté de fouler à nouveau des lieux mythiques comme Brech El Lean, l'éternelle Brocéliande. Il nous entraîne dans un voyage aux quatre coins du monde à la recherche de secrets à découvrir. Le dépaysement est donc garanti ! 

Même si on rencontre de nombreux hommes légendaires, l'auteur a choisi une figure féminine pour nous transmettre cette incroyable histoire. Gwendaëlle est une guérisseuse et une guerrière. Femme forte, elle surmonte toutes les épreuves et fait face au danger. Courageuse et intrépide, elle porte un regard critique sur les événements qui ont fait basculer l'Histoire. En choisissant un personnage féminin comme narratrice de ses livres, Lionel Cruzille rappelle l'importance des femmes dans la société celtique et le rôle qu'elles y ont joué. D'ailleurs, d'autres ont marqué leur époque comme Boudicca au Ier siècle. 

Le Concile de Merlin prend place dans un bel écrin merveilleusement illustré par le talentueux DartGarry. Ce qui ne gâche en rien le plaisir de le lire. 

Avec ce cycle, Lionel Cruzille redonne vie à un monde enchanteur qui a traversé le temps sans jamais lasser les lecteurs et les historiens. D'ailleurs, tous n'ont de cesse de se régaler de ces légendes qui ont encore tant à nous dire. 

Fantasy à la Carte

Lionel Cruzille
Le Concile de Merlin
Editions L'Alchimiste

11/09/2020

Orson Scott Card, Le Prophète Rouge, tome 2, Les Chroniques d'Alvin Le Faiseur, éditions L'Atalante

Orson Scott Card, Le Prophète Rouge, tome 2, 
Les Chroniques d'Alvin Le Faiseur
éditions L'Atalante


Avec la sortie du Prophète Rouge, je continue ma lecture des Chroniques d'Alvin Le Faiseur d'Orson Scott Card. Les éditions L'Atalante ont eu la bonne idée de remettre au goût du jour cette pépite du genre qui donne au merveilleux une toute autre saveur. Je remercie d'ailleurs Emma pour l'envoi de ce nouveau service de presse. 

Dans Le Prophète Rouge, on retourne en Amérique au temps des premiers colons pour y retrouver un enfant au destin peu ordinaire. Les Miller ont bien conscience que leur dernier fils Alvin n'est pas un enfant comme les autres. Il a des dons extraordinaires. Mais en but à la méfiance des uns et à la convoitise des autres, ils acceptent de le laisser partir pour faire un apprentissage loin de chez eux, afin de le mettre à l'abris. C'est son frère aîné Mesure qui est chargé de le conduire à destination. Seulement, chemin faisant, ils vont croiser la route d'Indiens peu recommandables et aux intentions malveillantes. C'est ainsi qu'ils se retrouvent prisonniers de ces peaux rouges qui comptent bien les tuer et envoyer, par la suite, leur dépouille à leurs parents. Mais c'est sans compter les dons d'Alvin qui émoussent leurs armes, déjouant ainsi toutes leurs tentatives pour les assassiner. Libérés par un autre clan d'Indiens mené par Ta-Kumsaw, Mesure et Alvin se retrouvent pourtant bien loin de chez eux. Ils se découvrent les victimes d'une machination orchestrée par un colon ambitieux qui souhaite se servir de leur mort pour faire éclater une guerre entre les colons et les Indiens. Malgré tous ses pouvoirs, Alvin saura-t-il vraiment en mesure d'empêcher un bain de sang ? 

Dans Les Chroniques d'Alvin Le Faiseur, Orson Scott Card nous transporte en Amérique lorsque les premiers colons cohabitaient avec les Amérindiens. Alors que dans Le Septième Fils, on partageait le quotidien d'une communauté de colons, dans Le Prophète Rouge, on change de point de vue en passant plutôt du temps parmi les Indiens. En effet, Alvin voit son destin s'entremêler avec celui des Indiens, notamment celui d'un chef réputé répondant au nom de Ta-Kumsaw. L'auteur met l'accent sur leurs croyances et leur culture. Ils ont un rapport à la nature très fort. Or, l'arrivée de ces étrangers constitue une vraie menace pour leur environnement. Ils sont un danger autant pour leur écosystème que pour leur propre survie. Orson Scott Card met, par exemple, en exergue le danger de l'alcool et notamment de l'abus du whisky par les Indiens. Une addiction qui leur fait perdre pied et les coupe même de ce qui fait leur essence. Avec Le Prophète Rouge, on se retrouve dans la peau de ces Indiens qui ont dû face à l'arrivée en masse d'étrangers. S'il y a eu des rapprochements pacifiques, cette cohabitation s'est plus souvent déroulée avec de nombreux heurts. Les accès de violence des uns et des autres ont instauré un climat de défiance. Les raids indiens étaient aussi violents que les représailles des colons. C'est d'ailleurs dans cette ambiance délétère qu'Orson Scott Card a inséré son présent récit. Il donne ainsi une grande légitimité à son uchronie d'autant qu'on rencontre également entre ces lignes des personnalités historiques comme le marquis de Lafayette qui a joué un rôle dans l'indépendance des Etats-Unis. 

La puissance de cette saga réside également dans son personnage principal : ce jeune magicien qui ignore encore l'étendu de ses pouvoirs. En plein apprentissage, il est entouré de mentors qui viennent l'aider dans l'accomplissement de sa destinée. Dans Le Prophète Rouge, Alvin est d'ailleurs profondément marqué par les événements qui le font mûrir d'un seul coup. C'est un tome qui marque la fin de l'insouciance pour notre apprenti-magicien. Encore très jeune, chacune de ses aventures vont le faire grandir et forger sa personnalité. C'est un personnage très attachant que l'on apprécie de retrouver. Faiseur de miracles, il nourrit la fantasy d'Orson Scott Card en multipliant les prodiges. 

Les Chroniques d'Alvin Le Faiseur, c'est l’authenticité d'une époque-clé de l'Histoire américaine et l'épopée extraordinaire d'un jeune garçon appelé à devenir un grand magicien. 

Avec ce cycle, l'auteur signe un récit initiatique intemporel qui continue d'envoûter la jeune génération de lecteurs. 
Fantasy à la Carte

A lire aussi sur le blog mes avis sur Le Septième Fils , L'Apprenti et Le Compagnon.

Informations

Orson Scott Card
Le Prophète Rouge
Tome 2
Les Chroniques d'Alvin Le Faiseur
9791036000447
416 pages
Editions L'Atalante

05/09/2020

Michel Robert, L'Ange du Chaos, Tome 1 à 3, éditions Pocket Imaginaire

Michel Robert, L'Ange du Chaos, éditions Pocket Imaginaire

De Michel Robert, je n'avais lu jusque-là que La Malerune. Pour rappel, il avait pris la suite de Pierre Grimbert pour la rédaction des tomes 2 et 3 de cette saga. Une passation qui s'était d'ailleurs faite avec une totale transparence, n'occasionnant ainsi aucune gêne dans la lecture. 

Mais, c'est avec son cycle L'Ange du Chaos que Michel Robert a véritablement marqué la fantasy française de son empreinte. Or, sa réédition sous la forme d'un intégrale chez Pocket Imaginaire me donne l'occasion de m'y plonger. Je remercie d'ailleurs Laure Peduzzi pour l'envoi de ce service de presse. 

L'Ange du Chaos

Dans ce premier volet, on fait la connaissance de Cellendhyll de Cortavar, un agent des ombres au service du Chaos. Trahi par les siens et laissé pour mort il y a dix ans, Cellendhyll a été sauvé et soigné par Morion de la maison d'Eodh. Depuis lors, il est devenu un agent très efficace. Le Chaos a eu vent par les Ténèbres d'un complot ourdi par la Lumière qui souhaite dominer tous les mondes. Du fait de son passé, Cellendhyll s'impose naturellement pour effectuer cette mission. Sa connaissance des lieux est un plus d'autant qu'il a des comptes à régler avec ses anciens amis et son amour de jeunesse. L'heure de la vengeance a sonné...

Cœur de Loki

Le temps des épreuves est venu pour Cellendhyll. Suite à une expérimentation de Morion d'Eodh qui a mal tourné, notre agent des ombres vient de se réveiller après quelques semaines de coma. Doté d'un second cœur magique, Cellendhyll est surtout devenu l'ombre de lui-même. Il a non seulement perdu sa forme mais aussi ses pouvoirs. Empâté par ses nombreuses semaines passées alité, il est devenu irascible avec son entourage. Or, pour le remettre doucement en selle, Morion le charge d'une mission de procurateur afin d'aller acquérir en son nom un bien immobilier dans la ville de Véronèse. C'est accompagné de son ami Gheritarish qu'il quitte la forteresse d'Eodh de mauvaise grâce. Chemin faisant, le Loki compte bien le remettre sur pied à condition, bien évidemment, que le jeune homme y mette du sien. L'expédition ne se fera pas sans turbulences car entre le sombre état d'esprit de son ami et les problèmes qui ne vont pas manquer de survenir, ce voyage ne sera pas la promenade de santé qu'attend Gher. Mais arrivera-t-il à redonner la foi à l'Adhan aux cheveux gris ? 
Sang-Pitié

Cellendhyll est de retour à la forteresse d'Eodh après sa dernière mission qui l'a bien ébranlé. Alors qu'il est occupé à recruter et former une escouade d'intervention d'élite, Morion le charge de se rendre dans une cité franche afin de protéger une personnalité politique. Peu diplomate, l'Ange du Chaos rechigne clairement à accepter mais le puissant d'Eodh ne lui laisse pas le choix. Sur place, il laisse son instinct de fin limier prendre le dessus afin d'identifier la menace et sauver ainsi la vie de cette politicienne. Une enquête qui va lui faire recroiser la route de vieux ennemis alors attention à la confrontation qui ne manquera pas de faire des étincelles...

L'avantage de commencer une saga en la lisant sous la forme d'un intégrale, c'est que cela permet une pleine immersion dans cet univers en passant pas mal de temps auprès de ses personnages.

Dans L'Ange du Chaos, Michel Robert nous plonge dans une dark fantasy coup de poing. 

Pour construire sa fantasy, l'auteur a imaginé des mondes différents dans lesquels on se déplace grâce à des portails magiques. Ainsi, trois royaumes rivaux se distinguent : la Lumière, les Ténèbres et le Chaos. En perpétuel conflit pour le pouvoir, la Lumière et les Ténèbres passent leur temps à fomenter des machinations pour asseoir leur domination sur les autres. Michel Robert nous dépeint donc un univers rugueux plein de fureur. Contrairement aux apparences, il n'y a ni Bien ni Mal, juste plusieurs camps qui luttent pour le pouvoir. C'est au sein du Chaos que l'on passe le plus de temps puisque cette histoire est surtout relatée du point de vue de l'un de ses hommes. On découvre une société très structurée et constituée de clans qui se partagent le pouvoir. Grâce à des agents espions, il se tient informé des forces et des faiblesses des autres puissances.  Sans pour autant chercher la suprématie absolue, le Chaos reste redoutable. Avec L'Ange du Chaos, Michel Robert s'éloigne du modèle habituel qui nous immerge au sein d'un royaume imaginaire menacé par les forces du Mal, mais dessine plutôt ici un monde très nuancé. En effet, ni bons ni mauvais les personnages qui peuplent ce récit agissent surtout en fonction de leurs intérêts personnels ou professionnels et n'hésitent pas à recourir à la violence lorsque cela est nécessaire. Voilà qui pose le décor de ce récit très immersif. 

Mais dans L'Ange du Chaos, on s'attache également à ses personnages notamment à Cellendhyll de Cortavar. Figure centrale de cette oeuvre, il est un héros ambivalent. Taillé dans du roc, il apparaît au premier abord comme un être dur et froid. Mais au fil des aventures, on découvre, au final, un homme complexe qui s'est forgé une épaisse carapace suite à la trahison des siens. En effet, celui que l'on surnomme l'Ange du Chaos est né de la vengeance. Trahi par la Lumière, il change d’allégeance et devient un agent redoutable du Chaos. Avec lui, Michel Robert explore la figure du guerrier mercenaire qui agit sur ordre mais tue bien souvent au-delà de ce qu'on lui demande. Meurtri par les drames et les coups durs que lui réserve la vie, il est la pièce maîtresse de ce cycle. Autour de lui flotte une aura de mystère. On sait dès le premier tome que son destin a été annoncé par une prophétie, pourtant l'auteur n'en révèle pas plus à son sujet. Sa destinée est donc marquée par le sceau du secret. Cellendhyll est un héros sombre alors Michel Robert lui donne un compagnon qui est son opposé, insouciant et polisson. Gheritarish appartient à la race des Lokis. Sa force et sa puissance font de lui un allié indéniable pour Cellendhyll. Mais on apprécie surtout sa gouaille qui pimente bien cette aventure au long cours. 

La magie est omniprésente dans ce cycle. Cellendhyll dispose déjà d'un pouvoir qu'il nomme le zen le rendant ainsi quasi invulnérable en combat. De plus, beaucoup de mages se pressent entre ces lignes et disposent de grands pouvoirs faisant d'eux des êtres dangereux. Cette saga nous ouvre donc la porte sur un monde occulte envoûtant. 

Avec L'Ange du Chaos, Michel Robert signe un cycle immersif porté par un héros fascinant. On se laisse séduire dès les premiers chapitres par la fantasy de cet auteur qui ne nous laisse finalement aucun répit. 

Fantasy à la Carte

Michel Rober
L'Ange du Chaos
Intégrale : tomes 1 à 3
Editions Pocket Imaginaire

25/08/2020

Loïc Le Borgne, Je Suis Ta Nuit, éditions ActuSF

Loïc Le Borgne, Je Suis Ta Nuit, éditions ActuSF

Loïc Le Borgne est un auteur français qui aime autant écrire de la science-fiction que du fantastique. Aujourd'hui on le retrouve avec Je Suis Ta Nuit, à l'occasion de sa réédition aux éditions ActuSF. J'en profite d'ailleurs pour remercier Jérôme Vincent pour l'envoi de ce service de presse.

Été 80, Pierre, 11 ans, vit dans la petite commune bretonne de Duaraz. Un jour, alors qu'il s'amuse avec avec sa bande de copains à lancer des bouteilles, ils tombent nez à nez avec le corps d'un homme nu sans lèvres, sans mains et sans sexe. Cette macabre découverte va mettre toute la ville en émoi. Or, lorsque d'autres faits étrange étranges vont survenir à leur tour, un vent de panique va s'abattre sur cette commune sans histoires et sur ses habitants. Pour Pierre et ses amis, cela risque de sonner le glas de leur innocence, enfin s'ils survivent à l'été...

Avec Je Suis Ta Nuit, Loïc Le Borgne signe un roman d'épouvante très réussi. Avec beaucoup de justesse, il revisite ici nos peurs d'enfant. Ainsi, la peur du noir et celle du croquemitaine viennent se heurter à une réalité effroyable et sinistre. Ces terreurs enfantines sont propices à une imagination fertile. Loïc Le Borgne s'en sert d'ailleurs allègrement pour flouter la frontière entre la fiction et la réalité. On découvre la menace à travers les yeux de Pierre mais jusque dans les dernières lignes de ce livre, on s'interroge sur la part de rêve et de vérité de ce que l'on voit. C'est toute la force de ce récit qui joue sur nos émotions en faisant naître et monter crescendo un sentiment de malaise qui évolue vers une pure terreur. Je Suis Ta Nuit est un roman sombre qui donne la chair de poule. Ce livre fout les jetons et pas seulement à cause des phénomènes paranormaux qui surviennent à Duaraz après la découverte du premier cadavre. Même si je vous l'accorde, l'attaque de corbeaux, l'invasion de scarabées et la cécité collective de quelques minutes ont de quoi ébranler même les esprits les plus cartésiens. Mais quand cette noirceur révèle un mal plus terrifiant encore, celui qui entache l'humanité, il y a de quoi courir dans les couloirs en hurlant. 

Derrière le fantastique de son texte, Loïc Le Borgne explore les blessures que les adultes peuvent faire aux enfants. Que ce soit suite à des abus ou à une inertie, beaucoup de mineurs sont victimes de ces adultes censés les protéger. L'auteur met en lumière ces traumatismes qui prennent racines dans l'enfance pour exploser souvent à l'âge adulte. L'innommable donne souvent naissance à l'horreur. La violence devient ainsi le seul moyen d'expression. 

Mais Je Suis Ta Nuit dégage également une certaine légèreté du fait que les héros sont encore très jeunes. Ils s'accrochent encore à leur innocence. En cela, ils n'oublient pas de rire et de jouer. A travers eux, Loïc Le Borgne fait un clin d’œil à sa propre enfance des années 80 en multipliant les références aux dessins animés et aux films qui ont bercé cette génération comme Star Wars ou Goldorak. C'est d'ailleurs en incarnant un Jedi que Pierre trouve la force d'affronter les démons qui s'agitent autour de lui. On se sent proche de ses enfants qui grandissent à une époque charnière. Elle annonce une ère de modernité qui sera marquée par le numérique. Je Suis Ta Nuit nous immerge dans une Bretagne inspirée de lieux existants et agrémentée du folklore local. Cela donne au livre une certaine authenticité qui est bien appréciable. 

L'autre élément fort de ce roman, ce sont ses personnages, ces six enfants qui font preuve d'un courage et d'une solidarité remarquable pour faire front ensemble face à la menace. On s'attache sans mal à Pierre, le narrateur de cette histoire. Sa force de caractère nous impressionne. Il s'identifie aux personnage de ses livres ou de ses dessins-animés pour mener l'enquête à son tour. Dans cette aventure, Pierre est finalement très héroïque, ce qui force le respect. 

Je Suis Ta Nuit est le genre de roman qui vous happe dès les premières pages et vous laisse complètement sonné grâce à son atmosphère terrifiante propre à engendrer des cauchemars. On apprécie autant son suspense glaçant que son univers teinté d'un brin d'ésotérisme. A l'avenir, lorsque vous scruterez les coins sombres, veillez bien à ce que le Bonhomme Nuit ne s'y trouve pas...
Fantasy à la Carte

Retrouvez sur la blogosphère les avis du blog Au Pays des Cave Trolls et du Bibliocosme

Informations

Loïc Le Borgne
Je Suis Ta Nuit
370 pages
978-2-37686-249-9
Editions ActuSF

21/08/2020

Aurélie Wellenstein, Le Dieu Oiseau, éditions Pocket Imaginaire


Aurélie Wellenstein, Le Dieu Oiseau, éditions Pocket Imaginaire

Aurélie Wellenstein est une écrivaine française de fantasy. Ses livres sont régulièrement sélectionnés par les plus prestigieux prix littéraires de l'Imaginaire. En 2017, elle est élue auteur "coup de cœur" du festival des Imaginales. En 2020, son roman Mers Mortes est récompensé par le prix Imaginales des bibliothèques. 

Cet été, elle est à nouveau à l'honneur chez Pocket Imaginaire avec la réédition de son livre, Le Dieu Oiseau. Je remercie Laure Peduzzi qui, en m'envoyant ce service de presse, m'a ouvert la porte sur un imaginaire terriblement envoûtant. 

Imaginez une île sauvage et déserte, dix candidats et une compétition sans merci, voilà les principaux ingrédients sur lesquels repose ce roman. Dans Le Dieu Oiseau, on retrouve Faolan, esclave depuis dix ans de Torok, le fils du chef du clan du Bras de Fer. Depuis des siècles, les clans de l'île s'affrontent tous les dix ans à travers une compétition pour déterminer lequel va gouverner. La désignation du vainqueur donne lieu à la cérémonie du "banquet" : une orgie au cours de laquelle les vainqueurs dévorent ou réduisent en esclavage les vaincus. Depuis dix longues années, Faolan attend de prendre sa revanche. Il espère remporter la première épreuve des sélectifs pour se donner une chance de participer à cette compétition insensée. Vaincre ou périr, elle est son seul espoir de liberté...

Dans Le Dieu Oiseau, Aurélie Wellenstein nous immerge dans un roman psychologique très sombre. Elle place son héros dans un univers hostile au sein duquel il devra affronter mille dangers pour triompher. La quête de survie est donc au cœur des enjeux de ce récit. Elle prend même le goût ferreux du sang au fur et à mesure des épreuves que doit traverser Faolan. 

Ce livre nous laisse d'ailleurs presque en tête en tête avec ce personnage, les autres protagonistes n'occupent finalement ici qu'une place secondaire. Ainsi, toute la puissance de ce récit réside dans Faolan Escalada, un garçon meurtri et cabossé. Tout au long de sa quête, l'autrice insiste sur son ambivalence, il est tantôt bon, tantôt mauvais. L'orientation de cette aventure dépend totalement de ses choix. De fait, celle-ci prend volontiers une tonalité tragique au et à mesure de son avancée. Faolan est un héros blessé autant dans sa chair que dans son esprit. Il est le souffre-douleur d'un autre garçon depuis de nombreuses années. Il a subi maintes sévices qui l'ont fragilisé. A travers lui, Aurélie Wellenstein explore la folie qui habite un homme qui, à force de s'enfermer en lui-même pour échapper à l'innommable, finit par perdre la raison. Ainsi, le jeune homme multiplie les hallucinations et les excès de violence. Dans Le Dieu Oiseau, il est beaucoup question de sa descente aux enfers. Elle nous brosse le portrait d'une victime qui va devenir bourreau. Entre folie et bonté, on ne résiste pas au charme de ce personnage. Il nous captive dès les premières lignes jusqu'au dénouement de cette histoire. A travers lui, on est totalement habité par ce roman comme l'autrice l'a sans doute été, elle-même, par son écriture. 

Comme dans tous les romans d'Aurélie Wellenstein, les animaux sont présents. En plus d'être les fidèles compagnons d'infortune de Faolan qui puise en eux la chaleur et l'affection que les humains lui refusent, on les côtoie aussi beaucoup à travers les oiseaux. N'oublions pas l'omniprésence du dieu Oiseau qui assure la pérennité et la prospérité du clan vainqueur. 

Dans Le Dieu Oiseau, l'autrice nous fait voyager dans une fantasy teintée de rudesse et de violence. Elle ne nous épargne donc pas avec ce texte qui écorne au passage bien volontiers notre sensibilité. Elle signe ici un univers inquiétant et assassin. La mort rôde entre ces lignes. Pourtant malgré toute la noirceur de ce livre, il nous passionne d'un bout à l'autre. 

Aurélie Wellenstein est une plume talentueuse. Elle donne vie à des récits qui nous habitent longtemps après avoir les avoir refermés. 

Fantasy à la Carte
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