L'influence du "gaming" à la littérature

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16/11/2019

Vincent Mondiot, L'Ombre des Arches, éditions Mnémos

Ceux qui ont apprécié Les Mondes-Miroirs, sorti il y un an, seront sans doute ravis d'apprendre la sortie de L'Ombre des Arches, deuxième tome de cette saga. 

Or, qui dit suite, dit parfois déception tant elles ne sont pas toujours à la hauteur ; mais avec ce récit à l'action menée tambour battant, il n'en est rien. Je vous confierais même qu'il a ma préférence. Peut-être parce que maintenant que je connais les protagonistes, c'est un plaisir de les retrouver. Allez savoir ! Cela ne s'explique pas, c'est l'alchimie. Au passage, je remercie Nathalie des éditions Mnémos pour m'avoir envoyé cet excellent service de presse. 

Elodianne et Elsy sont donc de retour. Mandatée par le palais, la miroitiste propose à son amie Elsy de l'accompagner dans sa mission diplomatique. Depuis les terribles attentats perpétrés par Teliam Vore, un an plus tôt, des recherches ont été menées afin de mieux maîtriser la création des mondes-miroirs. Or, Elodianne est chargée d'en faire la démonstration au légat d'Aurterre. Rien de compliqué ni de dangereux dans cette mission. Pour preuve, ce voyage entre filles prend vite des airs de vacances. Bien entendu, arrivées sur les lieux, elles vont vite déchanter. Déjà, Corbès Salven interprète cette démarche comme une diminution de sa liberté de gouvernance, une manière pour le gouvernement d'avoir ses provinces à l’œil. Une méfiance qui est d'ailleurs alimentée par sa propre femme, qui rêve d'un Etat indépendant. Alors, quand la statue géante d'un titan reprend vie, le soir du Rituel de Lumière, et massacre son peuple, Salven voit ça comme une déclaration de guerre et se laisse sans mal convaincre de former une coalition avec ses voisins. La rébellion est en marche et nos deux amies y sont enrôlées de force. Réussiront-elles à influencer les événements ? Prime seul le sait ! 

Pour ce second volet, Vincent Mondiot s'est lancé dans l'écriture en solo. Maintenant que l'univers de Mirinar est créé, c'est à lui que revient la tâche de le faire vivre. Et je dois dire qu'il le fait bien. 

Il fallait, bien entendu, offrir à ses deux héroïnes une aventure digne de leur réputation car, après tout, elles ont permis l'arrestation de dangereux terroristes. De fait, il n'y est pas allé de mains mortes avec elles en les envoyant carrément au milieu des loups. Dans une société où chacun lutte pour obtenir plus de pouvoir, elles vont devoir marcher sur des œufs, si elles espèrent rentrer à Mirinèce. 

L'auteur nourrit généreusement son intrigue de complots, de dissensions et de trahisons, comme il sied en fantasy. Un gouvernement n'est jamais exempt d’ingérence, surtout lorsque les mécontentements se multiplient. Ainsi, L'Ombre des Arches est un roman qui se présente comme le témoin d'une société au bord de l'implosion, conséquence d'une trop grande oppression du peuple. Parce que ce livre fait écho à la brûlante actualité qui secoue tant le monde à l'heure actuelle, sa lecture n'en est que plus prenante. 

Outre cette problématique intéressante et l'univers foisonnant dans laquelle elle s'épanouit, les deux personnages féminins qui portent l'aventure contribuent aussi à donner un charme fou à ce cycle. Voici deux femmes aux caractères diamétralement opposés mais qui se complètent bien. Que vous appréciiez la discrétion d'Elodianne ou la gouaille d'Elsy, elles sauront vous séduire lors de leurs innombrables joutes verbales qui ponctuent le récit. 

Finalement, L'Ombre des Arches vient juste élever le niveau de cette captivante saga. 

Fantasy à la Carte

A lire aussi sur le blog, mon avis sur Les Mondes-Miroirs

Vincent Mondiot
L'Ombre des Arches
Editions Mnémos

12/11/2019

Ellen Kushner, A la pointe de l'épée, collection Perles d'épice, éditions ActuSF

En cette fin d'année, les éditions ActuSF ont permis à un grand nom de la fantasy de faire son grand retour en France. En rééditant A la pointe de l'épée d'Ellen Kushner dans une version collector agrémentée de textes inédits, l'équipe des éditions ActuSF attire notre attention sur une oeuvre majeure du genre. Je remercie Jérôme Vincent pour l'envoi de ce très beau service de presse. 

Cette magnifique édition a revêtu ses plus beaux atours en arborant orgueilleusement une couverture, digne des fiers romans d'Alexandre Dumas, pour nous livrer une aventure au long cours. 

A la pointe de l'épée est composé du roman lui-même, de cinq nouvelles (dont une éditée pour la première fois), et de lettres que l'autrice a glissées entre ses différents textes afin de faire le lien entre eux. 

Cette oeuvre d'une vie nous plonge dans l'intimité d'un célèbre bretteur du nom de Richard Saint-Vière. D'une histoire à l'autre, on suit les plus beaux combats de la plus fine lame du coin car Saint-Vière est une légende. Sensible aux défis, il n'hésite jamais à les relever. Il n'est pas un bretteur d'apparat et refuse de se battre pour la galerie, lors des mariages, mais il accepte volontiers de régler les dettes d'honneur des plus fortunés à la pointe de son épée, moyennant contribution, bien entendu ! Mais travailler pour les nobles de La Colline n'est pas sans risque, surtout lorsqu'on leur oppose un refus. Richard a beau être un bretteur qui maîtrise l'art de l'assassinat, il n'abuse pas de son talent et préfère agir avec mesure, quitte à se mettre à dos des personnes influentes. A voir maintenant comment lui et son amant Alec vont se sortir de cette situation épineuse, baignée de complots ?

Ne cherchez pas de la magie entre ces lignes, vous n'en trouverez pas. La fantasy d'Ellen Kushner s'exprime à coup de duels et de trahisons. Son texte est puissant car porté par une ambiance mêlant panache des récits de cape et d'épée, nobles sentiments, détresse humaine et secrets enfouis. Son roman fourmille d'escarmouches et de règlements de compte comme les romans historiques savent nous en livrer. 

Pour donner corps à son récit, l'autrice s'est inspirée d'une époque très particulière, celle où les nobles se défiaient pour éliminer un rival gênant, ou simplement par ennui. Interdits sous l'Ancien Régime, les "duels du point d'honneur" ont quand même perduré longtemps.

A la pointe de l'épée nous donne un aperçu de cette période quelque peu sanglante, quoique divertissante. Dans ce livre, Ellen Kushner joue beaucoup sur le décalage entre l'ambiance feutrée des salons et celle, plus populaire, des Bords-d'eaux, lieu de perdition et d'amusement dans lequel s'épanouit Richard Saint-Vière.

Plus que de mettre l'accent sur un univers intrigant, Ellen Kushner donne surtout la parole à deux héros très atypiques. Richard, le bretteur taiseux et honorable qui n'agit qu'avec réflexion. De sa personnalité se dégagent une noblesse et une force qui le rendent très attachant. Peu expansif, on le découvre pourtant protecteur vis-à-vis de certains de ses proches, comme Alec. Or, justement, parlons de ce dernier. Énigmatique, étrange, voici un étonnant personnage. Beaucoup de zones d'ombre subsistent autour de lui. Même Saint-Vière en sait peu sur son compte. Instable et fragile, Richard est sa boussole et son garde-fou. Les deux hommes forment un duo déconcertant avec lequel le lecteur a envie de passer du temps. Ils sont vraiment l'essence de ce récit épique. 

Avec ce livre, Ellen Kushner a marqué le genre. Récompensée par de nombreux prix aux Etats-Unis, elle est un talent que l'amateur de fantasy ne peut ignorer. On la redécouvre donc grâce aux éditions ActuSF qui, avec cette belle réédition, lui restituent toutes ses lettres de noblesse.


Fantasy à la Carte
D'autres avis sont à découvrir comme celui d'eMaginarock

Ellen Kushner
A la pointe de l'épée
Collection Perles d'épice
978-2-36629-479-8
Editions ActuSF

08/11/2019

Nathalie Dau & Krystal Camprubi, Légendes, créatures fantastique, éditions Auzou

Retrouvé au fond du grenier, Légendes, créatures fantastiques est un souvenir professionnel de mon stage au sein des éditions Auzou. Au vu du contenu, ce beau-livre a clairement sa place à la Une de Fantasy à la Carte

Présenté comme un grimoire, ce livre s'adresse à la jeunesse. Ici, la plume de Nathalie Dau est associée au pinceau de Krystal Camprubi pour ouvrir les portes du bestiaire merveilleux à la jeune génération. 

Avec beaucoup de pédagogie, Nathalie Dau donne quelques clés afin de comprendre ce qu'est une licorne, à quoi ressemble un dragon ou encore comment différencier une sorcière maléfique d'une bonne magicienne. 

Ce livre se divise en douze doubles-pages admirablement illustrées par Krystal Camprubi et présentant à tour de rôle la licorne, le dragon, la sorcière maléfique, la bonne dame, le lutin, la fée follette, le faune, l'ondine, le troll, la princesse en détresse et le chevalier. Chacune de ces pages est décorée d'un liseré, souvent différent, qui vient les encadrer à la manière des enluminures moyenâgeuses. 

Krystal Camprubi propose des crayonnés, des esquisses et des peintures qui viennent illustrer avec beaucoup de talent les propos de Nathalie Dau. Le livre est rempli de rabats à soulever ou à déplier pour découvrir les trésors cachés par l'illustratrice. Ainsi, elle donne la possibilité aux jeunes lecteurs de toucher le crin de la licorne ou l'étoffe de la robe de Merlin. Des privilèges rares qui ne sont réservés qu'aux initiés, vous imaginez bien !

Même si cet artbook est destiné à un jeune public, je ne peux m'empêcher de rester en admiration devant le talent de ces deux femmes. Voici deux noms de l'Imaginaire français qui font rêver les lecteurs de 7 à 77 ans. 


J'apprécie la finesse du trait dans les crayonnés de Krystal Camprubi et son souci du détail. Ses peintures sont empreintes d'un tel réalisme que l'on pourrait les prendre pour des photographies. A croire qu'elle s'est aventurée dans les lieux les plus secrets de la nature pour croquer ces créatures qui nous fascinent depuis des siècles. 

Nathalie Dau y décortique avec minutie ce qui nourrit nos contes et légendes populaires.

Cet ouvrage est un bien bel outil pour qui veut initier les enfants à la lecture et à la compréhension des contes de fées.  

Fantasy à la Carte

Nathalie Dau
Krystal Camprubi
Légendes, créatures fantastiques
Editions Philippe Auzou

05/11/2019

Lionel Davoust, Le Verrou du Fleuve, tome 2, Les Dieux Sauvages, éditions Critic

L'ayant récupéré à la dernière édition de Cidre & Dragon, je suis bien contente de pouvoir enfin me plonger dans la lecture du second volet des Dieux Sauvages

Quand on se lance dans Le Verrou du Fleuve de Lionel Davoust, il faut se préparer à une descente aux enfers.

On retrouve Mériane, Leopol et Darén à la tête d'une petite armée qui voit ses rangs grossir au fur et à mesure de leur avancée. Après avoir rallié à leur cause le duc de Belnacie et le prince héritier de Rhovelle, ils ont pris la direction de Loered. Cité stratégique du royaume qui est sur le point de céder aux assauts arcaniques des Askalites. L'enjeu est énorme. Le Verrou du Fleuve ne doit pas tomber sinon c'est le royaume de Rhovelle tout entier qui en pâtira car plus rien ne pourra arrêter les hordes démoniaques du dieu Aska. Mériane arrivera-t-elle à temps ? Et pourra-t-elle faire la différence et changer la donne de cette situation qui semble si désespérée ? 

Dans ce livre, Lionel Davoust se la joue stratège et tacticien dans la mesure où il nous relate minute par minute le siège de Loered. Inspiré du Moyen Âge, l'auteur nous raconte avec beaucoup d'exactitude l’événement. D'ailleurs, il ne nous épargne pas de la cruauté des moyens utilisés pour faire plier la volonté des assiégés. La force de frappe de l'ennemi paraît sans faille et pour cause, son énergie lui est insufflée par un dieu, alors les sept murailles de la cité semblent, en comparaison, une bien faible protection pour faire face à cette invasion. 

Avec Le Verrou du Fleuve, on goûte aux premiers affrontements entre les troupes d'Aska et ceux de Wer. On prend la mesure de la puissance maléfique du dieu déchu. Son armée n'a plus rien d'humaine. La chair et le métal ayant parfaitement fusionnés, ses bataillons sont pour beaucoup constitués de machines qui broient tout sur leur passage. Les descriptions sont ici douloureusement saisissantes. L’effroi et le désespoir transpirent entre ces lignes. Le combat semble perdu d'avance et, pourtant, Lionel Davoust distille toujours autant de tension et de suspense dans ce récit, porté par son héraut en jupons, Mériane incarne le dernier espoir de ces hommes et de ces femmes perdus dans la tourmente. Elle est l'ultime lueur dans cette obscurité grandissante que forme l'éternel crépuscule. 

Cette saga s'appuie sur une lutte acharnée entre le Bien et le Mal. En tant que porte-paroles des deux divinités, frères ennemis, Ganner et Mériane personnifient cette lutte. D'ailleurs, à l'image de Harry Potter et de Lord Voldemort, de l'univers de J.K. Rowling, la victoire reposera surtout sur l'issue de leur combat, qui ne manquera pas de conclure l'histoire. 

Point d'elfes, de fées ou d'orcs, dans ce cycle des Dieux Sauvages, mais une poignée d'hommes et de femmes qui mènent l'aventure tambour battant. Finalement la fantasy de Lionel Davoust est fondée sur une science dont le contrôle semble avoir échappé aux hommes.

L'écriture de cet auteur est mordante et les intrigues sont ambitieuses et pourtant parfaitement bien exécutées. Pour qui a apprécié le premier tome et s'est approprié cet univers, lire la suite relève juste de l'addiction. 

Fantasy à la Carte

Sur la blogosphères, retrouvez l'avis du Geekosophe et des Chroniques du Chroniqueur.  

Lionel Davoust
Le Verrou du Fleuve
Tome 2
Les Dieux Sauvages
Editions Critic

A lire aussi sur le blog mes avis sur La Messagère du Ciel et Port d'Âmes, deux romans qui partagent le même univers.