L'influence du "gaming" à la littérature

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31/12/2024

Pierre Pevel, Stéphane Créty & Jérôme Maffre, L'épéiste, T.1, Gueule Cuir, éditions Drakoo

Pierre Pevel, Stéphane Créty & Jérôme Maffre, L'épéiste, T.1, 
Gueule de Cuir
éditions Drakoo 

Des univers de Pierre Pevel, le plus célèbre est sans aucun doute Le Paris des Merveilles qu'il a décliné en romans, en nouvelles et en bandes dessinées

Toutefois, la Belle Époque n'est pas la seule période historique qui a sa faveur car situer ses intrigues à la cour de Louis XIII ne lui déplaît pas non plus si l'on croit son excellente trilogie, Les Lames du Cardinal.

Or, pour sa nouvelle bande dessinée Gueule de Cuir, il a réinvesti ce siècle pour lui servir de décor.

Reçu en cadeau à mon anniversaire, je remercie à nouveau mon amie Mathilde qui sait toujours comment enchanter mes lectures. 

Résumé :

1633. Un redoutable Nécromant étend son influence sur les bas-fonds de Paris et le seul à même semblant pouvoir arrêter cette menace est celui que l'on appelle l'Épéiste désigné par la Veuve et l'Oiseleur selon le Zodiaque du Diable. Mais acceptera-t-il d'endosser le masque et de combattre les forces du mal ? 

Mon avis :

Dans ce premier volume, on découvre un Paris populaire, celui des bas quartiers, essentiellement de nuit afin de donner corps au mystère et aux ténèbres propices à cet étrange protagoniste se faisant appeler le Nécromant. Assimilé au diable, il laisse derrière lui un sillage de morts parmi les plus modestes et sa présence inquiète jusqu'à la cour du roi. Son existence semble être liée au Zodiaque du Diable autour duquel gravitent des factions et bien d'autres étonnantes figures, à l'image de la Veuve, de l'Oiseleur et de l'Épéiste. 

De toute évidence une sombre magie est à l'œuvre au sein de ces planches et elle est le fruit de puissants alchimistes, à n'en pas douter ! 

Mais toute l'originalité de cet univers est que Pierre Pevel emprunte au mythe du super-héros faisant de ce masque la singularité de cette histoire. Puissant artefact qui confère à son porteur de grands pouvoirs en donnant une grande force, de la rapidité ou encore davantage d'agilité. 

Gueule de Cuir, c'est tout simplement le croisement du mousquetaire avec le super-heros des comics. Voilà qui donne à ce récit se déroulant au 17e siècle autant de répondant que de panache. 

Pierre Pevel y signe un scénario piqué d'actions et de rebondissements où les duels à l'épée s'enchaînent en duo ou à plusieurs sans temps mort. Point de place à l'ennui dans ces bulles car les évènements s'y précipitent sans même laisser le temps au personnage principal de reprendre son souffle. 

Ce premier tome est là pour poser le décor, faire connaissance avec les personnages et identifier les enjeux. 

Intrigues politiques, malédiction et magie noire sont les ingrédients du succès réunis ici par Pierre Pevel pour notre plus grand plaisir. 

Côté personnage, on peut citer le duelliste puisque tout va tourner autour de lui au fil des volumes. Sous les atours du mousquetaire, il en partage clairement les valeurs, au moins pour l'honneur qu'il porte tel un étendard, lui qui s'est juré de défendre les plus faibles. Fin bretteur, sa vie et les missions qu'il s'est assignées répondent bien à un code qui en fait le porteur parfait de ce masque afin d'accomplir de grandes choses et en tentant de tenir au loin les ombres.

Pour illustrer cette incroyable histoire, c'est Stéphane Créty qui est aux manettes et je dois dire qu'il a fait des merveilles pour donner vie à ce Paris si bien connu des lecteurs. En tournant les pages, on se sent en territoire familier au milieu des illustres bâtiments ou en compagnie de certains grands noms de l'Histoire. Les dessins sont très beaux et forts réalistes. Ils exhalent un certain mystère, ainsi que le danger et les rebondissements voulus par l'auteur.  Beaux ou laids, les héros de Pierre Pevel s'animent sous le crayon de Stéphane Créty avec beaucoup d'intelligence car il a un vrai talent pour croquer les émotions et les retransmettre. 

Pour conclure :

Gueule de Cuir est une bande dessinée haute en couleurs très divertissante où les hommes d'influence et les complots politiques croisent le fer avec la ténébreuse alchimie. Voilà de quoi contenter un lectorat en manque d'action. 

Fantasy à la Carte

Sur le blog, vous pouvez notamment retrouver mes avis sur les autres publications de Pierre Pevel chez Drakoo : Les Enchantements d'Ambremer volume 1 et 2, ainsi que Les Artilleuses

Informations 

Pierre Pevel
Stéphane Créty 
Jérôme Maffre 
L'épéiste 
T.1
Gueule de Cuir
9782382331460
68 pages
Editions Drakoo

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20/08/2024

Pierre Grimbert, Le Lanternier, Pax Elfica, éditions Mnémos

Pierre Grimbert, Le Lanternier
Pax Elfica
éditions Mnémos 

En partenariat avec les XII Singes et dans le cadre de leur label Ludika, les éditions Mnémos ont chargé l'un de leur auteur phare, Pierre Grimbert, d'écrire un roman directement inspiré du jeu de rôle Pax Elfica

Celui-ci est sorti en avril dernier sous la forme d'un très beau livre relié arborant un jaspage sur la tranche. 

Bien que je ne sois pas une adepte de jeu de rôle, j'avais tout de même très envie de lire ce livre car j'aime énormément la plume de Pierre Grimbert et j'étais donc curieuse de lire son petit dernier.

Résumé :

Depuis 7 ans, la cité de Brenhaven vit sous le contrôle des elfes après que ces derniers aient chassé le Nécromant et sa horde de morts-vivants qui y faisaient régner la terreur. Seulement, au lieu de partir après leur victoire, ils se sont installés prenant comme prétexte l'apparition soudaine de la Sylve en plein cœur de la ville. Depuis lors, les habitants ont dû se conformer à leurs lois et à un règlement strict car la moindre infraction peut entraîner de graves sanctions. 

C'est ici que vit le nain Tolan avec son épouse Galaë. Lui est lanternier et elle, charcutière. Leur quotidien va basculer le jour où ils rencontrent un jeune humain prénommé Veric qui semble sortir de nulle part. Alors Tolan n'a pas d'autre choix que de l'accueillir chez lui pour le soustraire momentanément à la méfiance elfique car le garçon est hagard et émotionnellement instable. Mais son accès de générosité pourrait bien le mettre en difficulté, voir en danger, qui sait !

Mon avis :

Le Lanternier est un récit de fantasy qui nous immerge dans l'univers de Pax Elfica et plus particulièrement en Arlande, dans la région de Valseptente, à Brenhaven. C'est une cité médiévale peuplée d'humains, de nains, d'orcs, d'halfelins et d'élfes. Véritable enjeu de pouvoir, d'abord pour le Nécromant qui en avait fait son quartier général, puis pour les efles qui ont fait le choix de s'y installer en imposant leur discipline. A Brenhaven, la magie est proscrite. Les seuls détenteurs autorisés à en faire usage sont donc les elfes. Aussi, ceux qui disposent d'un petit pouvoir comme les nains que l'on appelle ici "sorcelet" voient leur don s'amoindrir si ce n'est disparaître par manque d'utilisation. Dans ce monde, il n'est donc pas bon de déplaire aux elfes qui se réservent le droit "d'enfayter", autrement dit de réduire tous les contestataires à de simples esprits. Au sein de leurs rangs, il y a les arindeäls qui sont de puissants sorciers capables d'ensorceler les animaux pour les transformer en espions. Leur présence instaure un climat de crainte et de suspicion. Ainsi, dans cet univers la notion de paix elfique se pare d'une amertume aigre. 

Avec son habileté coutumière, Pierre Grimbert nous précipite dans cet univers cher au cœur de certains rôlistes, qu'il s'est habilement réapproprié  et où le merveilleux et l'effroi se côtoient pour mieux nous retenir captifs. En quelques pages le décor est posé et le ton de l'aventure est donné. 

Derrière une apparence classique, l'intrigue emprunte en réalité un schéma narratif plus complexe puisque les héros d'hier deviennent les tyrans d'aujourd'hui. En effet, alors que dans la lutte contre le Nécromant, la population de Brenhaven se pensait sauvée avec l'intervention des elfes, il n'en ai rien puisqu'ils vont quitter des chaînes pour en reprendre d'autres. Ainsi, l'univers joue sur la déstabilisation du joueur ou du lecteur en nous brossant un portrait beaucoup plus inquiétant de ce peuple elfique que ce que la culture populaire a véhiculé jusque-là. 

Cela donne l'occasion à l'auteur de s'intéresser aux thématiques inhérentes à la notion de guerre et les conséquences désastreuses de l'occupation sur la population locale à travers les traumatismes, les exactions, les massacres et les rébellions. 

Entre ces lignes, on parle beaucoup de liberté et du prix à payer pour la conquérir ou la reconquérir. C'est un roman politique qui met en lumière les régimes tyranniques et les leviers à disposition pour les renverser. 

Dans Le Lanternier, Pierre Grimbert remet la lutte du bien et du mal au cœur de son récit en explorant notamment les parts d'ombre de ses protagonistes afin de démontrer que la frontière entre les deux est mince. Il joue pas mal sur les faux-semblants et les retournements de situation pour nourrir son texte. 

Alors que l'on pourrait s'attendre à voir le héros archétypal débarqué pour sauver la situation, il n'en est rien car l'auteur table plutôt sur une communauté de personnages que rien ne prédestinait à s'illustrer. 

Tolan incarne le monsieur tout le monde qui souhaite simplement vivre et travailler en toute quiétude. Il n'a pas l'étoffe d'un guerrier et pourtant c'est à lui que Pierre Grimbert confie les rênes de l'aventure. 

Des héros improbables, des situations inversées donnent à ce récit un souffle épique insolite. Des choix qui sont pour le moins divertissants. 

Outre ce nain bougon débarqué ici presque par hasard, il y a son épouse Galaë qui elle, ne manque pas de courage ni d'aplomb. Elle prend vite les choses en mains pour tenter de se sortir des difficultés sans y laisser trop de plumes. Dynamique et frondeuse, sa vivacité de caractère sera clairement un atout pour son mari dans les pires moments de doute. 

Enfin, Veric est un adolescent complètement perdu. Désorienté, confus et semblant amnésique, le jeune homme paraît dissimuler de nombreux secrets. Or, en déterrant ses souvenirs, il pourrait bien réveiller un passé sinistre et mortifère. Son ambivalence en fait un personnage fort intrigant. 

En publiant Le Lanternier, les éditions Mnémos affichent leur ambition de proposer des contenus toujours plus transmédias. Même si ce roman peut tout à fait se lire indépendamment puisque chaque support se suffit à lui-même, si d'aventure, certains souhaitent poursuivre l'expérience afin d'en apprendre davantage, ils auront ainsi le choix des ressources.

Pour conclure :

Avec Le Lanternier, Pierre Grimbert nous offre une nouvelle approche du jeu de rôle et lui donne ainsi des couleurs inédites.

Fantasy à la Carte

A lire sur le blog mes avis sur Le Sang des Parangons, L'Âme des Parangons, Six Héritiers, Le Serment Orphelin, L'Ombre des Anciens  et Le Doyen Eternel

Informations

D'autres avis sont à lire sur la blogosphère : Le Bibliocosme

Pierre Grimbert
Le Lanternier
Pax Elfica
9782382671283
317 pages
Editions Mnémos

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05/07/2024

Raphaël Bardas, Les Fourneaux de Crachemort, éditions Mnémos

Raphaël Bardas, Les Fourneaux de Crachemort, éditions Mnémos 

Après Les Chevaliers du Tintamarre et Le Voyage des Âmes Cabossées, Raphaël Bardas revient en librairie avec une aventure culinaire haute en couleurs. 

Ayant pas mal ri à ses deux premiers romans, je ne pouvais clairement pas faire l'impasse sur ce troisième. 

Résumé :

Suite à un cambriolage qui a mal tourné, Catane, Fauve, Marcello et Mwandishé n'ont pas d'autre choix que d'aller se mettre au vert pour se faire oublier. C'est ainsi que les quatre amis prennent la route et survivre en amusant le tout venant par des spectacles théâtrales et en les régalant de petits plats mijotés. Mais pourront-ils échapper longtemps aux puissances qu'ils ont dérangées ?

Mon avis :

Avec Les Fourneaux de Crachemort, Raphaël Bardas continue l'exploration de l'univers de fantasy dont il avait initié les bases dans ses deux romans précédents. Autres lieux et personnages différents entre ces lignes car on quitte Morguepierre pour Brillanza. 

En outre, l'auteur y introduit des artefacts composés d'un masque de scène, d'une plume, d'une épée et d'un manteau d'hiver qu'il met entre les mains de ses protagonistes. Ces objets à caractère magique donne à ce texte toute sa saveur onirique d'autant qu'ils suscitent l'intérêt de la sorcière de Crachemort dont l'ombre menaçante plane tout du long sur le destin des héros de cette histoire. En effet, alors qu'ils pensaient échapper à leur sentence pour avoir commis ce méfait, les quatre amis se retrouvent persécutés par cette âme maléfique dont on ne sait pas grand chose si ce n'est qu'elle a lancé ses hordes à leurs trousses. 

Qu'elles sortent du bestiaire merveilleux sous une forme retravaillée ou directement de l'imaginaire débridée de l'auteur, bien des créatures s'égaillent entre ces pages pour enchanter notre lecture car il faut bien dire que l'on rencontre de drôles de zouaves par ici. C'est tout le charme de la plume de Raphaël Bardas qui nous entraîne toujours dans des péripéties impossibles à la rencontre d'êtres surprenants. 

Ce livre est une ode à la bonne chère et au théâtre. De représentation en représentation, les personnages nous embarquent dans une folle sarabande pour tenter d'échapper à leur passé et se réaliser par eux-mêmes. 

Les Fourneaux de Crachemort s'avère donc être un récit d'apprentissage pour chacun d'entre eux car ils s'y cherchent et souhaitent se tracer leur propre chemin et non celui décidé par leurs parents comme c'est le cas pour Catane qui refuse de se soumettre au mariage choisi par son père.

Raphaël Bardas y entremêle les histoires personnelles de ses protagonistes à une aventure épique dans laquelle il instille des clins d'œil à des grands noms du théâtre ou à des œuvres littéraires. Sa plume se fait ainsi la complice des lecteurs, tantôt drôle tantôt grave tout en les maintenant dans un suspense latent face à la finalité incertaine qu'il a réservée. 

18/06/2024

Alex Nikolavitch, Trois coracles cinglaient vers le couchant, éditions Les Moutons électriques

Alex Nikolavitch, Trois coracles cinglaient vers le couchant
éditions Les Moutons électriques 

Alors qu'Alex Nikolavitch vient de mettre un point final à son cycle arthurien et après avoir lu et grandement apprécié L'ancelot avançait en armes puis Le garçon avait grandi en un gast pays, je me suis dit qu'il était plus que temps de sortir le premier volet de ma PAL pour enfin le lire avant de refermer à mon tour la porte sur cette belle réécriture. 

Me voici donc avec Trois coracles cinglaient vers le couchant entre les mains et sans surprise, c'est Uther qui y tient le premier rôle.

En effet, quoi de mieux que de remonter aux origines pour mieux comprendre et apprécier le mythe.

Résumé :

Sur la suggestion d'un étrange barde prénommé Cynddylan, Uther embarque avec lui quelques hommes sur trois coracles vers une destination inconnue. Cette expédition au fil de l'eau est l'occasion pour lui de se remémorer ses souvenirs et son passé guerrier marqué par des victoires et des défaites pour repousser l'envahisseur. Arrivé à un tournant de sa vie, trouvera-t-il un nouveau sens à lui donner ? 

Mon avis :

On ne peut pas parler du mythe arthurien sans revenir sur ses origines. C'est la raison pour laquelle Alex Nikolavitch ouvre le bal avec un portrait d'Uther Pendragon. Guerrier et meneur d'hommes, il prend la suite de son père pour bouter hors de la Bretagne les Saxons, les Jutes et les Angles qui n'ont de cesse d'envahir son île.  Ainsi, l'auteur a tissé son récit des Trois coracles cinglaient vers le couchant autour des luttes menées par ce chef de clan et égrenées par ses victoires et ses défaites. 

Dans son roman, Alex Nikolavitch s'est emparé de ses faits d'armes car ils ont façonné l'histoire de la Bretagne et apparaissent, de facto, comme le parfait écrin pour accueillir sa réécriture. Ainsi, il s'est réapproprié les éléments notables du mythe comme l'assistance d'un célèbre mage, l'usage d'un subterfuge pour pousser une femme à l'infidélité ou encore l'acquisition d'une épée prodigieuse. Ils sont les repères pour éclairer le chemin des lecteurs se plongeant dans cette histoire universelle. 

Au fil des pages, on va partager le quotidien et les souvenirs d'Uther. On goûte également à son introspection personnelle le menant sur une voie empreint de magie. 

En effet, il ne peut être question du mythe arthurien sans évoquer le merveilleux qui l'entoure. Déjà, il est fait mention du don de double vue qui permet à Uther de percevoir l'invisible. Ensuite, en s'embarquant sur les flots, il va non seulement donner une nouvelle impulsion à sa destinée mais aussi rencontrer ses dieux. C'est la porte d'entrée choisie par l'auteur pour introduire le peuple féérique qui accompagne les hommes dans le façonnage de leur légende. Pour Uther, le représentant le plus prégnant entre ces lignes est bien entendu Cynddylan qui n'est autre que Merlin. Dans ce premier volet, Alex Nikolavitch nous en livre une réinterprétation très sombre. Il est une créature surnaturelle insaisissable et mystérieuse dont il est difficile de connaître les pensées et de comprendre les actes. Sa présence instille au texte toute la dimension folklorique propre au mythe et lui donne même une aura envoûtante. Bien que la magie soit résiduelle, davantage suggérée qu'explosive, l'enchantement, lui, est total car la plume d'Alex Nikolavitch est habile pour redonner vie à certains épisodes des légendes arthuriennes et nous entraîner dans un voyage teinté de nostalgie. 

26/01/2024

Patrick Jézéquel & Séverine Pineaux, Féeries & Légendes des Dragons, éditions Au Bord des Continents

Patrick Jézéquel & Séverine Pineaux, 
Féeries & Légendes des Dragons
éditions Au Bord des Continents 

Les éditions Au Bord des Continents sont connues pour leurs publications à caractère merveilleux ou à destination de la jeunesse. Recueils, albums, illustrés viennent enrichir chaque année le catalogue de cet éditeur breton qui met un point d'honneur à mettre en valeur le légendaire de la région.

Dans la collection Féeries & Légendes, j'ai découvert celui consacré aux dragons signé  par Patrick Jézéquel et Séverine Pineaux grâce une amie qui me l'a offert car elle connaît bien mon goût pour l'imaginaire. J'en profite pour à nouveau la remercier.

Quand il n'enfile pas sa casquette d'éditeur, Patrick Jézéquel aime laisser courir sa plume pour nous conter les légendes oubliées. Artiste, illustratrice et dessinatrice, Séverine Pineaux évolue dans un univers de féerie et de fantasy. Gothic Faëries, Les Chats Enchantés et Ysambre sont sans doute ses œuvres les plus marquantes dans lesquelles on retrouve une féerie s'épanouissant dans une nature sublimée. 

Créature légendaire, le dragon ne cesse d'inspirer depuis la nuit des temps. Or, dans le recueil Féeries & Légendes des Dragons, Patrick Jézéquel et Séverine Pineaux en ont fait un sujet d'étude pour revisiter ses représentations dans le temps et l'espace. 

Dans cet ouvrage aux allures de grimoire, Patrick Jézéquel enchaîne les histoires de dragons empruntant parfois au mythe arthurien, parfois à la mythologie grecque ou viking. Ainsi, dans "Merlin et les Dragons", l'auteur nous conte l'intervention de Merlin auprès du roi Vortigern afin de comprendre pourquoi la construction de son château semble être frappé de malédiction . En effet, à peine achevée l'une des tours de la forteresse ne cesse de s'effondrer. La cause de ce phénomène est la présence de deux dragons dans une cavité souterraine sous les fondations de la forteresse, qui n'arrêtent pas de s'affronter ébranlant ainsi ladite construction. L'ordre est donc donné de libérer les créatures afin qu'elles terminent leur combat à l'air libre. La victoire de l'une d'elle est d'ailleurs interprétée par le roi des Bretons comme un bon présage quant au triomphe des Celtes sur les Saxons. 

Autre héros mythique qui a eu maille à faire avec ces êtres ailés tout droit sortis du bestiaire merveilleux, c'est Hercule. Il doit détruire l'hydre en s'échinant à couper en vain ses têtes qui ne font que de se multiplier et que l'on retrouve dans la nouvelle intitulée "L'hydre" qui lui est dédiée. 

Mais, plus que de mettre en valeur ce patrimoine culturel fabuleux, Patrick Jézéquel fait aussi un petit état des lieux de toutes les espèces de dragons que l'on peut rencontrer. Il s'attarde sur ses particularités, ses habitudes et son habitat comme dans "Dragon des marais", "Dragon des mers" ou encore dans "Dragon des lacs". Tout est minutieusement décrit pour nous en faciliter la représentation visuelle. 

L'auteur digresse parfois en s'aventurant auprès d'autres animaux chimériques proches physiquement du dragon comme la tarasque, le basilic ou encore la vouivre.

Gardien des lieux sacrés (dans "Gardien de trésors") ou allégorie du paganisme (dans "Dragon de terre"), d'où l'image du dragon pourfendu par le héros et symbolisant le triomphe du christianisme sur le paganisme.

Chaque histoire s'accompagne donc de magnifiques illustrations réalisées par la talentueuse Séverine Pineaux. Simples croquis ou scènes élaborées, le dragon se déploie sous toutes ses formes. Merveilleusement représenté, le découvrir à chaque page tournée demeure un ravissement pour les yeux. Ainsi, on est tantôt captif de son regard pénétrant lorsqu'on le croise, tantôt on retient notre souffle de peur de subir sa puissance de feu. 

La magie prend vie grâce à la plume et au crayon de ces deux artistes qui nous entraînent à perdre haleine dans bien des aventures.

En somme, Féeries & Légendes des Dragons se présente comme le parfait petit guide pour s'imprégner de cet imaginaire ancestral qui continue d'en faire rêver plus d'un.

Fantasy à la Carte

Informations

Patrick Jézéquel
Séverine Pineaux
Féeries & Légendes des Dragons
9782370510334
157 pages
Editions Au Bord des Continents

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18/08/2023

Hélène Besse, Les Émissaires du Lien, éditions Inceptio

Hélène Besse, Les Émissaires du Lien, éditions Inceptio 

Après la publication au format numérique d'un roman feuilleton intitulé Les Voies de Brume en 2021, Hélène Besse signe avec Les Émissaires du Lien, un nouveau récit chez Inceptio en 2022. 

Mais point de steampunk cette fois-ci car l'autrice nous propose plutôt une fantasy matinée de notes postapocalyptiques. 

Résumé :

A force d'exploitation excessive de la terre par des humains aveuglés par le pouvoir, d'anciens dieux se sont réveillés, bien décidés à se venger. Or depuis 60 ans, le genre humain est dominé par le monde végétal et animal qui s'est nettement accru au point de confiner dans des forteresses la poignée d'hommes et de femmes survivants. Mais, subsistent quelques rares élus choisis pour maintenir un lien ténu entre ces deux mondes voués à ne plus s'entendre. L'ensorceleuse Titania est l'une d'elle. Elle est la seule à vivre au cœur de la forêt, accompagnée de Puck, un chat peu ordinaire puisqu'il parle. Un jour, alors qu'elle est sommée de se rendre sans tarder auprès du seigneur d'e la grande cité d'Anguélarade, elle pressent l'imminence d'un grand danger. Pour autant, arrivera-t-elle à faire pencher la balance du côté de la paix? 

Mon avis :

Les Émissaires du Lien s'inscrit dans un cadre médiéval où la magie existe mais est crainte et proscrite. En effet, elle est considérée comme l'unique responsable du Réveil qui a donné lieu à la mutation des animaux les transformant en créatures gigantesques servant d'impitoyables gardiens à la forêt dotée d'une conscience défensive. Or, la menace qu'ils font peser sur les humains instille à cet univers fantasy une ambiance clairement horrifique car à chaque écart perpétré, le couperet vengeur ne manque pas de tomber. Ainsi, le lecteur est de suite mis au pas avec ce texte qui promet déjà d'être rude malmenant aussi bien les protagonistes de cette histoire que la nature dans laquelle ils évoluent qui a finalement juste besoin de protection. 

L'ombre des dieux s'incarne ici dans la figure d'Enori qui nous apparaît sous les traits d'une sorte de Grand-Mère Feuillage (personnage fictif du dessin animé, Pocahontas). Elle est le contact de Titania et matérialise l'âme de la forêt. L'origine celtique de son nom place son existence au rang de légendes et ajoute au texte un caractère mystique. 

En outre, Hélène Besse n'a pas manquer de parsemer son roman de clins d'œil au Petit Peuple des fées avec par exemple, Titania qui désigne la reine des fées des contes populaires anglais et le lutin Puck qui sert le couple royal formé par Oberon et Titania dans Le Songe d'une nuit d'été de William Shakespeare. 

Dans Les Émissaires du Lien, l'autrice a construit son récit en alternant présent et passé afin de donner aux lecteurs les clés de compréhension quant aux origines du Réveil. Cela a également l'intérêt de rythmer grandement la lecture. 

Les Émissaires du Lien est un récit engagé, riche d'un propos écologiste dans lequel l'autrice alerte sur les dangers d'une activité humaine trop excessive, centrée sur la destruction plutôt que sur la protection. Derrière ce roman, il y a une vraie leçon d'humilité pour l'humanité qui doit toujours garder en mémoire qu'elle n'est qu'un élément d'un tout et non le tout lui-même comme elle a majoritairement tendance à le penser. Le texte est donc tantôt âpre, tantôt bouleversant et ne laisse en aucun cas indifférent surtout lorsque l'on a une vraie conscience écologique marquée par une volonté de préservation de la faune et de la flore. 

Dans son livre, Hélène Besse met en scène une galerie de personnages assez conséquente qui nécessite un temps d'appropriation. A titre personnel, il m'a fallu un peu de temps pour me familiariser à ce petit monde et à cette histoire sans doute aussi parce que ma concentration n'y était pas au début pour des raisons extérieures à la lecture. Néanmoins, j'ai trouvé particulièrement charmant le duo formé par Titania et Puck. Il faut dire que les humeurs et l'ironie du félin apportent une belle touche d'humour. Avec sa personnalité bien trempée, Puck égaye clairement les lignes de ce roman. Quant à Titania, elle est l'héritière d'une lignée de sorcières dont le rôle est de préserver l'équilibre entre les mondes végétal, animal et humain. Au même titre que ses aïeules, elle incarne cette génération de femmes courageuses, empathiques et téméraires dont le touchant combat semble voué à l'échec. Pourtant, elles le mènent jusqu'au bout et ce, même en dépit de l'adversité. Leur sens du sacrifice interpelle, force le respect et doit même être source de réflexion, voire d'inspiration pour le message transmis.

Pour conclure :

Les Émissaires du Lien est un texte puissant, porteur d'un message fort qui remue pas mal du fait de la justesse de ce qui est décrit. En lisant ce roman, j'ai découvert la plume délicate et sensible d'une autrice que je ne connaissais pas jusque là mais dont je vais très certainement suivre l'actualité littéraire. 

Fantasy à la Carte

A lire sur la blogosphère les avis de : Les Mille et une Pages, L'antre de Myfanwi et La citadelle de mes lectures

Informations

Hélène Besse
Les Émissaires du Lien
9782384110193
396 pages
Editions Inceptio

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11/08/2023

Ariel Holzl, Le Règne des Chimères, T.2, Les Royaumes Immobiles, éditions Slalom

Ariel Holzl, Le Règne des Chimères, t.2, 
Les Royaumes Immobiles
éditions Slalom 

Sélectionné pour le PLIB 2023 jeunesse et toujours en lice dans la dernière ligne droite des cinq finalistes, La Princesse sans Visage a su ensorceler la communauté de l'Imaginaire. La qualité de son univers y est sans doute pour quelque chose. Or, avec Le Règne des Chimères qui clôture cette duologie des Royaumes Immobiles, le temps est venu de lever le voile sur ses origines. 

Après un premier tome prometteur, j'ai poursuivi l'aventure sans plus attendre. 

Résumé :

En dépit de sa victoire au Sacre des Saisons, Ivalie a dû fuir dans l'Ailleurs avec le changeling Odd pour sauver sa vie. En effet, suite à la trahison de Séline qui a tué sa mère Titania pour prendre sa place à la tête de Radiance et celle encore plus amère d'Hélionie qu'elle pensait être son amie, Ivalie n'est plus en sécurité dans les royaumes immobiles. Seulement dans sa fuite, sa malédiction est revenue, condamnant Odd à sombrer peu à peu dans la folie. Alors, comment survivra-t-elle dans ce monde inconnu avec pour seul allié, un ami condamné à devenir son ennemi ? Et pourra-t-elle seulement espérer pouvoir remettre de l'ordre dans le chaos qui secoue maintenant les Royaumes Immobiles divisés ? 

Mon avis :

Avec Le Règne des Chimères, on change d'ambiance puisqu'Ariel Holzl emprunte les codes classiques du genre à travers la lutte manichéenne qui se dessine en filigrane du récit. En effet, on quitte les rives de la compétition où tous les coups étaient permis pour rentrer dans une véritable conquête du trône qui s'organise en deux temps avec d'abord la recherche d'alliés, puis l'affrontement. Ainsi, on est plongés dans des batailles épiques, mâtinées de magie qui s'exprime autant par les sorts lancés que par les chimères, nées de l'esprit des êtres féériques. On assiste donc à des combats aériens, à dos de créatures fantasmagoriques, pleins de bruit et de fureur comme la fantasy épique aime s'enorgueillir. En outre, l'auteur a ajouté une touche steampunk à son univers merveilleux en introduisant des entités faites de métal, ressemblant étrangement à des machines et difficiles à abattre pour les feys qui craignent le fer froid. Un univers qui témoigne de l'ingéniosité de son auteur donnant à nouveau vie à un cadre narratif aussi enchanteur que fascinant.  

Avec Le Règne des Chimères, on est sur un roman d'action où la tension monte crescendo jusqu'à atteindre son paroxysme dans les derniers chapitres du livre. C'est aussi un roman où les révélations vont bon train avec le dénouement qui se profile déjà à l'horizon. Ainsi, derrière les royaumes immobiles, il y a un monde d'en haut et un monde d'en bas. A coup de trahisons, de mensonges et d'usurpations, certains ont été relégués aux oubliettes, réfugiés sous terre, à l'abri des regards et effacés des mémoires. Alors, la quête d'Ivalie sonne pour eux l'heure de la revanche en entrant à leur tour dans la lutte. 

18/02/2023

Victor Dixen & Eder Messias, L'Inquisiteur et son Ombre, tome 1, Vampyria Inquisition, éditions Soleil

Victor Dixen, L'Inquisiteur et son Ombre, tome 1, Vampyria Inquisition, éditons Soleil 

Après un premier cycle et l'édition d'un tarot à l'effigie des personnages de sa série, Victor Dixen vient d'ajouter une nouvelle dimension à son univers de Vampyria avec cette première bande dessinée. En effet, en octobre 2022 paraît L'Inquisiteur et son Ombre aux éditions Soleil

Si Victor Dixen est à l'écriture du scénario, la maison d'édition, elle, a confié la réalisation et la colorisation des dessins  à Eder Messias

Maintenant que j'ai lu la trilogie dont vous pouvez retrouver chacun de mes avis sur le blog (La Cour des Ténèbres, La Cour des Miracles et La Cour des Ouragans), j'ai pu enfin me pencher sur cet autre volet du célèbre univers de Victor Dixen. 

Résumé :

Dans L'Inquisiteur et son Ombre, on rencontre Sylvère, jardinier au château désargenté de Torteval. Il entretient une liaison secrète avec Daphné, une orpheline recueillie par la famille servant de lectrice à la baronne. Tout bascule la nuit où débarque celle qui se fait appeler la duchesse de Cocagne et qui, en jouant aux cartes avec le fils des barons, remporte l'objet de la mise, à savoir Sylvère. Ni une ni deux, elle embarque son dû dans son carrosse, avec Daphné en prime qui la supplie de l'emmener, et reprend la route vers une destination qu'elle seule connait. Peu de temps après débarque un inquisiteur royal à la baronnie de Torteval qui apprend le passage de la duchesse et reconnaît en elle la renégate surnommée "la collectionneuse" et décide de la prendre en chasse. La question va être de savoir ce qu'il va advenir de Sylvère et de son aimée, maintenant qu'ils sont tombés entre les crocs de cette vampyre ? 

Mon avis :

L'Inquisiteur et son Ombre prend cadre dans l'univers de Vampyria mais peut se lire de manière indépendante puisque Victor Dixen y met en scène de nouveaux personnages embringués dans une intrigue inédite. Sa société de la Magma Vampyria conserve donc le même fonctionnement et sa division en quatre ordres : l'ordre immortel constitué par les vampyres de haute noblesse et les trois ordres mortels où l'on retrouve les hobereaux de la basse noblesse, les docteurs de la Faculté hématique et les roturiers. De même que le code mortel s'applique toujours à ces derniers en régissant leur vie de manière très stricte. Ainsi, l'ombre de Louis XIV plane sur ce nouveau récit et s'incarne notamment dans la figure de l'inquisiteur royal chargé de faire appliquer les lois implacables de l'immuable, notamment en ce qui concerne la transmutation surnuméraire illégale réalisée par des vampyres hors la loi. Or, il s'agit bien ici du fil directeur choisi par Victor Dixen pour Vampyria Inquisition promettant aux lecteurs une nouvelle aventure au long cours pleine de rebondissements. 

28/11/2022

Anne Rice, Entretien avec un vampire, éditions Pocket

Anne Rice, Entretien avec un vampire, éditions Pocket

Autrice incontournable de littérature fantastique, Anne Rice compte une quarantaine de livres à son palmarès. Son enfance baignée dans la culture de la Nouvelle Orléans, faite de vaudou et d'autres croyances lui a inspirée l'élaboration de récits fantasmagoriques. 

Alors que sa série Chroniques des Vampires connait un regain d'intérêt avec la nouvelle adaptation d'Entretien avec un vampire sur Netflix, il était temps que je m'intéresse à la question en plongeant dans le premier tome. 

Résumé :

Dans Entretien avec un vampire, on fait la connaissance d'un vampire prénommé Louis qui a accepté de livrer son histoire à un inconnu venu l'interviewer. Tout commence deux siècles plus tôt alors qu'il est un riche propriétaire terrien en Louisiane, il sombre peu à peu dans la dépression après le décès brutal de son frère. Alors qu'il n'a plus goût à rien, il fait la rencontre d'un être mystérieux tantôt fantasque, tantôt irascible qui va lui offrir une immortalité aussi inattendue que cruelle. 

Mon avis :

Avec Entretien avec un vampire, Anne Rice signe un récit à l'ambiance sombre et intimiste qui redonne au vampire ses attributs ténébreux de chasseur avide. Esclave de ses bas instincts, il ne résiste pas à l'appel du sang. Sous la plume d'Anne Rice, il prend les traits d'un prédateur qui arpente inlassablement le monde, quitte à en devenir fou. 

Ce récit investit d'abord la Louisiane du 18e siècle pour se nourrir du folklore local et donner naissance à des légendes que l'on voit s'épanouir en Europe et particulièrement à l'Est où les protagonistes se rendent pour finir par s'établir à Paris. L'autrice nous plonge dans un réalisme où le fantastique survient à la faveur de la nuit. On y retrouve le charme propre aux récit fantastiques du 19e siècle. Ici, Anne Rice s'est beaucoup recentrée autour de la personnalité du vampire. 

En effet, en suivant Louis dans l'errance de ses premières années en tant que vampire, l'autrice s'est surtout intéressée à la psychologie de cette créature surnaturelle qui se retrouve tiraillée entre sa nature démoniaque et son humanité fugitive. D'autant que Louis est un vampire atypique qui va longtemps refuser sa condition, préférant se substanter du sang des animaux que de celui des humains. 

Elle s'appesantit également sur la relation fusionnelle parfois toxique qui lie un vampire à son créateur. On goûte ici à la fascination quasiment morbide de Louis pour Lestat qui le craint et pourtant semble incapable de s'en détacher. Lestat est un être inconstant et imprévisible. Or, en gardant par-devers lui les secrets du vampirisme, il va mettre Louis dans la posture délicate de la créature qui avance à tâtons dans ce monde fait d'inconnues autour des dangers qui le guettent ou des possibilités qui l'attendent. 

Dans ce premier volet des Chroniques des Vampires, Anne Rice explore la quête d'un vampire qui doit apprendre à renoncer à son humanité pour aller de l'avant et se forger une nouvelle identité. 

Au cours de ses pérégrinations, Louis va être soumis à des émotions fortes : la tentation, la peine, le regret ou la passion. C'est un texte où il y a peu d'action mais où l'autrice joue beaucoup sur l'émotionnel et la sensation pour faire ressentir aux lecteurs tous les sentiments par lesquels passe Louis au cours de sa vie de mort-vivant. 

A travers la figure du vampire torturé, Anne Rice introduit un élément dérangeant dans son roman, mais qui lui est nécessaire pour aborder la notion de responsabilité qu'implique un grand pouvoir car il faut notamment en assumer toutes les conséquences aussi bien pour soi que pour autrui.

Entretien avec un vampire est un huis clos qui met en scène très peu de personnages mais permet à l'autrice d'explorer tous les visages que peut revêtir le vampire. Ainsi, si Louis incarne le vampire tourmenté, Lestat, lui, est plutôt belliqueux tandis que Claudia est orgueilleuse. Tous donnent une vision personnelle et unique de l'immortalité offrant ainsi aux lecteurs matière à réflexion. 

En conclusion :

Lire Entretien avec un vampire, c'est plonger ou replonger dans le premier roman qui a inauguré les nombreux récits qui ont fait le succès d'une plume devenue incontournable pour le genre. On ne peut que vous recommander de vous y plonger surtout si vous aimez frissonner à l'atmosphère enténébrée du fantastique. 

Fantasy à la Carte

Informations

Anne Rice
Entretien avec un vampire
9782266134859
511 pages
Editions Pocket

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25/06/2022

A.D. Martel, Les Disparus d'Arkantras, tome 1, De Rouages & de Sang, éditions Scrineo

A.D. Martel, Les Disparus d'Arkantras, tome 1, 
De Rouages & de Sang
éditions Scrineo

De la fantasy à la science-fiction, en passant par le fantastique, le steampunk et l'historique, la plume d'A.D. Martel est vagabonde et aime explorer tous les imaginaires. 

En mars 2022, le tome 1 de sa série De Rouages et de Sang est édité chez Scrineo.

L'ayant gagné lors d'un concours organisé sur le site d'ActuSF, je tenais d'abord à les remercier, ainsi qu'aux éditions Scrineo pour l'envoi de ce livre. 

A Arkantras vivent Rowena et Eugène. Ils ne se connaissent pas. Elle est une orpheline qui se rêve mécanicienne tout en faisant tout pour échapper à l'orphelinat, tandis que lui souhaite faite carrière dans le journalisme pour prendre sa revanche sur un père qui l'a renié et défendre les plus nobles causes. Après un premier papier dénonçant la corruption politique de la ville, Eugène piétine un peu jusqu'à ce que son rédacteur en chef le charge d'enquêter sur des disparitions d'enfants issus des quartiers populaires. Des premières investigations peu concluantes à des pistes sérieuses, Eugène s'embarque dans cette affaire louche qui ne manquera pas de le mettre en danger et où il fera de nombreuses rencontres dont celle de Rowena, peut-être au bon endroit et au bon moment pour l'aider, qui sait ? 

Dans De Rouages et de Sang, A.D. Arkantras nous plonge dans une enquête qui prend cadre dans une ambiance steampunk très réussie. Déjà Arkantras est une cité industrielle marquée par un progrès technique s'exprimant notamment par l'usage d'aéronefs pour ceux qui en ont les moyens. De même que la cité s'est dotée d'araignées géantes mécaniques servant de véhicules aux policiers, chargés de faire respecter le couvre-feu imposé aux enfants. Pour cela, ils quadrillent la ville chaque nuit afin de ramasser les traînards et de les envoyer à l'orphelinat. En outre, il y est également fait mention d'automates utilisés aussi bien comme domestiques, comme jouets et même comme armes. 

Tout est mécanisé dans cette cité à la fracture sociale franche. L'autrice met ici en exergue deux mondes, celui des nantis qui vivent égoïstement dans l’opulence et l'excès se moquant éperdument des autres, et celui des plus pauvres, opprimés dans leurs conditions et méprisés dans l'indifférence de tous. D'ailleurs, en confrontant l'enlèvement de personnes issues des castes les plus pauvres au désintérêt des policiers qui les considèrent comme de simples faits divers, l'autrice porte la réflexion sur le réel dédain des pouvoirs publiques lorsque les victimes sont des démunis sans relations.  

Les investigations menées par les deux principaux personnages de cette histoire nous amènent à côtoyer une violence inouïe, l'horreur la plus crue sous le vernis de meurtres sordides et même à mettre au jour les plus vils secrets d'une cité infestée par le malin. Même si ce roman s'adresse à un jeune public, A.D. Martel n'épargne pas ses lecteurs en les confrontant à la cruauté humaine, à l'injustice sociale et à la dureté de la vie. 

Pour autant, à travers des personnages lumineux, elle nous parle aussi d'amour, de courage et d'entraide car ces derniers portent toutes ses valeurs et même plus encore. 

07/09/2021

Jean-Claude Dunyach, L'enfer du Troll, éditions L'Atalante

Jean-Claude Dunyach, L'Enfer du Troll, éditions L'Atalante

Ne vous fiez pas à la mine rébarbative du Troll sur cette couverture, signée Gilles Francescano car le Troll de Jean-Claude Dunyach peut se montrer, quand il le veut, très urbain. Il faut juste savoir bien le prendre, or avec un verre d'eau ferrugineuse, cela devrait faire l'affaire. 

Vous l'avez compris, aujourd'hui, on continue l'excellente série de Jean-Claude Dunyach, en plongeant dans le tome 2, intitulé, L'Enfer du Troll et paru en 2017, aux éditions L'Atalante

Après avoir claqué la porte de la mine, le Troll a décidé de se consacrer exclusivement à sa dulcinée en l'aidant à améliorer son salon de coiffure. Mais quand son ancien patron vient toquer à sa porte pour lui confier une mission, il n'a aucune envie d'accepter, mais c'est sans compter sa très persuasive trollesse. C'est comme ça que, sans crier gare, il embarque sur un paquebot en compagnie de Cédric, de Sheldon, de Brisène et de toute une flopée de chevaliers pour mener une quête dont il n'appréhende pas encore bien la finalité. 

Dans ce deuxième volet, on retrouve les héros de la première heure qui s'apprêtent à vivre de nouvelles aventures. C'est ainsi que le Troll et sa trollesse accompagnent Brisène et Sheldon dans leur voyage de noces. Cela donne l'occasion à Jean-Claude Dunyach d'explorer les aléas de la vie de couple avec un Sheldon soumis, complètement sous la coupe de sa femme. Avec son regard désabusé et sa plume caustique, l'auteur nous promet ici quelques moments choisis de scènes d'amour, parfois vache mais toujours sincère.

Derrière ces relations hautes en couleurs qui nous tirent quelques rires entendus, Jean-Claude Dunyach nous plonge également dans une nouvelle quête car tel est le but de tout héros d'épopée qui se respecte. Bien que toujours louable, la mise en œuvre de celles-ci ne manque jamais de rocambolesque et d'absurdité. C'est la grande qualité des récits de Jean-Claude Dunyach qui se montrent toujours d'une grande finesse et d'une belle perspicacité. Aussi, il revisite les éléments traditionnels du genre fantasy en les interrogeant. Par exemple, il s'intéresse ici à la figure du héros en questionnant sa fonction et son rôle. Pour cela, il utilise celle très usitée du chevalier en soulevant leurs difficultés, notamment celle de trouver le Graal. Raison pour laquelle, Arthur les a inscrit à une formation professionnelle afin qu'ils développent des stratégies à mettre en œuvre pour enfin atteindre leur objectif. Féru de nouvelles technologies, Sheldon a même été plus loin en développant une application GPS capable de détecter la sainte relique, si d'aventure cette dernière se trouvait dans les parages.  

Par le truchement de ces scènes décalées et drôles, on reconnaît, bien entendu, une métaphore de la vie d'entreprise, à travers son carcan protocolaire et ses obligations imposées aux salariés. L'Enfer du Troll cache en réalité une satire de la vie professionnelle dans ce qu'elle peut avoir d'absurde et de pesant. 

Entre un humour grinçant et une vision acérée de notre société, Jean-Claude Dunyach sait toujours trouver les mots pour nous divertir avec la juste dose de dérision. 

Fantasy à la Carte

A lire aussi sur le blog, mes avis sur L'Instinct du Troll et L'Empire du Troll

Informations
Jean-Claude Dunyach
L'Enfer du Troll
9782841727605
208 pages
    Éditions L'Atalante

21/08/2021

Jean-Claude Dunyach, L'Instinct du Troll, éditions L'Atalante

Jean-Claude Dunyach, L'Instinct du Troll, éditions L'Atalante

Il y a quelque temps, je vous partageais sur le blog mon coup de cœur pour L'Empire du Troll de Jean-Claude Dunyach. 

En effet, j'ai littéralement craqué pour cette plume mordante et drôle, voilà pourquoi, aujourd'hui, j'ai décidé de reprendre ma découverte de cette série en m'attaquant au premier volet, L’Instinct du Troll

On y suit les tribulations d'un Troll, un tantinet désabusé, mais qui fait bien souvent contre mauvaise fortune bon cœur. Quand on est contremaître dans une mine et que l'on doit encadrer toute une équipe de nains, on n'est déjà que trop occupé. Mais quand votre supérieur vous charge de diverses missions annexes, tout en vous coltinant son neveu, vous  n'êtes pas en mesure de refuser même avec votre carrure de Troll. C'est ainsi que le Troll, accompagné du stagiaire Cédric s'embarquent dans une série d'aventures ubuesques et pas toujours très maîtrisables. 

Avec L'Instinct du Troll, Jean-Claude Dunyach inaugure une série de romans fantasy humoristique, digne du grand Terry Pratchett. La légèreté du ton employé et les situations volontairement décalées, voire cocasses donnent à ce texte une saveur épicée bien agréable. 

Ici, l'auteur a emprunté des éléments aux légendes arthuriennes pour venir les confronter à des problématiques modernes. De fait, entre ces pages, on croise un Perceval devenu père de famille qui souhaite marier sa fille à un chevalier, obligeant cette dernière à ruser pour contourner cet ultimatum. C'est là qu'entre en scène le Troll pour démêler la situation en donnant de sa personne. Ainsi, Jean-Claude Dunyach se réapproprie habilement le merveilleux pour le transposer dans notre société contemporaine. 

Aussi, on suit ici le Troll dans ses démêlés administratifs qui l'oblige à se frotter à la lourdeur bureaucratique. De même qu'il se voit décrédibiliser dans sa fonction directionnelle par l'arrivée d'un réformateur capitaliste qui compte bien le supplanter dans le commandement de ses employés.

Sollicité sur tous les fronts, notre cher Troll prend tout de même le temps de renouer avec son amour de jeunesse. Quel régal de voir ce grand échalas minéral s'empêtrer dans ses émotions, tel un adolescent, pour exprimer ses sentiments et se rapprocher de sa belle. 

Avec L’Instinct du Troll, on a un univers de fantasy très bien construit et peuplé par des créatures féeriques, caractéristiques du bestiaire merveilleux. 

Personnellement, j'aime beaucoup l'écho au monde moderne que l'auteur y fait même si on n'est pas obligé de faire un parallèle avec notre société. En effet, on peut juste apprécier ce texte pour ce qu'il est avant tout, à savoir une aventure divertissante. 

Au final, Jean-Claude Dunyach nous offre une lecture très feel-good qui est un vrai baume apaisant pour nos humeurs déprimées et angoissées du moment. 

Fantasy à la Carte

A lire sur le blog mon avis sur L'Empire du Troll

Informations

Jean-Claude Dunyach
L’Instinct du Troll
9782841727094
192 pages
Editions L'Atalante

07/07/2021

K. Berrouka, S. Lainé, J-A. Debats, M. Of Glencoe, J-L. Del Socorro & Jérôme Vincent, Vingt plus 1, éditions ActuSF

Livre anniversaire Vingt et 1, éditions ActuSF

ActuSF a 21 ans cette année et pour l'occasion, ils ont mis les petits plats dans les grands. Outre le fait d'avoir organisé une soirée événement en ligne avec de nombreux invités, ils ont également eu la bonne idée de lancer une opération commerciale consistant à recevoir un recueil de nouvelles collector pour deux livres achetés.

Bien entendu, je n'ai pas résisté et je m'en viens donc vous parler de ce petit livret.

Clin d’œil aux fanzines dont ActuSF est issu, on retrouve dans l'aspect même du livre ce côté vintage avec une couverture surannée figurant un Cthulhu surpris en pleine lecture. J'avoue que l'objet en lui-même est déjà très sympathique.

Sans surprise, des auteurs emblématiques de la maison d'édition y ont pris place pour nous divertir avec des nouvelles inédites ou non.

Ce sont donc Karim Berrouka, Morgan of Glencoe, Sylvie Lainé, Jean-Laurent Del Socorro et Jeanne-A Debats qui s'y sont collés. 

Et on commence avec la plume déjantée de Karim Berrouka. Sans avoir lu aucun de ses textes jusque-là, sa réputation le précède alors je n'ai pas été étonnée de plonger dans une nouvelle décalée frôlant l'absurde où il est tout de même question du très préoccupant sujet des bouleversements climatiques. 

Marqué par première rencontre avec Sylvie Lainé, Jérôme Vincent nous fait l'honneur de reglisser ici l'une de ses nouvelles, déjà parue dans l'anthologie 69. On y partage l'expérience érotique et délirante d'un homme qui donne un tout autre sens à la passion charnelle. 

Quant aux trois autres auteurs, on a le plaisir de replonger dans leur univers respectif à travers chacun de leur texte. Moi qui les apprécie tous, je suis aux anges de retrouver, par exemple, le caustique et très séduisant Navarre qui piste son créateur sous un soleil de plomb. Au passage, je vous recommande la trilogie de L'Héritière de Jeanne-A Debats. 

De même que j'ai également pris un grand plaisir de rejoindre Yuri en Keltia (La Dernière Geste de Morgan of Glencoe) où elle rencontre pour la première fois la famille de sa mère pour vivre une cérémonie familiale troublante. 

Pour finir, un mot sur Jean-Laurent Del Socorro qui nous propose ici une nouvelle toute en sensibilité et émotions nous remettant sur la route de certains de ses héros de Royaume de Vent et de Colères comme le jeune Gabin dont les premières années d'existence vous tirent les larmes. Quel talent !

Un grand merci à tous pour ce petit intermède littéraire qui m'a ramenée sur des chemins familiers tout en m'en faisant découvrir de nouveaux.

Longue vie à ActuSF !

Fantasy à la Carte

Collectif
 Vingt plus 1 
Editions ActuSF

26/01/2021

Raphaël Bardas, Aux traîtres indomptables, Capharnaüm, L'Héritage des Dragons

Raphaël Bardas, Aux traîtres indomptables, Capharnaüm, L'Héritage des Dragons

La plume de Raphaël Bardas, c'est la belle découverte de l'année 2020. Pépite de l'Imaginaire des éditions Mnémos, son roman Les Chevaliers du Tintamarre, m'a offert un intermède d'une lecture rafraîchissante et cocasse. Mais avec Aux traîtres indomptables, je découvre que Raphaël Bardas n'est pas qu'un simple écrivain de talent car il est aussi un scénariste de jeux de rôle parmi lesquels on en retrouve de célèbres comme Abyme, Agone, Venzia ou encore RetroFutur

C'est d'ailleurs son jeu de rôle Capharnaüm qui lui a inspiré ce premier roman. Je le remercie au passage pour l'envoi de ce livre qui me donne l'opportunité de découvrir une autre de ses facettes.

A Jergath-la-Grande, Makkan Ibn Aziz est un voleur un peu trop fanfaron et au coup de poing facile, ce qui lui vaut d'être exclu de son propre clan. Abandonné à lui-même en plein cœur du désert, il se voit déjà condamné à une mort certaine mais c'est un autre destin qui l'attend. De rencontre en rencontre, Makkan finira par être rattrapé par son étrange héritage. Mais saura-t-il surmonter ses propres démons pour vaincre l'adversité ? 

Aux traîtres indomptables est un court roman composé de trois parties marquant les temps forts de l'action. Raphaël Bardas puise dans l'imaginaire féerique de l'Orient médiéval et s'inspire des péplums de la Rome antique pour donner un cadre à ce récit. 

Si au début du livre, on quitte le désert brûlant pour retrouver l'ambiance douillette et cosy d'un palais des Mille et Une Nuits, par la suite, l'auteur nous fait goûter la poussière des arènes, théâtres des célèbres courses de chars qui ont marqué l'Antiquité. 

Djinns et Shaytan habillent donc ses pages. Makkan sera même le jouet de l'un d'eux. En effet, alors qu'il espérait libérer deux sœurs de l'emprise d'une terrible malédiction, il ne va réussir qu'à s'attirer les foudres de l'entité maléfique. La rencontre avec ses créatures magiques qui le persécutent d'un bout à l'autre de l'aventure colore ce récit de notes épicées d'une fantasy exotique. A l'image de Capharnaüm, l'auteur insère son texte dans un environnement très détaillé, reflet des paysages et du bâti que l'on est en droit de s'attendre dans un tel contexte. 

Maintenant que l'univers est planté, intéressons-nous à son héros à la langue bien pendue. Avec le personnage de Makkan, je retrouve un peu de l'excentricité des fameux chevaliers du Tintamarre. Bagarreur, rusé et imbu de lui-même, Makkan est un héros qui attire l'attention. Haut en couleur, il a la verve facile et ne se démontre d'aucune situation même lorsqu'il se retrouve nu comme un vers. Drôle, il nous entraîne dans une succession de situations parfois abracadabrantes desquelles il espère toujours se sortir. Entre rire et larmes, Makkan sait finalement s'attacher les gens car il est difficile de lui résister. 

En sa compagnie, on ne voit donc pas le temps passer et il nous offre une pause bienvenue entre deux lectures au long cours. 

Action, humour et sensualité sont les maîtres-mots de cette captivante aventure qui offre une plaisante incursion dans ce jeu de rôle qu'il nous soit familier ou non. 

Fantasy à la Carte

A lire sur le blog mon avis sur le truculent, Les Chevaliers du Tintamarre, éditions Mnémos. 

Raphaël Bardas
Aux traîtres indomptables
Capharnaüm
L'héritage des Dragons

13/10/2020

Alex Nikolavicth, Les Canaux du Mitan, éditions Les Moutons Électriques

Alex Nikolavitch, Les Canaux du Mitan, éditions Les Moutons Électriques

Les Canaux du Mitan d'Alex Nikolavitch est un roman qui a été édité dans le cadre de la rentrée de la fantasy des Indés de L'Imaginaire. Ayant lu Le Vaisseau d'Arcane d'Adrien Tomas (éditions Mnémos) et Les Énigmes de L'Aube de Thomas C. Durand (éditions ActuSF), lire la sélection des Moutons Électriques s'est donc naturellement imposé.  

Essayiste et bédéiste, Alex Nikolavitch est également l'auteur de quelques romans. 

Dans Les Canaux du Mitan, on part à la rencontre de Gabriel. Orphelin, il a été recueilli par le prêtre de Salvi. Dans cette bourgade perdue au milieu de nulle part, il s'ennuie ferme jusqu'au jour où un bateau-carnaval accoste. Ni une ni deux, il décide de se joindre à cette joyeuse troupe de saltimbanques qui navigue sur les canaux et vit des représentations qu'elle donne à chaque jetée d'encre. Des années plus tard, Suzanne, l'ami d'enfance de Gabriel est de retour dans le Mitan. Agent de la Prévôté, elle enquête sur une série de meurtres perpétrée sur sa terre natale. Mais toute à ses investigations, elle n'en oublie pas moins son ami disparu et se demande encore si elle le reverra un jour...

Dans Les Canaux du Mitan, Alex Nikolavitch nous immerge dans un univers singulier. Nous voici dans le Mitan, une terre sauvage traversée par de grands fleuves et parcheminée de canaux, construits, il y a bien longtemps, par les indigènes. C'est un paysage marqué par l'empreinte des colons. Au fil des héliographes leur servant de moyen de communication, des villes voient le jour ici ou là. C'est également une terre exploitée pour ses mines qui a fait l'objet d'une conquête acharnée. Pour nourrir son univers, l'auteur s'est donc clairement inspiré de la conquête de l'Ouest, conférant ainsi au récit son caractère Western fantasy. C'est un sous-genre de plus en plus plébiscité par les auteurs français comme en témoignent les sorties récentes du cycle de Bans et Barricades de Clément Bouhélier ou de La Piste des Cendres d'Emmanuel Chastellière. D'autre part, comme une partie de l'action se déroule à bord d'un bateau, cela ajoute une dimension à cet univers, celle d'être en perpétuel mouvement car il suit le cours de l'eau. C'est un cadre d'action qui me rappelle d'ailleurs le cycle des Sentiers des Astres de Stefan Platteau. 

La magie qui habite ces lieux et certains de ses personnages prend sa source dans les mythes et les croyances du peuple indigène. En effet, l'esprit de leurs divinités plane sur ce roman lui conférant une aura de mystère, renforcé par ces rites relevant presque du chamanisme.

Les Canaux du Mitan, c'est aussi les destins entremêlées de héros hauts en couleurs quand on regarde du côté de l'équipage du bateau-carnaval entre son capitaine loyal, la femme à barbe ou encore le nain Mi-Portion. Mais il y a aussi des personnages attachants comme Gabriel, ce jeune garçon qui avait tant soif d'aventures ou encore Suzanne, cette femme émancipée devenue, contre vents et marées, une représentante de la loi qui arrive à s'imposer dans une société sexiste. 

Ce roman, c'est un kaléidoscope de micro-récits qui dessinent au final l'histoire d'un territoire riche de légendes. 

Avec ce livre, Alex Nikolavitch se fait l'auteur d'un récit étonnant qui mutualise les genres car la fantasy vient à la rencontre ici du roman policier pour nous entraîner dans une enquête captivante.

Inattendu et magique, ce roman est une belle promesse d'évasion. 

Fantasy à la Carte

D'autres avis sur la blogosphère : La Geekosophe, De l'autre côté des livres et Les chroniques du chroniqueur

Alex Nikolavitch
Les Canaux du Mitan
Editions Les Moutons Électriques