L'influence du "gaming" à la littérature

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21/05/2025

Louise Mey, L'orage qui vient, éditions Pocket Imaginaire

Louise Mey, L'orage qui vient, éditions Pocket Imaginaire 

Féministe engagée, Louise Mey est surtout connue pour ses thrillers et ses romans noirs. En 2022 elle publie L'orage qui vient, un roman de science-fiction et témoigne ainsi de son désir d'explorer d'autres Imaginaire. 

Depuis mars, ce roman est de retour sur les étals des libraires avec la sortie du format poche. 

Lu dans le cadre d'un partenariat avec les éditions Pocket Imaginaire, je remercie Emmanuelle Vonthron pour l'envoi de ce service de presse. 

Résumé :

Mila vit avec sa mère au sein d'une petite communauté peuplée de femmes depuis la Rétractation du monde. La vie y est paisible jusqu'à l'arrivée soudaine d'un homme prénommé Nathan se portant volontaire pour les aider. Mila est la seule à se méfier de cet étranger, sentant des mauvaises ondes émanées de lui. Arrivera-t-elle à se faire entendre des siens avant qu'il ne soit trop tard? 

Mon avis :

Dans L'orage qui vient, Louise Mey nous plonge dans un univers postapocalyptique où le monde est soumis à ce que l'on appelle la Rétractation. L'ultra consumérisme, l'économie de marché ont eu raison de la société. Celle-ci a implosé dispersant les humains en îlot de survie ici ou là. Ils tentent de survivre en communauté. Certains y parviennent mieux que d'autres, à l'image de celle de Mila. Leur petite nombre, leur sororité, leur concertation collective pour tous sujets sont autant d'éléments favorables à leur bon fonctionnement. En outre, elles disposent d'une source naturelle miraculeuse qui leur donne un avantage certain mais a la contrepartie d'éveiller la convoitise. 

L'existence de cette Eau si particulière donne au récit son caractère surnaturel. En effet, Louise Mey a choisi de mélanger les genres pour donner à son texte une saveur très particulière. D'autant que les notes ésotériques ne s'arrêtent pas à cette forme de magie puisque l'ombre de créatures fantastiques plane également sur ce récit. 

La force de ce texte est de laisser le doute peser quant aux intentions maléfiques ou protectrices de cette présence fabuleuse. 

L'orage qui vient est un récit court et entraînant. L'autrice y balaie de nombreuses thématiques toutes plus intéressantes les unes que les autres. 

Déjà, elle a choisi de mettre en lumière des portraits de femmes qui se sont libérées par choix ou par accident de la vie de la tutelle des hommes. Ainsi, elles assument leur destin et l'affrontement avec force et courage sans un quelconque commandement masculin. Et lorsqu'elles recroisent la route d'un homme, elles finissent par y voir clair et retrouver leur unité. 

A travers la créature du loup-garou, Louise Mey revisite la figure du monstre. Celle-ci est trompeuse comme peuvent l'être souvent les apparences. Ici, le prédateur prend bien des visages et le plus dangereux n'est pas forcément celui que l'on pense au premier abord. 

Louise Mey met l'âme humaine à nu dans son récit en explorant ses réflexions tortueuses et ses sentiments parfois destructeurs. 

Cette histoire est à la fois sombre et belle. L'ambiance y est plutôt clair-obscur car l'autrice flirte avec les codes de l'horrifique et donne ainsi à son texte une atmosphère lourde et troublante. Le mystère est là, diffus et captivant. 

Les protagonistes sont quant à eux fort intéressants surtout cette jeune Mila qui se dévoile à nous que lentement. Complexe, entière et passionnée, elle est ici autant en quête d'elle-même qu'animée par la volonté farouche de protéger les siens. Natan, lui, incarne l'étranger. Il se présente comme un homme de bonne volonté mais dissimule des désirs plus dérangeants. Tous sont intrigants et se lancent dans une danse dont eux seuls comprennent le rythme. 

Pour conclure :

Avec L'orage qui vient, Louise Mey signe une première incursion en Imaginaire fort réussie. Alors à quand la prochaine ?

Fantasy à la Carte

Informations

Louise Mey
L'orage qui vient
9782266344074
176 pages
Editions Pocket Imaginaire

Lien vers le site

17/05/2025

Lou Jan, Un corps d'avance, éditions Critic

Lou Jan, Un corps d'avance, éditions Critic

Après un premier roman intitulé La Machine à Aimer qui lui vaut une entrée remarquée au sein des littératures de l'imaginaire et particulièrement la science-fiction, Lou Jan récidive avec un second récit. 

Toujours dans ses thématiques de prédilection, elle nous brosse avec Un corps d'avance un futur technologique intéressant mais dépouillé de l'essentiel. 

Lu dans le cadre d'un partenariat avec les éditions Critic je remercie Eric Marcellin pour l'envoi de ce SP. 

Résumé :

Jinseï s'apprête à vivre son premier reset. Il appréhende un peu, non pas de pouvoir garder son apparente jeunesse jusqu'à 10 fois 75 ans mais de couper tout le lien avec chacune de ses vies. Et si l'immortalité n'était pas si enviable ? 

Mon avis :

Un corps d'avance s'inscrit dans un cadre futuriste dans lequel Lou Jan continue de questionner les avenirs possibles à travers les progrès scientifiques et technologiques. 

Elle a d'ailleurs choisi comme point de départ de sa réflexion, la question de l'immortalité. Obsession de notre époque, c'est donc tout naturellement que les avancées tournent ici autour d'elle. Ainsi, l'autrice a imaginé la possibilité aux humains de pouvoir vivre jusqu'à dix reset d'une durée de 75 ans. Grâce à cette prouesse, la mort n'existe quasiment plus. 

Seulement pour être éligible à ce procédé, des conditions sont à respecter. Et celles-ci ne sont pas des moindres puisqu'il faut accepter de renoncer à chacune de ses vies, incluant de ne plus vivre dans son pays initial de résidence et surtout de rompre tous ses liens familiaux. En outre, il est possible d'opter pour l'oubli effaçant, de facto, les souvenirs à chaque remise à zéro. 

Dans ce monde imaginé par Lou Jan, les humains vivent aux côtés des androïdes mais point sur un pied d'égalité car ces derniers sont considérés comme des esclaves, utilisés pour travailler à la place des humains. Pire encore ils ont été créés, à dessein, avec une obsolescence programmée par pure crainte qu'ils détrônent l'humanité et finissent par la dominer. 

Cette mise en valeur à pour but, de ramener l'intelligence artificielle au cœur du débat en insistant sur toute la problématique qu'elle soulève, notamment à travers la méfiance suscitée a son égard. Aujourd'hui, l'IA est surtout présentée comme un danger de remplacement de l'humanité. Or, Lou Jan souhaite ici renverser cette apriori en les intégrant à sa société. Pour cela, elle met en avant leur désir de vivre libre, à l'image de l'un de ses personnages qui vit dans la clandestinité pour tenter de survivre et d'imprimer sa marque dans ce monde en le changeant. 

Avec Un corps d'avance, on est sur un roman collégiale divertissant où chacun des protagonistes de Lou Jan vient nous faire découvrir une facette de ce futur qu'elle nous brosse. Que l'on s'attache ou non à Jinsei, Namaya ou Léan, on est vite captivés par leur destinée atypique où leurs âmes se télescopent à d'autres, et où il est possible de reprogrammer la vie à l'infini. 

Fasciné ou inquiet par ce progrès qui a repoussé les limites du corps humain, il permet surtout à l'autrice de ramener la vie à l'essentiel, à ce qui fait son sel. C'est d'ailleurs le fond de ce récit, l'importance des liens, des attaches et des sentiments, car à quoi bon vivre éternellement si c'est pour perdre à tout bout de champ ceux qui nous sont proches. 

Derrière cette nouvelle aventure très punchy, l'autrice y insère une réflexion philosophique autour du sens de la vie, en soulignant l'amour comme un moteur pour avancer. Soit, c'est un sentiment puissant qui en génère d'autres, à l'image de la jalousie dont certains protagonistes du récit vont d'ailleurs en faire les frais mais c'est un mal nécessaire pour donner du relief au destin. 

Lou Jan louvoie entre présent, passé et futur pour nous entraîner à perdre haleine dans un espace-temps inattendu, source de dangers, mais aussi de belles rencontres. On goûte à un imaginaire fouillé car passionnée par tout ce qui a attrait à ce qui fera demain à travers les innovations, elle se plaît donc à le construire dans ses récits en y mettant en exergue ses forces et ses failles. 

Un corps d'avance est un roman court et percutant qui explore la force des sentiments ainsi que les notions de manque et de vide lorsqu'ils brillent par leur absence. Divertissant !

Fantasy à la Carte

A lire sur le blog, mon avis sur La Machine à Aimer.

Informations

Lou Jan
Un corps d'avance
9782375793220
224 pages
Editions Critic

Lien vers le site

11/05/2025

Marge Nantel, Hors Caste, éditions Mnémos

Marge Nantel, Hors Caste, éditions Mnémos 

Au fil de ses récits d'imaginaire, Marge Nantel s'impose peu à peu comme une signature incontournable du genre. Le prix Utopiales reçu en 2024 pour récompenser son roman, Code Ardant, ne fait d'ailleurs que confirmer son talent. 

Une plume très qualitative que j'avais remarquée dès ma lecture de La Cité sous les Cimes publié en 2023 par les éditions 1115.

Or, l'annonce d'une nouvelle sortie en avril dernier chez Mnémos a immédiatement suscité mon intérêt.

Lu dans le cadre d'un partenariat avec les éditions Mnémos, je remercie Estelle Hamelin pour l'envoi de ce service de presse.

Résumé : 

Dépourvu du Don, Suèhl est un décasté, autrement dit un paria pour son clan. Contre toute attente, il a réussi à rester en vie en dépit des purges organisées pour le voir lui et ses semblables disparaître. Un jour, il fait la rencontre d'un étranger surnommé Ténèbres sans imaginer qu'il va l'entraîner bien malgré lui au cœur des rivalités de son clan et que leurs destins vont intimement se lier. Mais au plus fort du danger, pourra-t-il réellement compter sur lui ? 

Mon avis :

Avec Hors Caste, Marge Nantel signe un récit de dark fantasy particulièrement immersif. Elle nous propulse dans une société de castes où le pouvoir détermine l'échelle sociale. Celle-ci est facilement reconnaissable par le biais de signes extérieurs comme des tatouages ou le port de certaines pierres. 

Dans ce monde, il n'est pas bon d'appartenir à aucune sous peine de voir sa vie continuellement menacée. A Hemurn, les gens sont répartis par clans. On en distingue quatre : celui du Lynx, du Serpent, de la Tarasque et du Phoenix. Chacun d'entre eux est régulièrement soumis à des luttes internes qui les déstabilisent et vident même leurs rangs à cause des purges. En outre, la particularité de l'univers imaginé par Marge Nantel est qu'elle a choisi de mettre en scène des personnages anthropomorphiques. En effet, les membres de ces clans présentent des caractéristiques physiques propres aux totems auxquels ils appartiennent. 

La magie de ce texte s'exprime autant par ces protagonistes mi humains mi créatures qui, par leurs prédispositions naturelles, disposent de capacités supérieures ainsi que par l'existence de pierres puissantes capables de bien des prodiges comme le contrôle des esprits. 

L'intrigue imaginée par l'autrice est tranchante et se met parfaitement au diapason de son univers âpre. 

La société dans laquelle ce récit prend cadre est sectaire. Ce qui donne l'occasion à l'autrice d'aborder les thématiques d'intolérance et de persécution, notamment ce qui est relatif aux préférences sexuelles. En effet, ses personnages principaux appartiennent à la communauté LGBT et ont bien souvent été victimes d'abus, de sévices et de tortures pour les punir d'aimer des personnes de même sexe. Par leur biais, Marge Nantel explore les traumatismes psychiques et ses conséquences sur l'âme tout en donnant des pistes pour les surmonter. 

En outre, à travers cette société de castes, l'autrice met en exergue le mépris de classes. Elle ponctue ainsi son texte d'une critique politique.

Il est également question de révolte et de liberté conquise au prix fort.

Hors Caste est un roman féroce dans laquelle l'autrice ne mâche pas ses mots, pas plus qu'elle ne ménage ses héros. 

Pour porter cette histoire, elle table sur deux personnages meurtris, deux âmes écorchées par la vie qui ne leur a pas fait de cadeau. 

C'est clairement un roman qui met les émotions à vif. Suèhl et Ténèbres sont les victimes d'un passé traumatisant. Pour autant, ils vont faire de leurs failles une véritable force notamment grâce à leur rencontre qui va leur sceller une nouvelle destinée. Voici deux personnages tous en nuances que l'on apprécie d'emblée et dont on partage sans mal les joies et les peines. Ils forment le duo parfait  pour donner à cette histoire tout son mordant.

Pour conclure :

Avec Hors Caste, Marge Nantel se fait à nouveau l'autrice d'un roman piquant dont on ne sort pas indemne. Implacable !

Fantasy à la Carte

A lire sur le blog mes avis sur La Cité sous les Cimes et Code Ardant.

Informations

Marge Nantel
Hors Caste
9782382671917
336 pages
Editions Mnémos

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