L'influence du "gaming" à la littérature

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16/12/2023

J.R.R. Tolkien, Le Silmarillion, éditions Pocket Imaginaire

J.R.R. Tolkien, Le Silmarillion, éditions Pocket Imaginaire 

A l'instar du Hobbit, Le Silmarillion a également revêtu ses plus beaux atours pour rejoindre la collection collector des classiques de l'Imaginaire, publiés aux éditions Pocket Imaginaire

La genèse de cet ouvrage remonte aux années 1910 mais, malgré la volonté farouche de J.R.R. Tolkien de le faire publier concomitamment avec Le Seigneur des Anneaux, il essuie un refus de la part de l'éditeur. 

Il faudra donc attendre 1977 et un travail acharné de Christopher Tolkien, épaulé par Guy Gavriel Kay pour pouvoir lire Le Silmarillion

En cette fin d'année 2023, il est donc à nouveau à l'honneur chez Pocket et arbore fièrement une couverture représentant Ered Luin, les Montagnes Bleues qui séparaient au Premier Âge, le Beleriand de l'Eriador. C'est une vraie beauté que l'on doit encore à Nicolas Caminade. 

Lu dans le cadre d'un nouveau partenariat avec les éditions Pocket Imaginaire, je remercie Emmanuelle Vonthron pour l'envoi de ce service de presse.

Pour commencer, je dois vous dire que Le Silmarillion, je n'avais pas encore eu l'occasion de le lire dans son entier, juste trois épisodes fondamentaux extraits par Christopher Tolkien et publiés chez Christian Bourgois. En outre, en dépit d'une bibliothèque bien fournie en littérature fantasy, je ne possédais même pas un exemplaire jusqu'à aujourd'hui, alors je suis bien aise d'avoir pu me plonger dans ce long récit et ainsi remettre en perspective Les Enfants de Húrin, Beren et Lúthien et La Chute de Gondolin lus précédemment. 

En effet, Le Silmarillion s'attache à retracer la genèse et les Premiers Âges de la Terre du Milieu. 

Résumé :

Le livre commence par une présentation de sa mythologie à travers L'Ainulindalë nous présentant la création d'Eä par le dieu Ilúvatar qui, par l'intermédiaire des Ainur et de leurs chants ont donné forme au monde et préparé l'arrivée des Elfes et des Hommes. Parmi ces Ainur, certains ont choisi de rester sur Arda pour en devenir les gardiens. Ils se nomment les Valar et les Maïar. Les premiers sont au nombre de quatorze même s'il en existe un autre répondant au nom de Melkor, rebaptisé Morgoth par les Elfes et dont la sombre destinée sert de fil narratif à l'ensemble des récits constituants Le Silmarillion. Ainsi, le plus gros du livre est occupé par le Quenta Silmarillion qui correspond au long récit des malheurs et des exploits des Elfes autour des précieux joyaux Silmarils jusqu'à la chute de Morgoth. Dans cette partie, les péripéties s'y enchaînent et le ton est nettement plus épique, mobilisant davantage notre attention. On goûte ainsi aux hauts faits de certains et aux méfaits des autres. L'ensemble est aussi passionnant que déroutant. Pour qui a lu Le Hobbit et Le Seigneur des Anneaux, c'est clairement enthousiasmant d'en apprendre plus sur le passé de la Terre du Milieu. Pour autant, ce monde est si foisonnant que l'on s'y perd facilement. On se heurte fréquemment aux trop nombreux protagonistes des différentes histoires et à la difficulté de retenir tous leurs noms. Il faut dire que ces derniers sont parfois complexes. 

Mon avis :

Le Silmarillion est le genre d'ouvrage pour lequel il faut revenir dessus à plusieurs reprises. Le lire d'une traite peut être hasardeux pour sa pleine compréhension. Il ne faut donc pas hésiter à se ménager des pauses entre chaque chapitre pour se laisser le temps de l'apprécier pleinement. Certains choisissent d'y picorer des morceaux ici ou là et ils ont sans doute raison. D'ailleurs, cette méthode n'est pas sans rappeler la découpe éditoriale du Silmarillion proposée par Christopher Tolkien pour mettre en lumière certaines histoires. 

09/12/2023

J.R.R. Tolkien, Le Hobbit, éditions Pocket Imaginaire

J.R.R. Tolkien, Le Hobbit, éditions Pocket Imaginaire 

En octobre dernier, les éditions Pocket Imaginaire ont eu la bonne idée de rééditer Le Hobbit et Le Silmarillion dans une version collector. Le prétexte est donc parfait pour se plonger ou se replonger dans les merveilleux récits du maître de la fantasy

Lu dans le cadre d'un partenariat avec les éditions Pocket Imaginaire, je remercie Emmanuelle Vonthron pour l'envoi de ce service de presse. 

Le Hobbit, roman incontournable que tout le monde connaît - j'en suis sûre - ne serait-ce qu'à travers son adaptation cinématographique par Peter Jackson, néanmoins je ne résiste pas à me fendre de quelques mots à son propos. 

Résumé :

Bilbo Bessac est un hobbit qui vivait paisiblement jusqu'à l'arrivée inopinée d'un certain Gandalf. Sa réputation le précédant, il sait qui il est, pour autant il n'a pas envie de l'écouter l'inciter à participer à une aventure. Il n'aspire qu'à la tranquillité, alors il lui propose de repasser le lendemain prendre un thé. Mais quelle ne fut pas sa surprise quand ce sont treize nains qui se présentent les uns derrière les autres, le jour J devant sa porte, suivi du magicien. Par sens de l'hospitalité, il est bien obligé de les accueillir et c'est comme ça, que sans crier gare, il se retrouve embarqué dans une expédition à titre de cambrioleur chargé de dérober un trésor à un dragon. 

Mon avis :

La sortie de ces deux livres est un projet éditorial qui fait écho aux belles éditions illustrées des éditions Christian Bourgois, mais en se présentant comme une belle alternative pour les petits budgets. Noël approchant à grand pas, cela peut être la bonne occasion de les glisser sous le sapin des amateurs de J.R.R. Tolkien ou sous celui de ceux qui ne l'auraient point encore lu, notamment la jeune génération. 

Il a l'avantage du petit format qui ne prend pas de place dans la bibliothèque. En outre, c'est une version avec la traduction de Daniel Lauzon, réhaussée par une illustration de couverture, signée Nicolas Caminade qui s'est inspiré des dessins de J.R.R. Tolkien pour la réaliser. Celle-ci sert de magnifique écrin pour ce collector. 

Le Hobbit est le préambule à tous les évènements qui se déroulent pendant Le Seigneur des Anneaux. Mais, c'est un récit nettement plus facile d'accès que Le Silmarillion et même Le Seigneur des Anneaux

Ecrit à l'origine pour ses enfants, Le Hobbit est vraiment le roman d'aventure par excellence dans lequel on retrouve de nombreux périls, le motif de la quête d'un trésor et la figure du dragon. Ce sont autant d'éléments que j'apprécie particulièrement de retrouver dans une histoire de fantasy épique. 

04/12/2023

Eleanor Arnason, Les Nomades du Fer, éditions Argyll

Eleanor Arnason, Les Nomades du Fer, éditions Argyll 

Eleanor Arnason est une autrice américaine de science-fiction qui compte à son actif quelques romans, beaucoup de nouvelles ainsi que des poèmes. 

Malheureusement aucun de ses textes n'avaient été traduits jusqu'à aujourd'hui. Or, les éditions Argyll viennent d'y remédier en nous proposant la publication de son livre, Les Nomades du Fer, récompensé par les prix Mythopoeic et Otherwise

Lu dans le cadre d'un partenariat avec les éditions Argyll, je remercie Xavier et Simon pour l'envoi de ce service de presse.

Résumé :

Lixia est une anthropologue qui voyage en compagnie de scientifiques afin d'explorer d'autres planètes. Chargée d'aller à la rencontre des populations autochtones avec la directive de les observer sans intervenir dans leur vie, elle fait la connaissance de Nia du peuple de fer. Rejetée par sa communauté pour avoir aimé un homme, cette dernière va aider Lixia et ses semblables à mieux appréhender son monde. Mais, quand les avis divergent, peut-on réellement espérer une entente durable entre des êtres si différents ? 

Mon avis :

Dans Les Nomades du Fer, Eleanor Arnason nous propulse à 18,8 années-lumière de la Terre, sur une planète inconnue qui orbite autour de la fascinante étoile Sigma-Draconis. Celle-ci partage des similitudes avec la Terre, notamment dans la richesse en minerais de ses sols, mais aussi dans ses ressources en eaux et en oxygène permettant aux humains d'y déambuler sans combinaison spécifique. La population locale est d'aspect humanoïde mais chaque individu est recouvert d'une épaisse fourrure. Elle vit en tribus nomades constituées exclusivement de femmes et d'enfants. En effet, les hommes sont sommés de quitter la communauté à l'âge adulte, ne retrouvant les femmes qu'au printemps, le temps de l'accouplement qui répond à un rituel spécifique. Ceux-ci mènent donc une vie solitaire et autonome. Le pouvoir est ici entre les mains des chamanes et chaque clan a la sienne. En outre, ce sont des peuplades primitives qui vivent de la terre, chacune se spécialisant dans l'exploitation d'une ressource. Ainsi, on distingue le peuple du fer, de celui du cuivre ou de l'ambre, par exemple. Ils ne connaissent pas l'art de la guerre et vivent pacifiquement, ne pratiquant que l'échange de biens. 

C'est dans ce contexte que débarque Lixia et quelques confrères. Par son genre féminin, elle est tolérée, contrairement à certains hommes qui sont chassés. On va donc la suivre dans ses pérégrinations au cours desquelles elle est chargée d'entrer en contact avec ces extraterrestres sans influencer leur vie et de communiquer avec le vaisseau mère par radio pour partager ses observations. 

25/11/2023

Floriane Soulas, Les Oubliés de L'Amas, éditions Pocket Imaginaire

Floriane Soulas, Les Oubliés de L'Amas, éditions Pocket Imaginaire 

En octobre dernier, Floriane Soulas a rejoint le label des étoiles montantes de l'Imaginaire avec la sortie chez Pocket Imaginaire de son roman, Les Oubliés de L'Amas. 

Primé aux Utopiales en 2022, sa réédition au format poche me donne l'occasion d'être à jour dans la bibliographie de cette autrice dont j'apprécie beaucoup la plume. En effet, ayant déjà découvert ses autres univers, il me tardait de voir ce que celui-ci me réservait. 

Lu dans le cadre d'un partenariat avec les éditions Pocket Imaginaire, je remercie Emmanuelle Vonthron pour l'envoi de ce service de presse. 

Résumé :

L'Amas est un agglomérat de vaisseaux échoués les uns à côté des autres après leur échec d'atteindre Jupiter. Refuge pour les uns et prison pour les autres, la vie y est rude et hostile. Cela fait un an que Kat a débarqué là, elle est une recycleuse mais a le projet secret de retrouver son frère jumeau disparu. Fasciné par Jupiter depuis tout petit, elle est persuadée qu'il a tenté le voyage. Il lui faudra donc marcher dans ses pas pour espérer le retrouver. C'est ainsi qu'elle cherche à s'embarquer dans les courses spatiales clandestines mais arrivera-t-elle à ses fins ? Est-il seulement encore vivant ? 

Mon avis :

Les Oubliés de L'Amas est un space opera de haut vol qui a l'ambition de nous emmener à la conquête de Jupiter. Sous la plume de Floriane Soulas, l'humanité a colonisé les planètes du système solaire, excepté Jupiter qui fait de la résistance. Le voyage spatial y est maîtrisé. Des satellites servent même de réserves alimentaires. Les trois quarts de l'action se passant sur L'Amas, l'autrice y met en lumière l'adaptation humaine aux conditions de vie difficile, à travers l'enjeu de l'oxygène. Les résidents sont soumis à des confinements dans leurs quartiers respectifs le temps du nettoyage des espaces et du renouvellement de l'air. Une économie de troc s'est installée. Tout y est monnayable, y compris les informations. Le contexte est propice aux cercles clandestins qui ont proliféré à l'ombre des autorités. Or, parmi les activités illicites, il y a donc des courses de vaisseaux spatiaux qui servent d'ailleurs de fil narratif à ce roman. Les descriptions sont hyper immersives. D'autant que l'autrice a bien travaillé sa copie pour nous parler de l'environnement de la gazeuse Jupiter. Elle demeure un objectif pour bien des protagonistes de cette histoire et les recherches scientifiques menées pour réussir à pénétrer sa magnétosphère et passer la barrière des tempêtes joviennes donnent à ce récit une grande crédibilité. 

Comme tout bon space opera, Les Oubliés de L'Amas est bien un roman d'aventure où les actions s'enchaînent vite. L'autrice y a même ajouté une dimension horrifique qui s'exprime par un danger latent que l'on perçoit au fur et à mesure des chapitres. 

15/11/2023

Linda, Louise & Mike Carey, La Cité de Soie et d'Acier, éditions L'Atalante

Linda, Louise &  Mike Carey, La Cité de Soie et d'Acier
éditions L'Atalante 

La Cité de Soie et d'Acier est le fruit de trois plumes de l'Imaginaire qui ont décidé de mêler leur talent de conteurs pour nous livrer une histoire des plus envoûtante.

Mike Carey, connu également sous le pseudonyme de MR Carey, est l'auteur de nombreux comics, de thrillers et de romans fantastiques. Linda Carey, elle, est l'autrice de livres fantasy pour enfants et jeunes adultes. Quant à Louise Carey, elle a écrit Inscape, un thriller dystopique et participé à l'écriture de récits de fantasy et d'un roman graphique.

Lu dans le cadre d'un partenariat avec les éditions L'Atalante, je remercie Emma pour l'envoi de ce service de presse. 

Résumé :

Après l'assassinat du sultan Bokhari al-Bokhari, les trois-cent-soixante-cinq concubines de son sérail sont d'abord condamnées à l'exil, puis à la mort. Mais refusant de succomber à ce funeste destin, elles se rebellent en commençant par se débarrasser de leurs geôliers, puis organisent leur survie dans le désert. A force de travail, elles finissent par triompher de l'adversité et l'idée de reconquérir leur cité commence à germer peu à peu en elles. Dès lors, démarre pour elles une nouvelle vie où chacune peut prendre ses propres décisions se libérant ainsi du joug masculin. Une révolution mais pourront-elles réellement agir à leur guise en menant leur audacieux projet à son terme ? 

Mon avis :

Avec La Cité de Soie et d'Acier, Linda, Louise et Mike Carey signent une fantasy féministe qui s'épanouit dans la chaleur brûlante du désert et envoûte à coup de contes. Chaque chapitre correspond à une nouvelle histoire portant soit sur l'une des concubines ou tout autre résident de Bessa, soit sur un épisode décisif pour ladite cité. Ecrite à la manière des contes des Mille et Une Nuits, la destinée de cette cité hors norme est hissée au rang des légendes oubliées que l'on découvre ou redécouvre en lisant cette histoire fragmentée. La Cité de Soie et d'Acier prend donc cadre dans un univers oriental baigné par la présence des Djinns qui comblent de bienfaits certaines protagonistes. Ainsi, Rem la bibliothécaire possède un don de prescience bien utile pour avertir certains dangers et éviter certains écueils. Loin d'être ostentatoire, la magie qui prend corps entre ces lignes est délicate, s'exprimant par touches secrètes et agissant sur les lecteurices comme un élixir ensorcelant. 

Maintenant que le décor est posé, analysons l'intrigue d'un peu plus près. Il s'agit d'une histoire de femmes en but à une domination patriarcale qui refusent d'être sacrifiées sur l'autel d'une idéologie. C'est d'abord bien malgré elles qu'elles se retrouvent à prendre leur destin en mains, en apprenant à se défendre et à travailler pour conserver leur autonomie. De leur expérience va découler l'élaboration d'un modèle de société utopique instaurant une véritable démocratie participative, l'accès à l'éducation pour tous, l'abolition des titres au profit d'une égalité entre les habitants de Bessa. Les femmes exercent ici un soft power privilégiant de saines relations commerciales aux conflits armés par pure rivalité. Elles font de Bessa une cité prospère qui ne manque pas de créer des tensions et de la jalousie, notamment de la part des hommes qui voient d'un mauvais œil de laisser prospérer pareilles idées au cœur de leur sultanat respectif ou pour s'arroger un pouvoir qu'ils croient légitimes. Au fil des histoires, on suit la lutte de ces femmes, on goûte à leur courage et à leur volonté farouche de maintenir l'équité. Incarnant la femme ordinaire plutôt que l'élue prédestinée à accomplir de grandes choses, les héroïnes qui prennent part à cette aventure ressemblent à nos mères, à nos filles, à nos sœurs et à nous-mêmes. Les auteurs nous brossent donc le portrait de protagonistes féminins très réalistes dont on se sent facilement proche. On est sensible à leur belle sororité qui s'incarne dans leur noble projet. Sur cette communauté de femmes règne la bienveillance. Elles sont animées par des valeurs de liberté et de tolérance. Ainsi, on rencontre dans le livre des personnages LGBT et il est parfois question d'amour libre. 

09/11/2023

Fabien Clavel, Buffy, baroque épopée, éditions Mnémos

Fabien Clavel, Buffy, baroque épopée, éditions Mnémos 

De Fabien Clavel, je ne lui connaissais jusque-là que sa casquette de romancier pour avoir lu les excellents, Feuillets de Cuivre et La Niréide, mais aujourd'hui, je vais plutôt m'intéresser à celle d'essayiste à travers son essai sur Buffy, sorti depuis peu en librairie.

Culte pour certains ou série B pour d'autres, Buffy n'a pas laissé indifférent et quoi que l'on en dise, elle demeure un phénomène pop culture. 

Pour ma part, me replonger dans l'univers de Buffy a été un moment de nostalgie de redécouvrir une série qui a marqué ma jeunesse et sans doute même suscité, inconsciemment, mon goût pour l'Imaginaire.

Lu dans le cadre d'un partenariat avec les éditions Mnémos, je remercie Estelle Hamelin pour l'envoi de ce service de presse. 

Résumé :

Avant de rentrer dans le vif du sujet, je vous propose un petit rappel du synopsis de Buffy contre les vampires si d'aventure vous ne connaissiez pas. Bien qu'elle aspire à une vie tranquille de lycéenne, Buffy Summers est une Elue chargée de tuer vampires et démons à chaque tombée de la nuit afin de nettoyer les rues de Sunnydale. Elle est guidée par le bibliothécaire Giles qui lui sert d'Observateur et d'entraîneur, et est accompagnée de ses deux amis Willow et Xander. L'ensemble forme un bouclier contre les forces du Mal qui sont à l'œuvre au sein de cette petite communauté construite sur une bouche de l'Enfer. 

Mon avis :

Dans son ouvrage Buffy, baroque épopée, Fabien Claver s'est surtout intéressé à l'esthétique très particulière de cette série pour comprendre en quoi elle est à la fois, selon lui, épique et baroque. 

Il a organisé son analyse selon trois angles d'attaque. Il commence par mettre en exergue l'épopée moderne que fut cette série, à travers son lien nourricier avec la mythologie antique. Ainsi, la construction du personnage de Buffy répond bien au mythe du héros ou dans le cas présent de l'héroïne qui est toujours décrit comme étant solaire, à l'image d'Achille dans L'Iliade. Clairement, Buffy Summers l'est également par sa blondeur, par ses goûts vestimentaires très colorés, ainsi que par sa vivacité. De même, en tant qu'Elue, elle est bien une héroïne puissante, disposant de capacités hors norme lui permettant d'accomplir sa mission. Proche de la vision du super-héros à travers sa force, sa vitesse, sa maîtrise des arts martiaux ou encore sa capacité de régénération rapide, Buffy correspond bien au modèle héroïque tel qu'il nous est décrit dans les mythes. D'autant qu'elle occupe également le rang suprême de cheffe en s'opposant à l'autorité et en commandant les autres Tueuses. Enfin, elle n'œuvre pas seule dans sa quête puisqu'elle est entourée de compagnons faisant directement référence au thème du "double" cher à certains mythes comme celui d'Achille qui est accompagné de Patrocle. A la lumière de tous ces éléments, on ne peut donc que s'incliner sur le caractère épique de Buffy contre les vampires

05/11/2023

Vincent Mondiot, Les Rues de Mirinèce, T.3, Les Mondes-Miroirs

Vincent Mondiot, Les Rues de Mirinèce, T.3, Les Mondes-Miroirs 

Après une réédition sous la forme de deux tomes, aux éditions Mnémos intitulés Les Mondes-Miroirs et L'Ombre des Arches, Vincent Mondiot a repris la main sur son projet littéraire. Une aventure enthousiasmante autant pour l'auteur que pour nous, les lecteurices, qui nous sommes passionnés dès le premier texte. 

Lu dans le cadre d'un partenariat, je remercie Vincent Mondiot qui a choisi de me faire confiance pour vous parler de ce troisième volet. 

Résumé :

Après avoir participé à l'arrestation de terroristes coordonnés par l'ancien héros de guerre Teliam Vore, puis avoir empêché un coup d'Etat dans la province d'Auterre, Elsy et Elodianne sont de retour à Mirinèce. Mais loin de retrouver leur routine, elles sont placées sous l'étroite surveillance du Palais central. Pour Elodianne, cela signifie de voir son évolution mise sur pause en attendant de convaincre ses supérieurs. Pour Elsy, c'est se conformer à un contrôle administratif hebdomadaire en promettant de se tenir à carreau. Sauf qu'avec un contrat placé sur sa tête, ne pas faire de vague risque d'être difficile pour la mercenaire. Alors qu'Elodianne va employer son temps à chercher à prouver qu'elle est une grande magicienne, Elsy, elle, va tâcher de trouver le moyen de survivre. Mais arriveront-elles réellement à leur fin ? 

Mon avis :

Loin de l'action explosive des deux premiers tomes, Les Rues de Mirinèce est un roman plus intimiste, centré sur les deux personnages principaux en s'intéressant notamment à leur trajectoire respectif. Pour ce faire, Vincent Mondiot entame chaque début de chapitre en explorant un moment crucial de leur passé afin de mieux comprendre leur choix de vie et par la même occasion, leur personnalité. La balade est agréable, largement agrémentée d'émotions fortes. Pour peu que l'on ait un crush pour ces deux héroïnes ou pour assouvir une certaine curiosité, on apprécie de les découvrir en profondeur puisque l'auteur s'est attelé dans ce tome-ci à leur donner une vraie épaisseur. En outre, en tablant sur deux temps de narration, cela a le double intérêt de nous dépeindre un portrait très complet d'Elsy et d'Elodianne et d'en apprendre plus sur certains des protagonistes secondaires croisant leur route. Or, si dans les romans précédents, les deux jeunes filles se retrouvent un peu fortuitement propulsées dans ces aventures politiques, dans ce présent livre, leur implication va prendre une toute autre dimension liant même leurs destins à celui de Mirinar. 

Elodianne et Elsy s'aiment autant qu'elles s'agacent. Il faut dire que Vincent Mondiot ne pouvaient pas choisir des caractères plus opposés que les leurs. Autant Elodianne est studieuse et réservée qu'Elsy est impertinente et volubile. Bien qu'elles aient grandi ensemble, elles vont pourtant suivre des chemins différents. 

29/10/2023

Olivier Bérenval, Des Nuées, éditions 1115

Olivier Bérenval, Des Nuées, éditions 1115

Grand amateur de science-fiction, Olivier Bérenval écrit son premier roman en 2015, Ianos publié aux éditions Mnémos. C'est de la hard science-fiction. Ensuite, il enchaîne en 2017 avec un space opera intitulé Nemrod, puis toujours chez le même éditeur, il publie en 2020 Le Janissaire, un planet opera mêlé à une ambiance polar, tiré du même univers de son précédent roman. 

Septembre 2023 a marqué son retour en librairie avec Des Nuées, un thriller fantastique édité cette fois-ci chez les éditions 1115. 

Lu dans le cadre d'un partenariat avec les éditions 1115, je les remercie pour l'envoi de ce service de presse. 

Résumé :

Lieutenant de police chevronné, Leon Visagie pensait tout connaître du sordide et du violent. Pourtant, lorsqu'il est appelé sur les lieux d'un nouveau crime, il ne s'attendait clairement pas à retrouver la victime exsangue, totalement vidée de son sang, réalisé presque de manière chirurgicale. Alors qu'avec ses collègues, ils piétinent littéralement, un autre meurtre est commis avec le même modus operandi à des kilomètres de là. Est-ce réellement le fruit du hasard ou s'agit-il de l'œuvre d'un tueur en série ?

Mon avis :

Des Nuées est un roman contemporain teinté de fantastique qui nous emmène sur les traces d'un assassin laissant ses victimes vidées de leur sang. Un mode opératoire qui n'est pas sans rappeler celui du vampire. Mais l'esprit bien trop cartésien des inspecteurs en charge de l'enquête refuse de céder aux sirènes de l'onirisme en dépit des croyances locales encore très ancrées. 

Pourtant, Olivier Bérenval, lui, a beaucoup joué sur celles-ci et en particulier sur cette vision de la persistance du souffle vitale de l'ancêtre qui ne cesse de se réincarner et/ou de l'appropriation de la force vitale de l'autre par la possessions des corps pour augmenter la sienne et ainsi survivre. Deux éléments très présents dans la religion animiste. 

Son récit s'inscrit donc dans un cadre ésotérique solide auquel il a ajouté une dimension scientifique à travers la casquette de paléoanthropologue de l'un de ses protagonistes. Entre ses lignes, on remonte aux origines des humanités. L'auteur explore avec beaucoup d'ingéniosité ce lointain passé qu'il fait rejaillir sur le présent de manière inattendue en s'appuyant notamment sur la génétique et la biologie cellulaire pour rendre le phénomène crédible.

De cette lecture, on en ressort aussi dérouté que captivé car l'imaginaire de l'auteur y est clairement des plus fertile. Ainsi, quand on lit Des Nuées, bien des émotions nous traversent : de la curiosité, d'abord, pour les explications scientifiques données par l'auteur et que l'on va confronter à nos propres théories, puis, une certaine fascination pour les mythes africains que l'on connait souvent mal et enfin de l'effroi car l'atmosphère du récit est de plus en plus lourde et inquiétante. 

Plus qu'un thriller fantastique, Des Nuées nous offre aussi une photographie sociologique de cette Afrique du Sud marquée par la violence et la pauvreté. Le récit est âpre et sans concession pour mettre en lumière le fléau des gangs et la misère sociale. Il nous transmet la peur et le désespoir d'une population broyée par un système en faillite face à une criminalité hors de contrôle. 

25/10/2023

Pascale Quiviger, Les filles de mai, T.2, Le Royaume de Pierre d'Angle, éditions Folio Fantasy

Pascale Quiviger, Les filles de mai, T.2, 
Le Royaume de Pierre d'Angle
éditions Folio

Récompensée par de nombreux prix : Elbakin.net, de la librairie Millepages, de la ville de Vannes et du Festival du livre de Gien, la saga, Le Royaume de Pierre d'Angle de Pascale Quiviger n'est clairement pas passée inaperçue. 

A l'heure où l'autrice nous propose une nouvelle incursion dans son univers en explorant un nouveau pan avec La Dernière Saison de Selim (éditions Rouergue), les éditions Folio poursuivent leur réédition en poche de l'illustre Royaume de Pierre d'Angle avec la publication en septembre dernier du tome 2, Les filles de mai

Lu dans le cadre d'un partenariat, je remercie les éditions Folio pour l'envoi de ce service de presse. 

Libéré de la Catastrophe, Thibault en est revenu confus et désorienté. Alors que son esprit bat sérieusement la campagne, le royaume a plus que jamais besoin d'un roi fort et solide. Surtout que le malveillant Jacquard guette la moindre faiblesse pour reprendre le pouvoir. Pire encore l'hiver promet d'être rigoureux menaçant même de famine les sujets de Pierre d'Angle. Alors est-ce que Thibault reprendra ses esprits suffisamment vite pour éviter la ruine ? 

Point d'aventure maritime dans ce deuxième volet puisque le prince héritier est de retour au bercail pour arracher les rennes du pouvoir des griffes acérées de son demi-frère. Les filles de mai est un récit riche d'intrigues de cour nourries par les mesquineries et les traîtrises d'un triste sire. Aussi, au fil des pages les désastres s'enchaînent et sont de plus en plus difficilement gérables pour notre jeune monarque qui se retrouve bien vite dépassé. Il faut dire que les éléments semblent s'être donnés le mot pour se déchaîner sur l'île car comme si l'hiver rigoureux accompagné d'une disette ne suffisaient pas, il a fallu qu'une épidémie s'invite au programme, suivie d'une sécheresse sans précédent. Rien ne va donc plus à Pierre d'Angle au point que Thibault ne sait plus à quel saint se vouer pour maintenir le cap de ce monde en perdition. En outre, pour en apprendre plus sur les intentions de Jacquard, une enquête s'impose que Thibault a délégué à l'un de ses fidèles. Ce qui aura le don de brusquer l'intrigue en lui faisant prendre un tour aussi éclairant que violent. Les secrets de famille ne manquent pas dans ce tome 2, certains seront révélés et d'autres non. L'étau se resserre autour de Thibault et de sa descendance. L'ombre d'un danger plane tout du long et seule Ema en a conscience. La malédiction de l'île s'apprête à réclamer son tribut et le prix s'annonce déjà trop élevé. En dépit de la menace qui sert de fil narratif au roman, il y a une certaine légèreté de ton qui allège un peu l'ambiance lourde. Celui-ci tient à cette communauté de personnages haute en couleur que Pascale Quiviger a mis en scène ici. Le style est vif et rythmé. Il interpelle le lecteur qui se laisse facilement prendre au jeu de cette histoire mystérieuse et surprenante. 

21/10/2023

Wesley Chu, Time Salvager, éditions Pocket Imaginaire

Wesley Chu, Time Salvager, éditions Pocket Imaginaire 

Wesley Chu est un touche-à-tout. Il a expérimenté bien des professions, de financier à cascadeur, avant de prendre la plume. Il est déjà l'auteur de plusieurs séries comme The Mortal Instrument, co-écrit avec Cassandra Clare, L'Art de la Guerre, Io ou encore Time Salvager. Ainsi, il écrit aussi bien pour la jeunesse que pour un public adulte et s'intéresse autant à la fantasy qu'à la science-fiction.

En septembre dernier, son très remarqué Time Salvager qui a, au passage, tapé dans l'œil du producteur Michael bay, est ressorti en poche. 

Lu dans le cadre d'un partenariat avec les éditions Pocket, je remercie Emmanuelle Vonthron pour l'envoi de ce service de presse. 

Résumé :

Après des décennies de crises qui n'ont eu de cesse de dépeupler la planète, l'humanité s'est dispersée aux quatre coins du système solaire. Dans ce monde décadent, la survie ne tient qu'aux chronmen, ces voyageurs du temps qui effectuent des bonds dans le passé pour ramener les sources d'énergie manquantes. James est l'un d'eux et est usé par ses trop nombreux voyages. Mais avant de raccrocher, il est chargé d'une dernière mission sensible. Il est donc envoyé récupérer une technologie sur la plateforme Nutris juste avant son explosion qui condamnera la Terre. Mais au lieu de se dérouler normalement, les événements vont lui échapper au point de le pousser à violer la première Loi Temporelle. Mais quelles en seront les conséquences ? 

Mon avis :

Time Salvager est un roman de science-fiction qui mêle le postapocalyptique à la dystopie en passant par le thriller. On plonge dans un futur décadent dans lequel la Terre a été dévastée suite aux Guerres Technologiques obligeant les humains survivants à coloniser les autres planètes du système solaire. Mais, ces conquêtes spatiales n'ont pas été exempts de conflits puisque des rivalités éclatèrent entre Venus, Terre et Mars les poussant à drainer les ressources énergétiques des planètes satellites : Eris, Pluton et Mercure. Seulement la plus meurtrière des guerres fut celle des Gazeuses, opposant Jupiter, Neptune, Uranus et Saturne, et tuant pas moins d'un milliard de personnes en seulement quarante ans. De ce désastre écologique et humain, il en ressort un monde en souffrance qui a dû s'adapter en développant la technique du voyage spatio-temporel afin de ramener du passé les ressources absentes. Celui-ci est régulé par un organisme appelé Chronocentre qui forme des chronmen, encadrés par des contrôleurs, chargés de réglementer chacune de leurs missions pour éviter toute perturbation du flux temporel. Ils répondent donc à des règles précises appelées Lois Temporelles qui apparaissent comme des garde-fous pour empêcher toute dérive. En outre, ces chronmen disposent d'une panoplie de bracelets leur donnant des capacités d'hommes augmentés avec l'accès à des barrières de protection, à des armes de précision ou encore à un dispositif de propulsion. Le tout donne un visuel très spectaculaire propice à une adaptation cinématographique. 

16/10/2023

Sacha Bazet, La Citerne, Naos, éditions Mnémos

Sacha Bazet, La Citerne, Naos, éditions Mnémos 

Derrière le pseudonyme Sacha Bazet se cachent deux amis qui partagent la même passion pour les livres et l'écriture. Après Ce qui nous hante - un roman qu'il me faudra lire - ils viennent de récidiver en publiant un nouveau livre partageant le même univers mais qui peut très bien se lire de manière indépendante. 

Lu dans le cadre d'un partenariat avec les éditions Mnémos, je remercie Estelle Hamelin pour l'envoi de ce service de presse. 

Résumé :

Au divorce de ses parents, Sarah a dû suivre son père et par conséquent, quitter sa mère, ses amis et sa cité qu'elle aime tant. Elle est de retour après une longue absence et se fait une joie de retrouver son petit monde. Pourtant sa mère lui fait très vite comprendre qu'elle ne peut pas s'éterniser, d'autant que l'ombre d'un confinement plane. Alors que son petit ami Victor décide de s'exfiltrer à Paris, elle choisit de rester. Seulement, les événements vont vite dérailler, à commencer par sa relation avec Vanja qui se met à battre de l'aile. Si l'une demeure extatique devant la Citerne, l'autre ne rêve que de s'en échapper. Face à ce mur d'incompréhension, une réconciliation sera-t-elle possible ? 

Mon avis :

La Citerne est un roman contemporain ponctué de notes fantastiques. Il prend cadre dans une cité HLM abritant une communauté solidaire et bienveillante. Une apparente normalité qui dissimule en réalité bien des secrets car les lieux n'ont rien de banal. En effet, personne ne semble vouloir en partir, pas même les morts dont leurs fantômes reviennent posséder les vivants d'un commun accord avec eux. Un petit arrangement dont il ne faut pas ébruiter l'existence. Alors lorsque débarquent des gens de l'extérieur, on n'a aucun mal à imaginer le branle-bas de combat que cela suscite pour maintenir l'illusion d'une vie ordinaire. 

La Citerne témoigne d'un imaginaire fécond peuplé de revenants amicaux, de spectre vengeur et d'esprit captif qui nous entrainent dans une sarabande infernale, troublante de révélations pour les habitants de cette cité insolite. 

Déjà son histoire est atypique. Elle a été construite sur les ruines d'un pénitencier et un trou béant s'est formé dans les soubassements, menaçant l'édifice d'effondrement. Elle est donc en soi une curiosité. Mais alors que tous devraient fuir les lieux, il n'en est rien car les gens s'y sentent protégés, à l'abri. Et pour cause, la Citerne est douée d'une âme propre et s'avère être une éponge émotionnelle pour ses résidants en absorbant leurs affects. Ainsi, la Citerne n'est donc pas qu'un simple cadre d'action mais elle est aussi et surtout un personnage central de l'histoire. Les mystères autour de ses origines et de son fonctionnement en font un objet de fascination pour le lecteur qui souhaite en comprendre tous les mécanismes. Sa présence sert de fil narratif auquel va s'agglomérer le destin des deux principales narratrices et de leurs proches. 

10/10/2023

Floriane Soulas, Tonnerre après les ruines, éditions Argyll

Floriane Soulas, Tonnerre après les ruines, éditions Argyll

Après le steampunk avec Rouille, la fantasy avec Les Noces de la Renarde et le space opera avec Les Oubliés de L'Ama, Floriane Soulas se tourne maintenant, avec Tonnerre après les ruines, vers le postapocalyptique

Autrice à succès, sa plume caméléon a su toucher le cœur de son public. 

Lu dans le cadre d'un partenariat avec les éditions Argyll, je remercie Xavier et Simon pour l'envoi de ce service de presse. 

Résumé :

Dans un monde où l'humanité ne réside plus que dans quelques bastions, Lottie et Férale sont pisteuses. Elles survivent en vendant leurs services de protection contre les malbêtes aux nomades en déplacement. Un jour, Férale entend parler de la cité de Tonnerre, fief de scientifiques travaillant à comprendre les mutations génétiques qui défigurent les humains, et espère y trouver des réponses quant à sa propre différence. Mais il n'est pas sûr que celles-ci lui plaisent ? 

Mon avis :

Dans Tonnerre après les ruines, on pénètre dans un monde asphyxié où la pollution a eu raison du vivant. On y rencontre une humanité finissante, rongée par la maladie. Les pluies acides ont rendu les terres infertiles retranchant la poignée d'humains dans les ruines de villes anciennes. Au milieu de ces vastes plaines arides se dresse Tonnerre, une citadelle peuplée de scientifiques qui cherchent ardemment un remède aux maux de l'humanité. Elle est un phare pour les miséreux qui s'agglutinent à son pied, parcourant parfois des milliers de kilomètres, dans l'espoir d'être sélectionnés afin de participer à des expériences visant à les guérir. Source d'espoir pour les uns ou lieu honni pour les autres, Tonnerre occupe une place centrale dans cette intrigue. Elle est une énigme à percer mais son exploration risque surtout de susciter horreur et épouvante. L'univers imaginé par l'autrice se nourrit autant du progrès scientifique que d'un légendaire oublié. Son imaginaire est très fertile. On note, par exemple, l'existence d'enfants foudre dont les corps sont parcourus par l'électricité faisant d'eux de parfaits générateurs.  

Tonnerre après les ruines est un roman d'action fort bien rythmé. Les évènements s'enchaînent vite, l'atmosphère y est rugueuse et suffocante

Floriane Soulas a fait de Tonnerre après les ruines, un roman implacable comme il sied dans un bon postapocalyptique. Elle nous dessine un futur inquiétant où l'humanité a brûlé sa chandelle par les deux bouts au point de s'être condamnée. Il est question ici de virus, de manipulations génétiques et de stérilité. La science est même érigée au rang de religion dans le sens que tous les espoirs sont placés exclusivement dans sa réussite. A ce titre, les scientifiques sont considérés comme des messies par tous ces nécessiteux qui se savent perdus. Ils en sortent grisés au point d'oublier l'éthique dans leurs démarches. Ainsi, ce choix narratif permet à l'autrice d'orienter sa réflexion sur les pratiques de la science lorsqu'elles se font au détriment du patient et pose la question de la réelle nécessité du sacrifice d'un grand nombre pour en sauver certains. De sauveur, le scientifique devient donc entre ces lignes, bourreau en nous questionnant sur ses dérives monstrueuses. 

06/10/2023

Nghi Vo, Entre les méandres, Les archives des Collines-Chantantes, éditions L'Atalante

Nghi Vo, Entre les méandres, éditions L'Atalante 

Après L'Impératrice du Sel et de la Fortune et Quand la tigresse descendit de la montagne, Nghi Vo conclut son triptyque d'histoires avec Entre les méandres.

Lu dans le cadre d'un partenariat avec les éditions L'Atalante, je remercie Emma pour l'envoi de ce service de presse. 

Résumé :

De retour sur les routes, l'adelphe Chih et Presque-Brillante se sont arrêtées dans une taverne pour y prendre un thé, au moment où un client malotru a décidé de s'en prendre physiquement à la serveuse. Mais alors que l'adelphe pensait intervenir pour calmer la situation, elle est interrompue par une femme qui, en un tour de main, met ce dernier hors d'état de nuire. Or, Presque-Brillante a reconnu le style du Singe du Sud dans sa technique de combat. Au vu de la rareté des adeptes de cette école d'arts martiaux, Chih a envie d'en apprendre plus et propose d'accompagner cette combattante et sa sœur sur un bout de chemin. Accepteront-elles ? 

Mon avis :

Dans sa série Les archives des Collines-Chantantes, Nghi Vo compile des histoires qu'elle nous narre sous la forme de contes. Racontés de manière éparse, il nous faut toujours démêler ce qui touche directement les personnages présents de ce qui relève de figures légendaires. 

Chacune des sorties de l'archiviste est donc l'occasion de collecter ces récits de vie afin de les consigner et ainsi en garder une trace. Aussi, le duo formé par l'adelphe et la huppe incarne ici la mémoire à transmettre aux générations suivantes. D'ailleurs, cette thématique est le fil directeur de ces trois novellas car derrière les hauts faits qui nous sont contés se dessine le destin agité d'un empire.

Bien loin des canons classiques de la fantasy où l'intrigue s'inscrit dans une lutte entre le Bien et le Mal avec des personnages qui prennent part pleinement à celle-ci, ici Nghi Vo nous propose plutôt une balade louvoyant entre présent et passé. En effet, ses deux principaux interviennent davantage comme observatrices plutôt qu'en tant que véritables actrices des événements. Submergées par l'afflux d'informations, elles sont davantage concentrées sur la manière de les retranscrire. Ainsi, Nghi Vo articule sa dernière novella autour du questionnement sur les choix faits par le passeur d'histoires car obligatoirement des détails seront occultés pendant que d'autres seront ajoutés. L'autrice rappelle que ces annales sont donc le fruit d'une perception subjective d'un tiers et qu'elles ne reflètent à ce titre que la vérité du témoin. 

03/10/2023

Aurélie Wellenstein, Les Loups chantants, éditions Pocket Imaginaire

Aurélie Wellenstein, Les Loups chantants, éditions Pocket Imaginaire 

Après Le Dieu Oiseau, Mers Mortes et Le Désert des Couleurs, j'ai profité de mon bref passage aux Aventuriales pour craquer pour un autre livre d'Aurélie Wellenstein. Parmi les titres présents sur sa table de dédicace, il y avait quelques exemplaires des Loups chantants, un roman qui me faisait de l'œil depuis un bon moment déjà. L'occasion était donc trop belle pour la laisser passer, n'est-ce pas ?

Mais avant de vous parler en détails de ce roman fort passionnant au demeurant, je tiens à remercier Aurélie Wellenstein pour sa gentillesse, sa dédicace et sa recommandation littéraire pour une autre Aurélie toute aussi sympathique.

Résumé :

Le dieu de l'Hiver règne sur les terres givrées de Sibérie. C'est là-bas, au sein d'une petite bourgade peuplée d'éleveurs de rennes que vit Yuri. A l'abri derrière un Blizzard maintenu par la magie des Gardiens, les habitants se sentent protégés des créatures envoyées par le terrible Korochun, à l'image des loups chantants. Pourtant le danger est bien là, Yuri en sait quelque chose puisque sa fiancée a cédé à l'appel des loups et a disparu dans le Blizzard. Or, un nouveau malheur vient de s'abattre sur lui car sa sœur est atteinte d'une étrange maladie. En effet, sa peau se couvre peu à peu de cristaux de glace. Pour le chaman local, Kira a été maudite et doit être bannie sans plus tarder pour ne pas attirer le courroux divin sur le reste du village. Mais il est impensable pour Yuri de la laisser partir sans lui. Alors au mépris du danger, il attelle ses chiens au traîneau et s'embarque aux côtés de sa sœur dans un périlleux voyage avec l'espoir ténu de trouver une solution. Y en a-t-il seulement une ?

Mon avis :

Les Loups chantants nous plonge dans un conte venu du froid où la beauté glacée des paysages côtoie un onirisme teinté de notes horrifiques. Ainsi, la magie imprègne chacune de ces pages. Elle s'exprime par bien des manières, tantôt par le pouvoir des Gardiens qui aspire les formules inscrites sur les pages des livres de magie afin qu'elles interagissent avec les éléments et maintiennent ainsi en place le Blizzard, tantôt par l'ombre du dieu Korochun entouré de créatures au corps altéré et à la puissance démultipliée ou tantôt par l'alchimie qui unit l'homme à l'animal permettant, au besoin, de fusionner l'âme humaine à celle de la bête.

Comme à son accoutumé, Aurélie Wellenstein a choisi un cadre rude pour ce présent roman où ses personnages doivent faire corps avec une nature hostile et inhospitalière. Les descriptions sont à couper le souffle et les animaux, omniprésents. Ils sont hissée au rang de protagonistes et témoignent de son profond attachement à leurs égards. Entre ces lignes, les loups sont aussi majestueux qu'inquiétants tandis que les chiens sont profondément attachants. 

Avec Les Loups chantants, on retrouve la signature d'un imaginaire singulier, foisonnant et féroce où l'épouvante fraie avec le beau. Aurélie Wellenstein est l'une de ces plumes qui a l'art d'horrifier et d'émerveiller, tout à la fois. Chacun de ses textes se savoure, ne serait-ce pour les ambiances très particulières qu'ils dégagent. Les Loups chantants ne fait donc pas exception et est tout aussi riche que ses autres livres. 

29/09/2023

François Baranger, Second Sorcier, T.2, Ars Obscura, éditions Denoël

François Baranger, Second Sorcier, T.2, Ars Obscura
éditions Denoël 

A l'heure où Sorcier d'Empire est en lice pour le prix Elbakin 2023, le tome 2 de la déjà très remarquée saga, Ars Obscura de François Baranger vient de sortir en librairie. Une bonne nouvelle qui va ravir les amateurs de la première heure. 

Lu dans le cadre d'un partenariat avec les éditions Denoël, je remercie Pascal Godbillon pour l'envoi de ce service de presse.

Résumé:

Pendant que Ludwig cherche un moyen pour libérer ses compagnons, Ethelinde et Mathurin, prisonniers de la garde Hermétique en plein cœur des Cévennes, Napoléon Ier, lui, se prépare à affronter les armées des coalisés à Waterloo avec l'appui de son sorcier Elégast. Maintenant que l'empereur dispose de l'Art Obscur, est-ce que cette redoutable puissance fera la différence sur ce tragique champ de bataille pour le camp français ? 

Mon avis :

A présent que l'on a fait la connaissance des personnages et que l'on a goûté à leurs tumultueux destins, le moment est venu de rentrer dans le vif du sujet. 

Avec sa série Ars Obscura, François Baranger nous plonge au cœur d'une période chaude de l'Histoire. L'heure est à la guerre, chaque camp fourbit ses armes, prêts à se jeter à corps perdu dans la bataille avec la peur chevillé au cœur de ne pas y survivre. Les pages défilent, le ton est rythmé et l'atmosphère est âpre. L'auteur mêle habilement le son des baïonnettes et le goût de la poudre aux manifestations magiques qui embrasent ici les affrontements. Les scènes sont spectaculaires avec ces deux puissances qui s'affrontent car les Français ne sont plus les seuls à disposer d'un sorcier. La donne a donc changé et nous promet un véritable choc des titans. Néanmoins, au lieu de l'Armageddon promis, on assiste à une débâcle française, suite à la défection de leur protecteur qui s'est retrouvé totalement démuni face à un pouvoir bien supérieur au sien. En introduisant cet élément inattendu, François Baranger rejoue la partition d'un évènement historique décisif à la finalité identique mais qui dégage un tout autre parfum. 

En outre, pour nourrir le pan occulte de son intrigue, l'auteur puise à la fois dans le folklore légendaire datant du VIIe siècle que dans le culte d'un dieu sanguinaire perpétué par les membres d'une secte russe qui jouent avec des forces qu'ils ne maîtrisent pas. Sous la plume de François Baranger, les époques historiques se télescopent pour légitimer l'onirisme de ce texte en lui donnant un sens crédible. Entre expériences scientifiques et exhumations de rites ancestraux, on reste bluffé par l'ingéniosité de l'auteur qui nous fait traverser des territoires sombres et terrifiants. 

Dans ce grand chassé-croisé de personnages, certaines rencontres promettent d'être explosives pendant que d'autres semblent salutaires. Quoi qu'il en soit toutes vont nous tenir en haleine car finalement nul ne peut prédire comment elles vont se solder. 

Les cabales vont bon train mais il faut dire que la période est propice. Pour autant, aboutiront-elles aux attentes des instigateurs, rien n'est moins sûr car François Baranger apprécie autant de jouer avec l'Histoire qu'avec ses personnages. Alors tout peut arriver car l'inattendu est le maître-mot de cette aventure. 

Second Sorcier est un tome riche en révélations qui dessinent déjà une suite pleine de rebondissements avec des protagonistes qui se préparent déjà à la contre-attaque. 

Si l'action est le fil directeur de ce récit, il n'en demeure pas moins qu'il dégage également beaucoup d'émotions qui vont notamment s'exprimer à travers des retrouvailles touchantes. Les deux forment ici un cocktail réussi pour nous offrir un instant de lecture intense et captivant. 

Pour conclure :

Fort bien documenté sur l'ère napoléonienne, François Baranger signe une uchronie réussie qui louvoie entre réalités historiques et épisodes fictifs. Gros coup de cœur pour ma part. A quand le vôtre ?

Fantasy à la Carte

D'autres avis sont à lire sur la blogosphère : Le Nocher du Livre.

Informations

A lire sur le blog, mon avis sur Sorcier d'Empire

François Baranger
Second Sorcier
T.2
Ars Obscura
9782207165850
442 pages
Editions Denoël

19/09/2023

Louise Jouveshomme, Neighian, T.2, éditions Mnémos

Louise Jouveshomme, Neighian, T.2, éditions Mnémos 

Pépite de l'imaginaire 2023, le premier volet de Neighian a été un vrai coup de cœur pour moi. Entre un univers fouillé et des intrigues politiques, Louise Jouveshomme cochait déjà toutes les cases pour faire un bon livre. 

Or, ce mois de septembre sonne le retour en librairie de cette jeune pousse avec la fin tant attendue de sa duologie.

Lu dans le cadre d'un partenariat avec les éditions Mnémos, je remercie Estelle Hamelin pour l'envoi de ce service de presse. 

Résumé :

Coup de théâtre, après sa vaine tentative de faire reconnaître par les sirènes l'innocence du peuple des Elfes dans l'assassinat d'un membre de la Meute, Heltia de Cytari s'est réfugiée à la cour de Breniam où le roi Cassar III reconnait en elle, sa nièce disparue Hippolyte de Carnaïm. Contre toute attente, elle se prête au jeu et embrasse cet héritage royal, dans l'espoir peut-être vain de se venger et de renverser l'échiquier politique en place ? Mais est-elle réellement celle qu'elle prétend être ? Et pourra-t-elle vraiment démasquer les commanditaires qui se cachent derrière le Nouvel Ordre? 

Mon avis :

Février n'est pas si loin, pourtant cela n'a pas été simple de raccrocher les wagons tant l'intrigue de Neighian est complexe. Si le tome 1 a été un roman d'exposition dans lequel Louise Jouveshomme nous présente son riche univers et initie son intrigue politique, le tome 2, lui, complexifie grandement la trame narrative de ce récit. Il faut dire que même si l'histoire est portée par Hestia et Melion, de nombreux intrigants gravitent autour d'eux obligeant les lecteurs à redoubler d'attention pour ne pas perdre le fil. 

Avec Neighian, Louise Jouveshomme marche sur les plates-bandes d'un certain G.R.R. Martin avec un texte qui, comme dans Le Trône de Fer, partage ces mêmes rivalités dans la course au pouvoir et ou chaque protagoniste est le pion d'un autre. Ce choix narratif est à la fois un atout et une difficulté avec une autrice qui endosse le rôle de marionnettiste de ses très nombreux protagonistes jouant ici presque tous un double jeu. En effet, chacun d'entre eux y va de ses mensonges et de ses manipulations pour servir un dessein qui lui est propre et donner à ce second volet un caractère imprévisible. Ainsi, la trahison est souvent de la partie même si on ne la voit venir car l'autrice demeure bien maîtresse de son jeu en maintenant une chappe de suspense d'un bout à l'autre du récit. 

En sus des complots de cour qui émaillent largement les pages de ce tome 2, il est également question de batailles épiques, de la levée de contingents militaires  ou encore de siège car l'autrice s'est attachée à nous conter la reconquête d'un pouvoir et la lutte sanglante contre des hordes d'ennemis. Le ton est mordant et les descriptions sont rugueuses.

Quant à la magie qui imprègne cette duologie, elle emprunte au souffle brûlant du dragon et confère à Hestia une puissance brute et dévastatrice qui bouillonne au fond de son être. Celle-ci n'est pas le cœur du propos mais accompagne l'un des personnages principaux dans sa quête. Tout comme l'ikantaikâ est l'apanage des Elfes qui leur donne accès au monde invisible afin de sonder les âmes.

Chevauchées, conspirations et surnaturel caractérisent le cœur de ce roman et offrent un moment de lecture sans temps mort. 

Enfin, dans ce tome 2, Louise Jouveshomme change totalement de paradigme avec d'un côté, Hestia qui passe du statut de mercenaire à celui d'héritière royale l'obligeant à adopter de nouvelles stratégies et de l'autre côté, Melion qui, lui, doit faire face à un handicap imprévu tout en œuvrant pour ne pas être le sacrifié de ce jeu de dupes dont il ne connait pas les règles.

Pour conclure :

Avec Neighian, on goûte à une œuvre dense qui nécessite sans doute d'être lu d'une traite pour ne rien perdre de la richesse des éléments essaimés ici.  C'est un premier roman qui frappe fort de par son ambition et sa qualité. Louise Jouveshomme est indéniablement une plume de l'Imaginaire à suivre. Alors suivez mon conseil et lisez Neighian !

Fantasy à la Carte

A lire sur le blog, mon avis sur le T.1 de Neighian.

informations

Louise Jouveshomme
Neighian
T.2
9782382670835
510 pages
Editions Mnémos

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13/09/2023

Ina Siel, Le Cercle des Géographes, T.1, Emblèmes, Naos, éditons Mnémos

Ina Siel, Le Cercle des Géographes
T.1, Emblèmes
Naos, éditions Mnémos 

Autrice de science-fiction et de fantasy, Ina Siel aime beaucoup se perdre dans ses mondes imaginaires clairs-obscurs. 

Après un premier roman, Le musée galactique des choses disparues, publié aux éditions Haro, en septembre 2022, la voici de retour avec un nouveau titre édité, cette fois-ci, chez Mnémos.

Avec Emblèmes, premier tome d'une duologie, l'autrice a quitté les rivages de la dystopie mâtinée de cyberbunk pour accoster sur le territoire d'une fantasy, teintée d'obscurité. 

Lu dans le cadre d'un partenariat avec les éditions Mnémos, je remercie Estelle Hamelin pour l'envoi de ce service de presse.

Résumé :

Érèbe d'Aigremort préfère la compagnie de son loup et la solitude de la forêt, plutôt que celle de ses semblables pleine de mesquinerie et de moquerie. Sur son compte courent les pires rumeurs, sa présence suscite tantôt l'effroi, tantôt la haine car les gens préfèrent se fier aux mauvaises langues plutôt que de faire leur propre opinion. Alors qu'il pensait demeurer seul, l'héritière de la maison Vonburg de Souale souhaite le rencontrer pour l'épouser. Il est vrai que la dot qu'elle apporte pourrait sauver le domaine de la ruine mais pourquoi désire-t-elle tant épouser un monstre ? Cécilie n'accorde que peu d'importance aux commérages et elle compte bien obtenir par son union un ticket d'entrée pour la Scientifica où elle espère trouver sa place et s'épanouir. Seulement son manque d'honnêteté et l'emballement des évènements pourraient bien lui coûter son rêve ?

Mon avis :

Dans Emblèmes, Ina Siel nous ouvre les portes d'un univers merveilleux et occulte qui oscille entre science et magie. Ce monde se divise en trois espaces distincts. Il y a Naturalia, administré par les cinq cités nations : Archonde, Lux, Cavare, Souale et La Tour qui entretiennent des relations commerciales entre elles et avec La Scientifica. Cette dernière forme, d'ailleurs, un archipel de cinq îles : l'île des Cendres, l'île des Pierres, l'île du Lys, l'île du Lierre et l'île de la Rose. Véritable berceau des innovations technologiques, elle abrite en son sein l'université qui forme les hommes et les femmes à devenir les futurs Scientificiens. Enfin, Exotica est une vaste jungle où vivent de manière éparse des clans régis par de puissantes entités, qualifiées ici d'Emblèmes, qui leur sont propres et leur confèrent une magie particulière. Leur existence demeure abscons aux yeux des Naturaliens et des Scientificiens qui organisent régulièrement des expéditions pour ramener des spécimens et percer les secrets de cette sorcellerie. Or, ces trois mondes dégagent des ambiances bien différentes. Si Naturalia personnifie le XVIIIe siècle à travers l'emprise des naturalistes, l'essor des cabinets de curiosités, l'engouement pour le commerce des produits exotiques et le maintien d'une société patriarcale, La Scientifica, elle, s'inscrit davantage dans notre époque contemporaine marquée par un important progressisme scientifique et social. Quant à Exotica, elle demeure un vaste territoire sauvage dominé par une nature luxuriante où s'épanouie la magie transformant même les espèces en créatures ésotériques. Véritable hommage à ces fameux cabinets de curiosités dont la désignation des objets s'y trouvant a littéralement inspiré l'autrice dans son choix du nom des lieux où se déroule l'action de son livre. Ainsi, naturalia désigne les objets de nature animale, minérale et végétale, scientifica fait référence aux instruments scientifiques et exotica renvoie à la faune et à la flore exotique, ainsi qu'aux objets ethnographiques. 

Des cercles érudits à l'équipée sauvage, l'atmosphère dégagée ici emprunte au gothique donnant au récit un charme suranné. 

L'intrigue de ce premier volet d'Emblèmes repose sur le couple arrangé formé par Érèbe d'Aigremort et Cécilie Vonburg qui sont les deux narrateurs de cette histoire. Introverti et solitaire, Érèbe est littéralement écrasé sous le poids des rumeurs qui entachent sa réputation l'empêchant ainsi de s'épanouir. C'est un protagoniste profondément touchant, hanté par un drame survenu alors qu'il était très jeune mais dont les souvenirs demeurent flous. Depuis lors, il fait des cauchemars toutes les nuits, toujours réveillé par ses hurlements. Cela l'a fragilisé au point de le couper de la société qui rejette sa différence préférant l'injurier plutôt que de le comprendre. Son altruisme et son envie irrépressible d'être aimé attendrissent et déclenchent une vive émotion dans le cœur des lecteurs qui découvrent son histoire. A contrario, Cécilie, elle, est une âme forte, une battante qui souhaite s'écrire son propre destin sans se soucier des autres. Elle est étouffée par le modèle de société prôné à Naturalia reléguant la femme au seul rôle d'épouse et ne rêve que de s'émanciper, d'étancher sa soif de savoirs en s'inscrivant à l'université afin de devenir à son tour une Scientificienne. Or, pour arriver à ses fins, elle a élaboré un plan aussi opportuniste que machiavélique. Son désir d'indépendance est louable et compréhensible mais ses mensonges et ses non-dits le sont moins vis à vis d'un Érèbe si meurtri. Ainsi, Ina Siel a pris le parti de nous brosser le portrait de protagonistes nuancés avec d'un côté un homme accablé par la rumeur dont il faudra démêler le vrai du faux et de l'autre côté, une femme déterminée à l'égocentrisme blessant. 

Dès les premières lignes de son livre, Ina Siel nous emporte dans le tourbillon des péripéties par lesquelles passent ses deux personnages principaux. La plume est fluide et n'a aucun mal à nous faire adhérer à son histoire. D'autant que le texte est ponctué de thèmes pertinents. Bien sûr, on va retrouver des éléments familiers au Young Adult comme l'amitié, l'amour ou l'apprentissage, mais l'autrice nous parle aussi d'handicap, de dépression et de maladie en mettant notamment en exergue la manière de les surmonter ou tout du moins de les apprivoiser. Elle table plutôt sur des destins tourmentés et des personnages fragilisés donnant ainsi un accent très réaliste tout en suscitant moult émotions. 

Pour conclure :

Exploration, secrets et complots politiques émaillent les lignes de ce fabuleux récit. Avec Emblèmes, Ina Siel échafaude une intrigue ambitieuse qui n'a pas fini de nous faire réagir d'autant que le suspense est manié ici avec beaucoup de machiavélisme. Vous voilà prévenus mais comment ne pas succomber au charme de cette signature déjà si prometteuse? 

Fantasy à la Carte

Informations

Ina Siel
Le Cercle des Géographes
T.1
Emblèmes
9782382670842
382 pages
Collection Naos
Editions Mnémos

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