Après Rivages (2019) et La Fin des étiages (2020), Gauthier Guillemin signe un nouveau récit de science-fiction au format d'une novella. Il s'agit de Métempsychogenèses, publié par les éditions 1115. Voici un titre aussi imprononçable qu'intriguant.
Lu dans les cadre d'un partenariat, je remercie les éditions 1115 pour l'envoi de ce service de presse.
Pour nous éclairer, commençons par faire un peu de sémantique. En grec ancien, métempsychose désigne le transvasement d'une âme dans un autre corps, qu'elle va animer. Ce concept trouve son origine dans l'Egypte antique et renvoie ni plus ni moins à la transmigration des âmes.
Maintenant que le titre est déchiffré, voyons d'un peu plus près ce que raconte ce récit.
Résumé :
A Sharp Plateau situé dans l'Alaska, un groupe de chercheurs travaillent à extraire les âmes d'écrivains disparus de ce qu'ils appellent le flux métensomatique. Leur but étant qu'elles accompagnent les derniers humains dans leur ultime voyage vers une destination inconnue. En effet, devenue inhospitalière, la planète terre n'est plus un refuge pour ce fragment d'humanité qui va chercher le salut ailleurs, mais pour ne pas sombrer dans la folie, il est nécessaire que leur longue période de stase soit bercée par la littérature. En tout cas, c'est ce que pensent les scientifiques à l'origine du projet. Mais le temps presse alors réussiront-ils leur bien étrange mission ?
Mon avis :
Dans Métempsychogenèses, on va retrouver des codes habituels en science-fiction comme une planète terre mourante, malmenée par un enchaînement de cataclysmes et une humanité finissante drastiquement réduite. A cela, l'auteur a ajouté la notion de sauvegarde par l'intermédiaire de voyage à bord de vaisseaux dans des caissons cryogénisés afin de placer leurs corps en stase le temps d'arriver à bond bord. Jusque là rien de nouveau pour un récit de science-fiction car entre apocalypse et voyage spatial, on n'est point dépaysé. Pour autant, ce texte demeure très originale dans sa manière d'aborder le sauvetage de l'humanité. Ainsi, cette croyance dans l'immortalité de l'âme qui survit en changeant d'hôte se concrétise entre ces lignes grâce à la science qui agit sur le flux pour en extraire les âmes. Celles-ci sont ensuite projetées dans un automate afin de donner un corps provisoire qui va les stabiliser et empêcher qu'elles se volatilisent. Voilà un concept aussi fascinant qu'effrayant. Or, ce procédé est testé sur les âmes des hommes et des femmes de lettres de différentes époques afin que leurs œuvres ne tombent pas dans l'oubli après la disparition de la terre et qu'ils continuent d'abreuver les survivants de leurs écrits. En faisant de la littérature un garde-fou, Gauthier Guillemin cherche surtout à lui rendre hommage. Il souligne son importance et revient, par l'intermédiaire de grands noms, sur les courants qui ont marqué l'histoire des littératures comme le romantisme français. Néanmoins, ces poètes ne sont pas choisis au hasard car ils s'intéressaient en leur temps à la déraison de l'esprit en l'expliquant comme le fruit d'un corps occupé par quelqu'un d'autre. C'était une théorie que prônait Gérard de Nerval pendant ses moments de lucidité et qui a inspiré John-Antoine Nau pour son roman, Force ennemie lui valant le premier prix Goncourt. Ainsi, le récit prend une tournure surprenante en traitant avec beaucoup de rationalité un courant de pensées fumeux mais tenace.
En outre, Gauthier Guillemin en profite pour questionner l'intérêt et la légitimité d'aller coloniser d'autres planètes quand on n'a pas pris soin de la sienne. Ainsi, deux écoles de penser s'opposent entre ces pages avec d'un côté, ceux qui préfèrent rester et voir venir, quitte à se refugier dans un déni de réalité et de l'autre côté, ceux qui se lancent dans un tout pour le tout en espérant sauver quelque chose.
Dans Métempsychogenèses, on suit pas mal de personnages dont on ne sait finalement que très peu de choses. En tout cas, on n'en apprend pas suffisamment pour qu'ils retiennent durablement notre attention. Mais, c'est la limite imposée par le format court qui ne laisse pas le temps de bien faire connaissance.
Pour conclure :
Le point fort de ce texte réside dans sa singularité qui nous entraîne sur des chemins encore inexplorés et posent donc question. En cela, Métempsychogenèses est clairement un ovni, le lirez-vous ? Il sort le 20 mars.
Fantasy à la Carte
Informations
Merci pour cette chronique ! la première je crois, juste avant la sortie officielle de demain.
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