09/11/2023

Fabien Clavel, Buffy, baroque épopée, éditions Mnémos

Fabien Clavel, Buffy, baroque épopée, éditions Mnémos 

De Fabien Clavel, je ne lui connaissais jusque-là que sa casquette de romancier pour avoir lu les excellents, Feuillets de Cuivre et La Niréide, mais aujourd'hui, je vais plutôt m'intéresser à celle d'essayiste à travers son essai sur Buffy, sorti depuis peu en librairie.

Culte pour certains ou série B pour d'autres, Buffy n'a pas laissé indifférent et quoi que l'on en dise, elle demeure un phénomène pop culture. 

Pour ma part, me replonger dans l'univers de Buffy a été un moment de nostalgie de redécouvrir une série qui a marqué ma jeunesse et sans doute même suscité, inconsciemment, mon goût pour l'Imaginaire.

Lu dans le cadre d'un partenariat avec les éditions Mnémos, je remercie Estelle Hamelin pour l'envoi de ce service de presse. 

Résumé :

Avant de rentrer dans le vif du sujet, je vous propose un petit rappel du synopsis de Buffy contre les vampires si d'aventure vous ne connaissiez pas. Bien qu'elle aspire à une vie tranquille de lycéenne, Buffy Summers est une Elue chargée de tuer vampires et démons à chaque tombée de la nuit afin de nettoyer les rues de Sunnydale. Elle est guidée par le bibliothécaire Giles qui lui sert d'Observateur et d'entraîneur, et est accompagnée de ses deux amis Willow et Xander. L'ensemble forme un bouclier contre les forces du Mal qui sont à l'œuvre au sein de cette petite communauté construite sur une bouche de l'Enfer. 

Mon avis :

Dans son ouvrage Buffy, baroque épopée, Fabien Claver s'est surtout intéressé à l'esthétique très particulière de cette série pour comprendre en quoi elle est à la fois, selon lui, épique et baroque. 

Il a organisé son analyse selon trois angles d'attaque. Il commence par mettre en exergue l'épopée moderne que fut cette série, à travers son lien nourricier avec la mythologie antique. Ainsi, la construction du personnage de Buffy répond bien au mythe du héros ou dans le cas présent de l'héroïne qui est toujours décrit comme étant solaire, à l'image d'Achille dans L'Iliade. Clairement, Buffy Summers l'est également par sa blondeur, par ses goûts vestimentaires très colorés, ainsi que par sa vivacité. De même, en tant qu'Elue, elle est bien une héroïne puissante, disposant de capacités hors norme lui permettant d'accomplir sa mission. Proche de la vision du super-héros à travers sa force, sa vitesse, sa maîtrise des arts martiaux ou encore sa capacité de régénération rapide, Buffy correspond bien au modèle héroïque tel qu'il nous est décrit dans les mythes. D'autant qu'elle occupe également le rang suprême de cheffe en s'opposant à l'autorité et en commandant les autres Tueuses. Enfin, elle n'œuvre pas seule dans sa quête puisqu'elle est entourée de compagnons faisant directement référence au thème du "double" cher à certains mythes comme celui d'Achille qui est accompagné de Patrocle. A la lumière de tous ces éléments, on ne peut donc que s'incliner sur le caractère épique de Buffy contre les vampires

Mais, quid du genre auquel elle appartient. Difficile de s'entendre sur le sujet entre les uns qui la classent en fantasy urbaine, les autres en horreur et certains, même, en science-fiction. Pour Fabien Clavel, la question mérite d'être posée puisqu'elle occupe même la deuxième partie de son essai. Ainsi, pour la caractériser, il commence par s'appuyer sur la définition de la fantasy d'André-François Ruaud : "Relève de la fantasy une littérature dotée d'une dimension mythique et qui incorpore dans son récit un élément de surnaturel ou d'irrationnel au traitement non purement horrifique notamment incarné par l'irruption ou l'utilisation de la magie". Buffy est donc bien de la fantasy disposant à la fois d'un héritage mythique et usant de magie, à travers les sorts lancés par Willow & co, sans oublier l'abondance de créatures surnaturelles qui défilent à chaque épisode. En outre, l'horreur y est également très présente. Elle s'exprime déjà par les nombreux monstres, tous plus difformes et repoussants les uns que les autres que doit affronter l'héroïne. Il est même question d'épouvante lorsqu'est introduit de manière suggestive le retour de l'un des protagonistes décédés sous la forme de zombie. Le frisson est donc garanti lors de ces moments critiques de l'action. Enfin, les nombreuses références à des robots classent, de facto, cette série en science-fiction, tout comme l'agence gouvernementale qui transforme les démons en rats de laboratoire et travaille sur des puces à implanter pour les contrôler. 

Fantasy, horreur ou science-fiction, Buffy contre les vampires est tout cela à la fois et bien d'autres choses encore que l'auteur prend le temps d'expliquer entre ses lignes. En mélangeant les ambiances, le producteur Joss Whedon a sans doute trouvé là la clé du succès. 

Mais pourquoi Fabien Clavel insiste tant pour qualifier Buffy contre les vampires de baroque ? Peut-être parce qu'elle correspond à quatre critères propres à l'art baroque : l'instabilité, la mobilité, la métamorphose et la domination du décor. L'univers de Buffy contre les vampires est clairement instable car Sunnydale construite sur une bouche de l'Enfer est régulièrement parcouru de secousses sismiques. Des lieux y sont, d'ailleurs, souvent détruits comme le lycée qui sera entièrement détruit à la fin de la saison 3, pour être reconstruit et à nouveau détruit par la suite. Cette mobilité réside aussi beaucoup dans les dispositifs privilégiés par Joss Whedon, notamment concernant le choix des décors qui rappelle le théâtre shakespearien privilégiant toujours une scène principale dominée par une galerie surélevée. Aussi, dans les décors de la série, il y a beaucoup d'escaliers favorisant le déplacement des acteurs tout en multipliant les points de vue. 

En outre, en passant des visages humains à des figures démoniaques autant pour les vampires que pour les héros de l'histoire, la métamorphose demeure bien le fil conducteur de cette série. Comme le dit Fabien Clavel lui-même "la série explore bien toutes les possibilités du masque afin de créer une confusion sans fin". Rien n'est donc figé et tout se transforme. 

Enfin, le baroque cherche à séduire aussi bien par le visuel que par le langage. Pourtant, la domination du décor ne passe pas ici par son abondance car celui-ci a été réalisé à peu de frais. Mais, Joss Whedon compte sur les illusions pour impressionner son public. Ainsi, les personnages de sa série rêvent beaucoup les uns des autres au point de générer de la confusion chez les spectateurices qui s'interrogent sur ce qui est réel ou relève du fantasme. Mais, le phénomène le plus marquant demeure l'omniprésence du langage qui nous noie littéralement sous les dialogues pour mieux subjuguer ou au contraire, accabler. 

En somme, on ne peut qu'acquiescer à la fine analyse de Fabien Clavel qui nous démontre que la série répond bien à ces quatre critères. 

Pour conclure :

En signant cet essai très détaillé sur Buffy contre les vampires, Fabien Clavel nous invite à poser un autre regard sur un élément de la pop culture qui est loin de se résumer à un simple divertissement. 

Clairement, Buffy, baroque épopée se présente comme une invitation à un énième revisionnage de ce teen drama riche de plus d'un sens.

Fantasy à la Carte

A lire sur le blog, mes avis sur Feuillets de Cuivre et La Niréide

Informations

D'autres avis sont à lire sur la blogosphère : Books, Tea time & Sweet apple pie et Vampirisme.com

Fabien Clavel
Buffy, baroque épopée
9782382670873
240 pages
Editions Mnémos

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