Auteur finlandais de science-fiction et de fantasy, Hannu Rajaniemi s'est d'abord illustré avec sa série d'hard science-fiction, Jean le Flambeur, avant de nous proposer, en 2018, un roman indépendant titré Summerland et que les éditions ActuSF ont décidé de publier cet été.
Lu dans le cadre d'un partenariat avec les éditions ActuSF, je remercie Jérôme Vincent pour l'envoi de ce nouveau service de presse.
Summerland accueille les âmes des défunts, si et seulement si, ceux-ci ont obtenu un Ticket avant leur mort. La mort n'est donc plus une fin en soi mais est devenue un enjeu de rivalités pour les puissances de ce monde. Et ce n'est pas l'agente gouvernementale Rachel White qui dira le contraire, elle, qui vient de découvrir l'existence d'une taupe soviétique au sein même de Summerland, et que, sous prétexte que celle-ci dispose d'appuis hauts placés, se voit mise sur la touche. Pour autant, acceptera-t-elle cette situation ou au contraire risquera-t-elle sa carrière pour aller au bout de ses convictions ?
Summerland est une uchronie de science-fiction, imprégnée par l'ambiance du roman d'espionnage.
Influencé par sa propre expérience universitaire en physique mathématiques, Hannu Rajaniemi a mis dans son livre la science et la technologie au service de l'au-delà afin de rendre possible une interaction entre les vivants et les morts. Aussi, des outils techniques interagissant avec l'éther sont mis à disposition des vivants pour communiquer avec les âmes peuplant Summerland ou à contrario, permettre à certains défunts de revenir parmi les vivants en empruntant notamment le corps d'un médium. Sans en dévoiler toutes les subtilités, il est bon de noter qu'Hannu Rajaniemi se fait l'inventeur de toute une technologie complexe qui vient habilement donner du crédit à son uchronie.
D'ailleurs, celle-ci repose sur un postulat de la Première Guerre mondiale sensiblement différent avec l'usage d'un armement encore plus redoutable et une finalité autre où les empires britannique et soviétique semblent les seuls grands vainqueurs de ce conflit. Sans surprise, il en découle donc une géopolitique dissemblable avec deux acteurs qui s'engagent sur une autre voie politique : la conquête de l'immortalité.
Or, ce questionnement autour de la vie après la mort fait à la fois écho au spiritisme qui a imprégné la société d'après-guerre qu'au transhumanisme qui s'invite dans la débat moderne, reflétant l'éternelle peur de mourir des humains.
D'autre part, cette tension qui habite ces deux empires rivaux est intéressante du fait qu'elle permet d'introduire la notion d'espionnage, soit une réalité historique et politique, fort à propos ici car elle vient entourer l'intrigue d'une aura de mystère tout en impulsant du rythme à notre lecture. Outre, l'ingéniosité du cadre uchronique imaginé, la force de ce texte réside beaucoup dans l'investigation menée par cette agente secret au sein même du pouvoir et des agences gouvernementales.
D'ailleurs, ce parti pris d'avoir choisi une femme comme personnage principal est à mon sens très adroit car il faut toujours garder en tête le contexte de l'époque puisqu'il était encore plus difficile pour une femme de s'imposer dans une société totalement patriarcale et particulièrement à un poste stratégique impliquant une connexion avec la sphère du pouvoir.
Avec l'agente Rachel White, Hannu Rajaniemi nous brosse le portrait complexe d'une femme têtue et incorruptible ayant un sens de l'honneur et un patriotisme très développé. Tiraillée entre le tournant difficile que prend sa carrière et ses problèmes personnels, notamment sa relation de couple qui bat de l'aile suite à des drames intimes, Rachel White est réellement captivante à suivre car elle emprunte des chemins inattendus et nous promet quelques coups de théâtre au détour de certaines pages de ce livre.
Avec Summerland, Hannu Rajaniemi signe un roman aussi brillant qu'inattendu. Il nous entraîne à perdre haleine dans une intrigue originale et bien ficelée qui nous laisse pantois du début à la fin. A lire !
Fantasy à la Carte
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