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23/04/2021

Robert Jackson Bennett, Les Maîtres Enlumineurs, éditions Albin Michel Imaginaire

Robert Jackson Bennett, Les Maîtres Enlumineurs, Albin Michel Imaginaire

Fortement louangé par la communauté, le nouveau roman édité chez Albin Michel Imaginaire a su toucher le cœur de ses lecteurs. Il est signé par Robert Jackson Bennett qui a délaissé pour un temps ses polars mâtinés de fantastique et d'horreur pour écrire un cycle de fantasy pure. 

Reçu en service de presse, je remercie Gilles Dumay pour cette belle surprise que j'avais hâte de lire. 

Dans Les Maîtres Enlumineurs, on marche dans les pas d'une jeune voleuse, prénommée Sancia. Vivant jusque-là de vols sans envergure, elle espère raccrocher en effectuant un dernier grand coup, censé lui rapporter un bon pécule, lui permettant de mettre les voiles. Engagée pour dérober un étrange artefact gardé sous haute surveillance dans un entrepôt, elle est a cent lieux d'imaginer ce qu'elle va déclencher. Avec une telle puissance entre ses mains, rien d'étonnant à ce que le monde se déchaîne autour d'elle. Saura-t-elle se trouver les bons alliés pour l'aider dans sa quête ? 

Dans Les Maîtres Enlumineurs, Robert Jackson Bennett a voulu faire de la magie le critère principale de sa fantasy. Point de dragons, d'elfes ou de nains mais un système de magie minutieusement imaginé relevant presque de la technologie. En constatant dans les romans de ses homologues que finalement les manifestations magiques étaient peu expliquées, il a voulu dans son livre leur donner une autre dimension. Il est vrai que généralement dans la littérature fantasy, les personnages disposent simplement de pouvoirs leur permettant de réaliser des prodiges. Cela peut passer par l'énonciation de formules magiques et/ou l'utilisation d'objets comme une baguette mais les auteurs vont rarement plus loin. Alors Robert Jackson Bennett a eu l'idée d'inventer l'enluminure, un procédé qui consiste à graver des sceaux sur la surface d'objets afin de les animer pour leur faire faire ce que l'on souhaite. Ces runes sont autant d'injonctions ordonnées aux lesdits objets pour les détourner de leur fonction initiale. Ainsi, dans ce roman, on trouve, par exemple, des carrioles qui se déplacent toutes seules selon un itinéraire au préalablement défini par le sceau inscrit. Ici, l'auteur nous décrit de manière détaillée les mécanismes qu'emprunte cette magie pour fonctionner. On plonge ainsi dans un univers animé par une multitude d'objets qui influent sur la réalité. Mieux encore, son existence, on la doit à un groupe de savants, appelés les Hiérophantes, érigés au rang de divinités. Celle-ci trouve donc ses origines dans le mythe, ce qui lui ajoute un caractère sacré.  

La magie est donc omniprésente, le système est si développé qu'il est même intrinsèquement lié au fonctionnement de la cité. A Tevanne, le pouvoir est entre les mains des quatre maisons marchandes qui sont les seules à avoir autorité pour commercialiser des objets enluminés. En perpétuelle rivalité, leurs dévorantes ambitions dessinent les contours de la cité et mettent les habitants aux pas. Dans ce cycle, l'auteur nous brosse le portrait d'une société très marquée par les clivages sociaux. Si les quatre maisons sont installées dans des quartiers ultra protégés à la pointe du modernisme et des commodités, il en va de manière bien différente pour le reste de la cité où s'entassent dans des réduits insalubres, les foyers les plus pauvres. Tevanne abrite donc deux mondes qui vont être le théâtre de la lutte mise en exergue dans ce récit. En effet, les héros de Robert Jackson Bennett vont devoir s'allier afin d'empêcher que l'une des maisons asseye sa domination sur le monde en supprimant, au passage, de nombreuses vies. 

Dès son premier tome, l'auteur nous immerge dans un récit sans temps mort entraînant ses personnages dans un tourbillon de rebondissements et de découvertes. Le récit est rythmé et les intrigues sont nombreuses. L'héroïne principale n'est sans doute pas pour rien dans l'attachement des lecteurs à ce texte. Voleuse, Sancia est un personnage cabossé par la vie. Échappée d'une exploitation esclavagiste, on apprécie immédiatement la morgue de cette jeune femme. On lui découvre ce passé douloureux duquel elle a réussi à s'extirper. Il en ressort une femme meurtrie dans sa chair car Sancia est une victime de l'enluminure. Objet d'expérience, elle a été à son tour enluminée, ce qui lui donne la capacité par le toucher de faire parler les matières, ainsi que de voir à travers elles. Effrontée et courageuse, on s'entiche immédiatement de cette héroïne hors norme dont on aimerait avoir plus de détails sur son passé et la voir aussi s'épanouir dans ses relations. C'est également le cas avec Gregor Dandolo qui vient, malgré lui, prêter main forte à cette voleuse dans sa quête insensée mais inévitable. C'est un personnage qui demeure encore très énigmatique, les zones d'ombre de son passé intriguent et mériteraient que l'on s'y attarde davantage même si l'auteur nous livre quelques uns de ses secrets. 

Avec ce premier volet, Robert Jackson Bennett a posé les bases d'un univers solide qui ne demande qu'à s'épanouir dans les prochains tomes en creusant notamment du côté de ses personnages et en levant le voile sur les mystères, à peine esquissés ici. A suivre !

Fantasy à la Carte

D'autres avis sur la blogosphère : L'Epaule d'Orion, L'Ours Inculte et Yuyine

Informations

Robert Jackson Bennett
Les Maîtres Enlumineurs
 9782226441515
631 pages
Editions Albin Michel Imaginaire

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